Antiquité / Moyen-Age / XVe siècle / XVIe siècle / XVIIe siècle / XVIIIe siècle
Les pages qui suivent recensent de nombreux
phénomènes liés à la chute probable de météorites en France depuis l’antiquité.
Dans certains cas, le terme d’aérolithe ou de
bolide a été maladroitement utilisé par les auteurs
des textes reproduits ici pour parler de phéno-
mènes atmosphériques ou physiques qui n’ont rien à voir avec les météorites : tempête, grêle, foudre, pluie de substances diverses, etc... Il est parfois compliqué de définir le contenu de certains textes et j’ai malgré tout choisi de publier ces documents quand le doute subsistait quant à la nature des phénomènes. Ils sont donc à interpréter avec prudence.
Antiquité
vers l’an 70, Gaule narbonaise. Pline l’Ancien indique
dans son Histoire Naturelle qu’il a pu voir, peu après sa
chute, une pierre du ciel (lapis ex coelis) dans le
territoire des Voconces. Au 1er siècle avant notre ère,
les Voconces occupent une vaste région sur la rive
gauche du Rhône. L’auteur écrit : “Ego ipse vidi in Vocontiorum agro paulo ante delatum (lapidem)”, ce qui se traduit par : “Moi-même j’ai vu, dans le territoire des Voconces, une pierre qui venait d’y tomber.” Source :
Pline l’Ancien, Histoire Naturelle, livre II, 59, 3.
Moyen-Âge
5e siècle, près d’Arles (Bouches-du-Rhône). “Il existe
à Marseille une tradition ancienne d’une pluie de
pierres tombées dans une plaine, que l’on appelle à
présent la Crau, et qui se trouve à 7 lieues d’Arles.
Cet événement, qui n’est connu, que par tradition, doit se rapporter au 5.me siècle de notre Ere à peu près.
Chambers en a parlé dans son Dictionnaire ; et c’est
une extravagance, que de prétendre, qu’on trouve
encore dans cette plaine les pierres tombées en cette
occasion.” Source : Giornale di fisica, chimica e storia
naturale, tome 4, 1811. Cette histoire est plutôt à rapprocher de la légende qui veut que Hercule, étant attaqué par les Ligures et manquant de javelots alors qu’il traversait cette plaine, aurai prié Jupiter, qui aurait alors jeté une pluie de pierres sur les ennemis.
537. “Cependant Childebert et Théodebert mirent sur
pied une armée, et se disposèrent à marcher contre
Clotaire [en 537] ; celui-ci l’ayant appris, et jugea qu’il
n’était pas de force à se défendre contre eux, s’enfuit
dans une forêt et y fit de grands abattis, plaçant toutes
ses espérances en la miséricorde de Dieu. Mais la
reine Clotilde ayant appris ces choses se rendit au
tombeau du bienheureux Martin, s’y prosterna en oraison et passa toute la nuit à prier qu’il ne s’élevât pas une guerre civile entre ses fils. Ceux-ci, arrivant avec leur armée, assiégèrent Clotaire et pensaient le tuer le jour suivant ; mais le matin arrivé, une tempête s’éleva dans le lieu où ils étaient rassemblés, emporta les tentes, mit en désordre et bouleversa tout. A la foudre et au bruit du tonnerre se mêlaient des pierres qui tombaient sur eux. Ils se précipitaient le visage contre la terre couverte de grêle, et étaient brièvement blessés par la chute des pierres. Il ne leur restait rien pour s’en défendre que leur bouclier, et ce qu’ils craignaient de plus, c’était d’être réduits en cendres par le feu du ciel. Les chevaux furent aussi dispersés, et à peine les put-on retrouver à la distance de vingt stades ; il y en eut même beaucoup qu’on ne retrouva pas. Prosternés, comme nous l’avons dit, la face contre terre, et blessés par les pierres, ils exprimaient leur repentir, et demandaient pardon à Dieu, d’avoir
entrepris la guerre contre leur propre sang ; mais il
ne tomba pas une seule goutte de pluie sur Clotaire,
il n’entendit pas le moindre bruit de tonnerre, et
au lieu où il était, il ne se fit pas sentir la moindre haleine
de vent. Les autres, lui ayant envoyé des messagers, lui
demandèrent de vivre en paix et en concorde, et l’ayant obtenu, ils s’en retournèrent chez eux. Il n’est permis à personne de douter que ce soit un miracle du bienheureux Saint Martin, obtenu par l’intercession de la reine.“
Source : Grégoire de Tours, Histoire des Francs.
580, septembre. “On voit un globe de feu parcourir
le ciel.” Source : Dom Bouquet, Recueil des historiens
des Gaules et de la France, tome II.
583, 31 janvier. “Un globe de feu se détache du ciel et
parcourt un grand espace.” Source : Dom Bouquet,
Recueil des historiens des Gaules et de la France, t. 2.
584, décembre. Un large météore est observé dans le ciel. “Apparurent dans le ciel de vifs rayons de lumière qui semblaient se croiser et se heurter.” Source : Saint Grégoire, évêque de Tours, Historia Francorum.
585, Septembre. “Certaines personnes virent des
signes, à savoir des rayons ou des dômes comme on
en voit généralement... filer dans le ciel.” Source : Saint Grégoire, évêque de Tours, Historia Francorum.
585, 28 octobre. Un globe de feu étincelant et produisant
un grand bruit serait tombé en France. Sources : Saint-
Grégoire, évêque de Tours, Historia Francorum. Dom
Bouquet, des historiens des Gaules et de la France,
tome II.
587, janvier, Paris. Selon l’historien Henri Sauval, “on
vit dans le ciel une grande masse de feu étincelante.”
590, en mars. “Des globes de feu parcourent le ciel
plusieurs fois dans la nuit.” Sources : Grégoire de Tours,
Dom Bouquet.
944. “Des globes de feu parcourent les airs ; quelques-
uns ont incendié des maisons.” Sources : Frodoardi
Chron., Dom Bouquet, tome VIII. Petŭr Beron,
Panépistème, ou sciences physiques et naturelles et sciences méta-physiques et morales, 1861.
vers 1032, Vendôme (Loir-et-Cher). Les récits anciens mentionnent que trois lances de feu seraient tombées dans une fontaine. Geoffroy 1er Martel, comte de Vendôme, fortement marqué par l’événement dont il fut témoin, ordonna la construction d’une abbaye sur le lieu même du phénomène. Il s’agit de l’actuelle abbaye de la Trinité, à Vendôme. “Un dimanche matin, au lever de l’aurore il arriva que le comte se mit avec son épouse à la fenêtre qui éclairait leur chambre du côté de l’aquilon. Le château se trouvait sur la crête de la montagne où s’élève aujourd‘hui l’église St Georges. Le bourg, avec ses nombreux habitants, était au pied de la montagne et exposé au vent du nord. Hors du bourg, vers l’orient, s’étendaient de vastes prairies au milieu desquelles s’ouvrait une large fontaine où presque tous les habitants venaient puiser. Or, comme le comte et son épouse, qui s’appelait Agnès, considéraient l’étendue du ciel et la multitude des étoiles et parlaient entre eux de diverses choses, tous deux virent soudain une étoile très longue, en forme de lance, tomber dans la fontaine. Ils n’étaient pas encore revenus de leur étonnement qu’une seconde étoile tomba, puis une troisième, redoublant leur stupeur et leur admiration.”
Source : Abbé Gabriel Plat, « L’église primitive de la
Trinité », Bulletin de la Société archéologique du
Vendômois, 1925, p. 119, et Gesta Consulum Andegavorum ou Chronique des Comtes d’Anjou, rédigées entre 1100 et 1140 par le moine Jean de Marmoutier.
1057. “Des pierres d’une grosseur étonnante tombent
avec de la grêle.” Source : Dom Bouquet, Recueil
des historiens des Gaules et de la France, t. XI, p. 22.
1093, 10 avril, Paris. (date imprécise. Peut-être le 1er avril 1093 ou en 1094). Plusieurs bolides sont
observés ; l’un d’eux serait tombé, laissant une matière
brillante.
1120, 19 août, Metz (Moselle). “On aperçoit à neuf heures du soir sur Metz, un météore igné se dirigeant vers le Nord. L’apparition de cette sorte de comète dura environ sept minutes et demie. Les habitans, selon le préjugé de l’époque, regardèrent cet évènement comme un présage manifeste de quelque calamité pour la ville.” Source : Le Voeu national du 20 août 1851.
1198, 8 juin, Chelles (Seine-et-Marne). Henri Sauval,
historien français du XVIIe siècle évoque la chute
de pierres près de Chelles, en région parisienne.
D’après Rigord, il y eut une tempête entre Chelles
et Tremblai et il tomba du ciel des pierres, les unes grosses comme des noix, les autres comme des oeufs,
ou même davantage. Peut-être était-ce une tornade et non pas une chute de météorites...
1305, 1er octobre, dans le Limousin. “L’hiver de cet année fut tres-rigoureux pour la grandeur du froid,
qui fit glacer les rivieres les plus rapides, & le jour
de saint Remy au sol des Vandales il tomba de la
grasle, dans laquelle il y avoit des pierres embraseés
de feu, qui causerent plusieurs incendies en tout ce
qu’elles touchoient, ou maisons ou animaux.“ Source :
Histoire de St Martial apôtre des Gaules et principa-
lement de l’Aquitaine et du Limousin, par le père Bonaventure de Saint-Amable, en 1685 (vol. III, p. 607).
1360, 6 mai, Sours (Eure-et-Loir). Le 6 mai 1360, les
troupes du roi d’Angleterre, Edouard III, sont à Sours.
Un chroniqueur local, Froissard, relate les faits :
“Pendant que les traiteurs français allaient et
prêchaient ledit roi […] un effoudre et orage si grand
et si horrible descendit du ciel en l’ost du roi
d’Angleterre… ; car il chut de l’air des pierres si
grosses qu’elles tuaient les hommes et les chevaux, et
en furent les plus hardis tout ébahis…” Météorites ou
grêlons énormes ? On ne le saura probablement jamais.
1400, Pfaffenheim (Haut-Rhin). Une légende locale
rapporte qu’en 1400, des habitants de Pfaffenheim virent apparaître sur la montagne une lueur puissante qui disparut rapidement. Ils crurent à un feu de forêt mais après constatations, ils ne trouvèrent aucun arbre calciné. Ils jugèrent alors que cela tenait du miracle. Le lieu en
question s’appelle Schauenberg (ou Schonenberg). A cet endroit, un ermite qui s’appelait Uldaricius vint vivre et construit une chapelle dédiée à un saint local, l’évêque Ulrich d’Augsbourg (890-973), premier saint catholique canonisé par le Pape Jean XV. Le phénomène lumineux
était très certainement lié au passage d’un bolide derrière cette montagne.
XVe siècle
1447, septembre, Rouvres-en-Plaine (Côte d’Or). On
signale dans certains écrits une pluie d’aérolithes
dans la plaine de cette commune, qui a marqué les
populations locales, impressionnées par ce mauvais présage.
1454, région de Bresse. Une lettre manuscrite datant
du XVIIIe siècle est conservée aux Archives
départementales du Rhône. Elle relate sans trop de
détails la chute de “pierres célestes dans la région de
Bresse, par le temps le plus serein, et le soleil le plus
radieux.” Un fragment de plusieurs kilogrammes était
conservé dans la collection de M. de Varenne de
Béost (1710-1780), secrétaire en chef des Etats de
Bourgogne, et correspondant de l’Académie Royale des Sciences. La vente de son Cabinet de Curiosité
fut réalisée le 4 juillet 1744. Source : Catalogue des
Curiosités naturelles qui composent le Cabinet de
M. de Claude-Marc-Antoine Varenne de Béost et dont
la vente se fera à Paris, rue de la Sourdière, le Lundi
4 juillet 1744. Paris, Claude Hérissant, 1774.
1465, 22 septembre, Paris. “Les troupes du Duc de
Bourgogne tenaient la ville bloquée lorsque, pendant la
nuit, parut un météore qui épouvanta les assiégés, d’autant plus qu’on le vit comme sortir du camp ennemi.
Il vint tomber dans les fossés près des remparts de
la porte Saint-Antoine, à Paris.” Source : Henri Sauval, Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris.
XVIe siècle
1506, 4 août, entre Tours (Indre-et-Loire) et Blois (Loir-et-Cher). “Apparition sur les parties d’Italie d’une grande comète tirant la queue contre Flandres. Elle cheut entre Tours et Blois.” Registre de Sarpillon, secrétaire greffier de l’abbaye de Saint-Etienne (actuelle cathédrale Saint-Bénigne de Dijon).
1527, 5 avril, vers 17 h. Vienne (Isère). “Il sembloit que le Ciel vouloit parler aux hommes par une comète. Il avoit déjà fait trembler tout le Septentrion, & il parût sur la Ville de Vienne environ cinq heures âpres midy du V. jour du mois d’Avril de cette année M. DXXVII. Sa figure étoit approchante de celle d’un dragon ardent. Ayant passé sur le Rhône, il s’enflamma davantage, & s’arresta sur l’eminence qu’occupoit le Château de la Bastie. Là, il sortit de ce meteore deux éclats si violents, que le bruit qu’ils firent, ne fut pas moindre que celui de deux coups de canon. On crut que la terre en avoit tremblé, & quelques-uns asseurerent qu’ils s’en étoient aperçeus. Apres il disparut, ne laissant dans sa trace qu’une obscurité pareille à celle qui seroit causée par une épaisse fumée.” Source : Nicolas Chorier, Histoire générale du Dauphiné, t. 2 (1672).
1528, 5 avril, Le Puy-en-Velay (Haute-Loire) et à Lyon (Rhône). “Lan mil v / ct / xxviii et le dimenche des Rams questoit le v / me dapvril fut veue une comete ou brandon de feu en lair tenant grande estendue passant sur le pre de barres aupres des carmes se pendant quon se esbatoit a jouer aud[it] pre les barres** apres soper ou avoit grant numbre de peuple hommes et femmes laquelle chose a este veue en autres divers partis jusques de la les montz Ce que fut imprime en plusieurs villes et que pouvoit signiffier selon leur oppinion et savoir Touteffois ay je trouve en diverses croniques et traictemens dhistoires de nobles acteurs que teles cometes ou semblables brandons sont souventeffois advenus le temps passe qui navoient mille male couverture***” Source : Le livre de Podio Estienne de Medicis, marchand du Puy, t. I, 1475 - 1565.
***
“Ite[m] le merveilleux brando[n] de feu quasi traversa toute la fra[n]ce et terrible bruit qu’il fist en passant dess[us] Lyo[n] le V davril M. ccccc. xxviii. / Ite[m] la pluye de pierres laquelle se fist es parties Dytalie le mesme iour et heure q[ue] le dessus brandon de feu fut veu passer par dessus Lyo[n]” Anonyme.
** C’est de ce jeu que vient l’expression “avoir barre(s) sur quelqu’un”. Au Moyen Âge, le “jeu de barres” se pratiquait après dîner pour aider à la digestion. Deux équipes généralement de 6 joueurs à 10 joueurs. s’affrontaient en file indienne face-à-face. Le premier qui franchissait la ligne était “sous la barre” de celui de la bande opposée qui entrait sur le terrain après lui. Ce joueur essayait alors de le toucher pour le faire prisonnier : c’est ce qu’on appellait “avoir le droit de barres”. La finalité du jeu consistait à faire le plus de prisonniers possibles.
*** En français moyen et en particulier ici, “couverture” est à prendre au sens de “dissimulation”
(remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour ses retranscriptions.)
1540, 28 avril, région du Limousin. Plusieurs pierres
seraient tombées dans la paroisse des Eglises, en
Limousin, en 1540. Bigot de Morogues, en 1812,
présente les écrits du père Bonaventure de Saint-
Amable (Annales du Limousin, vol. III, p. 769) :
“L’an 1540, le 28 avril, il y eut une violente tempête,
accompagnée de tonnerre et de grêle ; elle dura dix
jours, dévastant les différentes contrées du Limousin.
Dans la paroisse des Eglises, il tomba avec la grêle
une pierre plus grosse qu’un baril, qui entra dans la
terre à la profondeur de deux aunes, et on la retira
de ce trou avec des barres de fer. Il tomba aussi
plusieurs autres pierres grosses comme des œufs.” Les
informations disponibles, bien minces, ne permettent
pas de dire s’il s’agit ou non d’une météorite. D’ailleurs,
le célèbre minéralogiste Allaud mena, sans succès, des
recherches. On peut également lire les termes suivants
à propos de ce phénomène : “Le jour de Saint-Urbe,
l’an 1540, tomba de la grelle grosse comme noix par
une tempeste. Ce qui porta grand dommage aux biens
de la terre durant la banlieue ; car l’impétuosité fust
sy grande qu’elle gasta les vignes jusques aux vieux septz.”
1543, 14 mai, Nay (Béarn). On vit apparaître vers
15h00 une boule de feu qui tomba sur une place de ce village, détruisant un bâtiment avec un fracas effrayant. Dans le tome 19 de la Revue de Gascogne (1878), A. Lequeutre, membre de la Société Ramond, indique : “L’an 1543, le 14 de mai, la ville de Nay se brûla tout à plat avec les faux-bourgs et ne demeura le feu (chose esmervellable) plus de trois heures ;
et l’endemain on ne trouvait de tout ce grand embrasement, charbon, brasier, ni cendres. Et était la flamme si violente qu’elle ne donnait répit ni loisir de l’éteindre, car elle sautelait d’un côté à l’autre avec une telle vitesse, qu’à peine ceux de l’une rue étaient accourus au secours de l’autre qu’ils voyaient leurs maisons embrasées ; et combien que le clocher fût fort haut, si se prit le feu plus tôt au sommet d’icelui qu’au corps du temple [ce clocher avait été, construit en1504] ; et tout ce qui se montrait au-dessus de l’eau des meubles qu’on y jetait pour les conserver, était incontinent allumé et se brûlait jusqu’à fleur de l’eau ;
Bodiu a voulu rendre quelque raison naturelle de ce
feu ; quelques autres ont écrit qu’il était provenu du ciel, mais il est certain qu’un petit garçon, qui est encore aujourd’hui vivant, par inadvertance, comme il
cherchait un esteuf, sous un lit, y mit le feu avec
une chandelle, et les bâtiments, qui étaient faits de
bois de sapin et couverts de bardeaux de fau,
prirent incontinent le feu et jetèrent si prompte flamme qu’elle fut épandue aussitôt dans toute la ville.”
***
“La ville fut complètement abandonnée à la suite de cet incendie et Jacques de Foix, évêque de Lescar, lieutenant général de Béarn, voulant donner du coeur aux personnes qui s’étaient sauvées de cette désolation générale, commit tout incontinent les sieurs du Cassou et d’Abbadie pour se transporter sur les lieux et travailler aux moyens les plus commodes et de la moindre dépense qui se pourrait pour remettre les bâtiments dans un état convenable, ainsi qu’ils sont à plein spécifiés sur la patente sur ce expédiée et enregistrée en la chambre des comptes de Pau, le 24 janvier 1547.” (Bull, de la Société des sciences, arts et lettres de Pau.)
***
L’auteur J. Labat, ajoute : “Pièces en main, je me crois en état de rectifier l’assertion de Mézeray et d’appuyer l’explication que donnent de l’incendie de Nay les historiens du Béarn. Les collections du Grand-
Séminaire d’Aire possèdent un petit aérolithe sulfuro-
ferreux qui pourrait bien avoir eu plus de part que
le soleil au fait en question. M. Mouliné, curé de
Pardies, près Monein, qui me l’a cédé, me l’a donné
comme provenant d’un bolide tombé jadis à Nay. Je ne
me souviens pas s’il m’en a dit davantage, mais
voici ce que rapporte l’abbé Poeydavant, d’après les
archives de Navarrenx : L’an 1543, deux ou trois
météores enflammés, que le peuple regardait comme
des planètes, se précipitèrent du haut des airs sur la
ville de Nay et la réduisirent en cendres. Un historien (Sponde, qui cite Bellefor., 1. 6, ch. 57,)
rapporte que cet événement survint aux fêtes de la
Pentecôte (à deux heures après-midi), en un moment
où le ciel était serein. De 5 à 600 maisons, une seule
échappa aux fureurs de l’incendie. Cette ville était
une des plus riches et des plus commerçantes du
Béarn. Sa destruction fut regardée comme une
vengeance du ciel.
Quoi qu’il en soit de notre spertise, dont l’origine aêrolithique pourrait peut-être se justifier par son
écorce noire et par l’effacement des angles qui
devaient se trouver extérieurement à la base ; des pyramides dont elle est formée, pe qu’il y a de fondé
dans les paroles de Mézeray, ne serait-ce pas simplement ce que racontent Sponde el Poeydavant ? J. Labat, Grand-Séminaire d’Aire, 20 mars 1878.”
***
Lespiault complète ainsi sur le sujet en 1865 : “Nérac, 18 avril.
Après la chute du magnifique bolide d’Orgueil, qui
eut lieu le 14 mai 1864, notre savant compatriote, M. Jean-François Samazeuilh, nous demanda si l’incendie de Nai, sous Henri d’Albret, ne pourrait pas être attribué à la chute d’un bolide ; et, à ce sujet, voici ce que notre historien local écrivait en 1827 dans ses Souvenirs des Pyrénées, t. 1,
p. 215 : « Quand le voyageur a dépassé le château de Coaraze, il laisse sur la gauche, au-delà du Gave, la ville de Nai, dont il aperçoit le toit, et l’église. Cette ville semble avoir été poursuivie par la fatalité. Il existait autrefois au même lieu un bourg qui disparut dans un désastre que ni l’histoire, ni les traditions n’ont pu nous faire connaître. Au commencement du XIIe siècle, les clercs de Sainte-Christine achetèrent ce territoire pour 360 sols et un cheval. Les religieux de Gabas, qui dépendaient de Sainte-Christine, y bâtirent une église autour de laquelle se groupèrent bientôt plusieurs maisons qui devinrent une petite ville. Henri d’Albret y établit des fabriques ; mais trois météores enflammés tombèrent sur la ville de Nai, et de cinq ou six cents maisons qui la composaient, une seule échappa à l’incendie. Nai s’était cependant relevé de ses ruines, quand les guerres de religion vinrent encore la désoler Comme on le voit, peu de villes éprouvèrent autant de malheurs ; et celle-là n’a, pour s’en consoler, que la gloire d’avoir donné naissance au ministre Dabadie
qui l’a rendue célèbre. » La question de M. Samazeuilh serait peut-être restée sans réponse, malgré la citation de nombreux exemples d’incendie allumés par la chute de bolides (F. Arago), si nous n’avions trouvé dans l’Histoire des troubles de Béarn, par l’abbé Poeydavant, des renseignements qui laissent peu d’incertitude à ce sujet. Voici ce que nous lisons dans le premier volume de cette histoire, page 56 : « Vers l’époque de la promotion de Roussel à l’épiscopat, le feu du ciel tomba sur une cité de Béarn et sembla présager le feu de l’hérésie et de la guerre qui devait bientôt embraser le pays. Le fait est rapporté dans les archives de Navarrenx. On y apprend que deux ou trois météores enflammés, que le peuple regardait comme planètes, et qu’on appelle rugles dans le langage du pays, se précipitèrent, du haut des airs, sur la ville de Nay et la réduisirent en cendres... »
Il résulte évidemment du texte même que nous venons de citer que, s’il faut attribuer l’incendie de Nai à une cause naturelle, la chute d’un bolide enflammé peut donner l’explication très plausible de cet événement mémorable.
M. LESPIAULT, Bibliothécaire de la ville de Nérac.
La cause est entendue, et nos lecteurs pourront
décider sur pièces la question de l’incendie de Nay. L’explication par une chute de bolides paraît la plus conforme au récit de Belleforest, de Sponde et des archives de Navarrenx. Mais Bordenave contredit ce récit, peut-être par le besoin, trop ordinaire aux meilleurs esprits, de trouver des solutions faciles. - Au reste, de telles combustions peuvent avoir lieu par d’autres causes encore que les bolides, la foudre et les accidents indiqués par M. Hipp. Masson. Je citerai la civitas Juhonum (auj. Huy, entre Liège et Namur) dévorée par des feux sortis de terre, au rapport de Tacite [Annal.,
l. XIII); et, si l’on révoquait en doute un fait si ancien,
je rappellerai des villages, voisins de Bassano, presque consumés par des feux du même genre, à. diverses reprises, en 1706, de 1717 à 1724 et en 1754. Voyez Calogera, Memorie, t. III, part. IV, p. 36; — Zaccaria,
Storia lett. d’Italia, t. IX, p. 483 et ss. ; aux pages 486-488 se trouve un journal détaillé d’observations sur
cet étrange phénomène.”
1554, 10 mars, Salon-de-Provence (Bouches-du-
Rhône). Nostradamus, le célèbre astrologue et prédicateur, fut témoin, à Salon-de-Provence, de l’apparition d’un météore ou d’une comète le soir du 10
mars 1554 ; sa description du phénomène et son interprétation du présage firent l’objet d’une lettre d’avertissement, datée du 19 mars 1554, à Claude de Savoie, comte de Tende. La lettre fut traduite en allemand et publiée à Nuremberg sous la forme d’un placard
intitulé “Ein Erschrecklich und Wunderbarlich
Zeychen.” “[...] Un spectacle horrible et merveilleurs est apparu ici à Salon, le 10 mars entre 7 et 8 heures du soir, et a été vu, m’a-t-on dit, jusqu’à Marseille, puis à St-Chamas près de la mer, et aussi à proximité de la lune qui à ce moment-là était presque à son premier quartier : un grand feu est venu de l’est et s’est dirigé vers l’ouest. Ce feu immense, d’un aspect tel qu’il ressemblait à un grand bâton enflammé ayant la forme d’une torche, a dégagé un éclat extraordinaire, et des flammes en sont sorties comme du fer rougeoyant travaillé par le forgeron. Et ce feu projetait de nombreuses étincelles, brillantes comme de l’argent, parcourant une distance immense, comparable à celle de la voie lactée qu’on appelle galaxie, avec la rapidité d’une flèche et un grand
grondement et crépitement, un immensum fragorem [fracas démesuré] comme disent les poètes, et apparaissant comme des feuilles et des arbres qui auraient été soufflés par un vent violent. Le phénomène dura longtemps, au moins vingt minutes, avant de se diriger vers la région pierreuse de la Crau d’Arles, puis il tourna vers le Sud, haut au-dessus de la mer, et le jet ardent qu’il a créé garda sa couleur rougeoyante, et continua de projeter des étincelles enflammées tout autour de lui, comme la foudre tombant du ciel. Ce prodige était plus terrifiant qu’aucune langue humaine ne pourrait le décrire. Et j’ai d’abord pensé
qu’il pourrait provenir d’une colline en face d’Aix,
appelée Ste-Victoire, mais le 14 de ce mois, alors que j’étais appelé à me rendre à Aix, j’ai demandé à beaucoup de gens s’ils l’avaient vu eux-aussi, mais personne ne l’avait vu. Cependant il est apparu à deux lieues de là, car le Seigneur de cet endroit qui l’avait aperçu, désirait que je puisse porter témoignage de ce qu’il avait vu et souhaitait en conserver la mémoire. Deux jours après avoir rencontré cet homme, un barbier de St-Chamas est venu me voir et a déclaré que lui et d’autres citadins avaient vu la même chose, et qu’elle avait pris la forme d’un arc-en-ciel s’étendant jusqu’à la mer d’Espagne, et que là où il finissait, en raison de sa hauteur, il avait dû brûler et réduire en cendres tout ce qu’il traversait. Puis dans le ciel et sur une largeur d’environ un stade, le feu a tout pulvérisé avant de s’évanouir. Et pour autant que je puisse juger de la situation dans cette région, c’est un phénomène nouveau et étrange, et il aurait mieux valu qu’il ne se produise pas, car cette apparition ou comète présage qu’il apparaîtra dans cette région de Provence ainsi que dans les autres endroits de la mer une calamité inattendue et imprévue, guerre, incendie, famine, peste, ou d’autres maladies étranges, ou encore que ces régions seront assiégées et soumises à des nations étrangères. Ce prodige a été vu par plus de mille personnes, et on m’a demandé d’en faire état et de le communiquer à votre Éminence, en raison du fait que je l’ai vu et entendu moi-même, comme il s’est produit. Et je prie Jésus notre Seigneur de bénir votre Éminence et de lui accorder longue vie, prospérité et heureuse fortune. [...]” (traduction de Patrice Guinard).
1577, 28 juin, Saint-Amour (Jura). “Description de l’effroyable meteore, et vision merveilleuse, n’a gueres veuë en l’air au dessus du Chafteau de l’Aubepin, proche de la ville de S. Amour, en la franche Conté de Bourgongne, le vingt & huictieme jour de Juin, mille cinq cen septante sept. Par M. Himbert de Billy, natif de Charlieu en Lyonnois, disciple de Noble Corneille de Mont-fort, dict de Blockland, &c.
Entre toutes les choses qui se presentent soubs la concavité des cieux, il n’y a rien qui donne plus de merveilles aux esprits humains, qui rauisse plus les gens, qui plus espouvante, qui engendre plus d’admirations, qui donne plus à penser, & qui plus esbranle par crainte, timidité & terreur : que les monstres & prodiges effroyables que Dieu journellement nous faict voir tant en la terre qu’au ciel, par lesquels nous descouvrons ordinairement son secret jugement. Mais ceux que le ciel nous met devant les yeux, son beaucoup plus considerables, d’autant que c’est le siege & l’habitation d’iceluy nostre Dieu : lequel comme de sa propre maison nous monstre combien grande & esmerveillable est la bonté & clemence. Car jaçois ce que l’ayons offensé par une infinie multitude d’execrables pechez, ce neantmoins il nous tend encores sa main, nous appelle, admonneste, & convoye de retourner à luy nous faisant apparoir tant de signes, & prodiges, tant de cometes extraordinaires, voire par fois des chariots courants par l’air : des armees traversantes les nuees, grand nombre de haches, couteaux & espees coulourees de sang, qui luy servent de herauts, trompettes & avuantcoureurs de sa justice. Si est-ce toutesfois que non ayant à ce esgard, demeurons toujours plongez & ensevelis obstinement en noz pechez, & quelques estranges advertissemens qu’il nous puisse donner, ne nous pouvons, ni daignons retirer de nos devies & voyes parverses. Parquoy considerant nostre deploree & desperee obstination, en tant de fortes de meschanceté qu’il n’y a aucune, ou bien petite apparence d’amendement : il continue de nous monstrer, tantost en un endroit, tantost en un autre, par météores espouventables & autres signes, & impressions celestes, come à juste cause il est irrité contre nous, & prest à nous rigoureusement punir & chastier de long temps on n’en vist de plus estranges, que ceux que nous voyons de jour en jour tout de suitte (cas admirable !) qui nous pressent & contraignent de nous retirer & entrer en nous mesmes, eplucher nos fautes & vices, & d’avoir en horreur nos mesfaits. Car faisant autrement nous signifie que nostre ruine est prochaine. Et de fresche mémoire y a il chose qui mieux nous annonce, & face scavoir que Dieu est courroucé à l’encontre de nous, que la vision nocturne apparue & veuë aux environs, par dessus le Chasteau de l’Aubepin proche de S. Amour, ville frontiere en la franche Conté de Bourgongne, la description & recit de laquelle cy mise en pourra faire foy.
En la presente annee mil cinq cens septante & sept, & le vingt & huictiesme du mois de Juin, veille de Sainct Pierre & Paul, que fut un vendredy au soir environ une heure & demie apres le Soleil couchant, fut veu en l’air par plusieurs personnes tant hommes que femmes, enfans petits & grans habitans au dict S. Amour, assemblez hors la porte de la dicte ville devers Orient, dicte communement la porte desenaut ou guichon, une grande clarté devers Orient, entre l’equinoxial d’extre & le tropique du cancre, se presentant une compaignie de gens de pied, armez de mourrions, espees & dagues, tournoyant en forme de limasson, & cheminant contre le septentrion. Et demeurerent en cest estre environ l’espace d’un bon quart d’heure : despuis tous s’entremeslans ensemble, survint une nuee obscure, laquelle les envelopa & les fit disparoir & perdre de veuë. Mais peu de temps apres ladiste nuee escoulee appareurent presque en mesme lieu, trois grans, puissans & vaillans chanpions armez de toutes pieces, ayans le mourrion en teste, le corcelet au doz, & l’espee au poing, & sembloient furieusement s’entrebattre à grands coups d’estoc & de taille. Ce qui donna grand espouventement aux spectateurs, les tirant & ravissiant en grande admiration, extreme frayeur & crainte. Apres lesdicts combatans, s’estans longuement entrebatus sans qu’il y eust apparance visible de blessure, mirent leurs espees par terre, faisant piteuses mines, se regardant l’un l’autre ores s’enclinant contre terre, croisans leurs mains joinctes contre leurs estomacs, ores faisans semblant se renverser. Et apres toutes ces façons de faire, reprindrent derechef leurs espees, & s’attaquerent vivement & plus asprement qu’au paravant, par trois reprinses fort furieuses en la maniere susdidte. Ce qui augmenta de tant plus la peur & crainte de ceux qui les regardoient. Finablement, une nuee fort espece, noire, atre, tyrant sur le jaune, les environna tous, les couvrant de tenebres, & en fit perdre toute la cognoissance. Toutesfois plusieurs attendans encores pour voir si ladicte nuee se couleroit, comme elle avoit faict au paravant, se fit quelque petit bataillon des nuees poussees & agitees des vents, comme il sembloit, sans apparance d’autre chose quelconques. Parquoy donc un chacun fort effrayé & estonné, se retira en la chacuniere avec disputes de la signifiance de ce spectacle prodigieux, l’un allegant cecy l’autre cela. Toutesfois sans aucune resolution, remettant l’explication à quelque docte & excellent Astrologue judiciaire, comme est monsieur de Montfort mon bon seigneur & maistre, à fin d’en dire selon les apotelesmes de l’art Astronomique, quels effects ceste imprecision celeste doit produire. Monsieur Morel mon voisin & meilleur amy en a ainsi briesvement dit son advis. Quant à moy pour le peu d’experience que j’ay & le peu de temps que j’ay employé à l’estude de ceste science : je n’en diray autre, fors que je croy que ce meteore ne presage rien de meilleur en ce pays que ce qui est desja passé aux autres. Parquoy j’exhorteray tout bon chrestien, de se prosterner en toute humilité devant la face de nostre bon Dieu tout puissant : avec entiere repentance de ses pechez & offenses : à fin que sa divine fureur ne s’embrase de plus en plus jettant & dardant les flesches de son ire contre nous. Mais qu’il luy plaise de nous regarder de son oeil de pitié & misericorde, changer les signes de vengeance & d’indignation, es signes de grace & amitié selon qu’il est coustumier de faire & nous delivrer de tous tumultes belliques nous favorizant d’une bonne paix, amour, union & concorde. Ainsi soit il.”
1579, 25 mars, La Beyssère-Haute (Haute-Loire).
Jean Burel, dans ses Mémoires, écrit : “C’est toujours
à la Beyssère-Haute qu’en l’an 1579, jour de Notre-
Dame de mars, que tomba une étoile et qu’elle brûla
cinq maisons, un habitant et plusieurs têtes de bétail.
Les gens du village prièrent Dieu, lui demandant de
les préserver de la présence de tels inconvénients et
de les tenir en sa garde.”
1583, 2 mars, entre 14h et 15h, régions de Savoie,
du Dauphiné, de Bresse. Un récit d’époque décrit
l’observation de météores et de pluies de roches sur
ces régions, provoquant des dégâts considérables. => A RETROUVER
1590, 8 mars, en France. “Description du grand,
horrible, et effroyable meteore, & vision merveilleuse
de deux armees apparues en l’air au dessus de
Chastel Charlon, en la franche Comté de Bourgongne, & plusieurs autres endroits des Gaules, le Jeudy, lendemain du jour des Cendres, huitième du Mois
de Mars, 1590.
Par le seigneur Gurot Maillard excellent, & par longues observations expérimenté Mathématicien, natif de Chastillon sur Cortine, & ordinairement resident en l’Abbaye de Baulme audit Côté de Bourgongne.
[...] Le Jeudy, lendemain du jour des Cendres, huitieme de ce mois de Mars en ceste annee mil cinq cens quatre vingts & dix, estant à Baulme, abbaye Imperiale & bien renommee au Comté de Bourgongne, (où je fais ma demeure ordinaire auec le Reverend Seigneur de Montirno, grand prieur dudit lieu) laquelle est posee en un fond, & enclose de tous costez de hauts rochers ou plustost boulevards, entez sur le sommet des montagnes, mais si bien unis & elabourez naturellement, qu’il est advis que l’artifice des mains humaines y soit entretenu, & qu’on les ait taillé à pointe de marteau. Et comme j’avois resolu d’aller à la foire de Lons le saulnier (ville digne de remarque, tant pour sa belle & bonne situation, que par le grand train de marchandise qu’on y trafficque) proche de ladite Abbaye de deux petites lieuës, laquelle se tenoit lors, m’étant levé environ demie heure devant l’aube du jour, je suis sorty au jardin & vergier de mon logis, & selon ma coustume, continuee depuis ma jeunesse d’observer de nuit la face du Ciel, levant les yeux en l’air, j’ay apperceu du costé de l’Orient deux troupes de gens de pied armez de mourions espees & picques, tournoyants en forme de limaçon, & cheminans en bel ordre & equipage contre le Septentrion, ce qui m’estonna estrangement. Pourquoy voulant descouvrir plus à plein que c’estoit, & voyant que les divers obstacles de l’abbaye & des maisons des religieux ne me permettoyent la totale veüe de la demy sphere cœleste, en compagnie de Messieurs le Prieur de S. Adegrin, le Doyen, & le Sellerier, qui tous trois ont les jambes à commandement, je suis monté pas à pas avec plusieurs autres villageois, un peu plus haut que l’Eglise de S. Jean, vers une croix de pierre, communement nommee la croix de monget, laquelle regarde droit le bourg & l’abbaye des Dames Religieuses de Chastel Charlon (où il y a un Chasteau d’ancien edifice, dont ledit bourg & abbaye prennent leur nom) lequel du temps de Loys onzieme Roy de France, & du Seigneur de Craon (qui le ruina, ensemble les autres forteresses & maisons des gentils-hommes Comtois mal defendues) estoit beaucoup plus fort & asseuré qu’il n’est pour ce jourd’huy. Car depuis alors la longue paix du pays (qui comme ennemie de tous desseins guerriers, aneantit & perd petit à petit les œuvres & actions des guerres) à fait que peu à peu ce chasteau s’est ruiné.
Estant donc, dis-je monté vers la susdite croix, je vis avec mes assistans droit sur le plant dudit Chastel Charlon lesdites trouppes armees à plaisir desquelles chascune sembloit avoir cent pas de front, & demeurarent presques un quart d’heure en cest estre, comme se preparans pour s’entrechoquer, & puis soudain se ruerent à l’escarmouche les uns parmy les autres d’une grade fureur. Ce que donna grand espouvantement aux spectateurs, les tirant & ravissant en grande admiration, extreme frayeur & crainte, de sorte que aucuns de nostre compagnie se sauverent vistement, pensans desja avoir les fourriers à leurs portes pour loger ceste gendarmerie : autres qui sçavoyent que tel exercice estoit à la solde d’un monarque plus puissant que tous ceux de la terre, referoyent cela au conseil de la majesté divine. A la fin l’issue de ceste guerre fut telle, que apres avoir donné plusieurs estramaçons les uns aux autres,& s’estre bien entrebatus auec leurs picques, la premiere des armees disparut sur la ville d’Arlay, & l’autre sur Poligny, survenant une nuee espesse tirant sur le rouge, qui les enveloppa, & fit perdre de veuë tous les combatans, ne restant que quelque petit bataillon des nuees poussees & agittees des vents, qui rendoyent grosses gouttes de pur sang, qui arrousoyent la terre à plomb (ce nous sembloit) plus de trois ou quatre lieux d’estendue, sans apparence d’autre chose quelconque.
Parquoy donc un chacun de nous, fort estonné de tel spectacle prodigieux, le retira en sa chacuniere, priant Dieu qu’il luy pleut destourner de nous ce sinistre presage, duquel particulierement ayant bien amplement discouru avec Monsieur Donçieux, mon bon maistre, & la compagnie allant à la foire dudit Lons le saulnier, qui me faisoit cest honneur de s’enquerir de moy de la signification de cette vision cœleste (comme il fait souvente fois des autres meteores, qui se monstrent de jour à autre, & ce qu’il me semble des saisons des annees) je ne luy ay voulu donner pour cette fois aucune resolution, remettant l’explication à quelque plus docte & suffisant Mathemate que je ne suis, comme nous avons en ces contrees Messieurs Morel Vallefinois, Paruin Lons-Saulinois, de Billy Charlienois, & ce grand & renommé de Montfort Stichtois ; & du costé d’Allemagne haute & basse, le divin Misocac, & le laborieux Sieur de Cormopede, affin d’en dire selon les apotelesmes de l’art Astronomique, quels effects cette impression celeste devoit produire.
Toutesfois estant importuné de plus en plus par ceux de la suite de mondit Sieur maistre pour leur communiquer mon advis, avec la priere entrevenue de celuy qui a pouvoir de me commander, je leur ay voulu dire, que les Athees, & ceux qui sous leurs masques se mocquent du pouvoir de Dieu, devroyent bien estre espouvantez de voir une vision si prodigieuse, & que jamais le mespris de tels signes ne demeure impuny, combien que plusieurs avec autant de folie que d’impiété se sont ris de ces presages, mais ce a esté à leur confusion, comme il est advenu à Pericles, qui se mocquat d’une extraordinaire Eclypse de Soleil, faite au dessus de son camp, perdit (ainsi que dit Plutarque en sa vie) toute son armee. Justin livre 33 & Amian Marcellin livre 23 & Paul Joue au 33 de son histoire, nous apprennent quelle perte, quel inconvenient a toujours talonné ses Epicuriens, qui ne font estat de tels apparens indices de l’ire de Dieu. Ceux qui ont feuilletté les histoires bien que tels amas d’hommes d’armes veus ent l’air, ne sont demeurez sans quelque dommageable & pernicieuse adventure.
Et pource nostre Meteore sus mentioné merite d’estre consideré à bon escient pour beaucoup de raisons, & entre les autres pource que nous l’avons veu justement en ce temps cy que les Gaules sont agitees de diverses tempestes de guerres domestiques & civiles. Qui sera-ce donc qui voudra nier que ceste vision prodigieuse ne soit un certain heraut, qui denonce augmentation de maux es dites regions : & qu’elle n’est un œuvre de Dieu expressement forgé, pour demonstrer qu’il est irrité contre nous, à cause de nostre desesperee obstination en tout genre de vices. Mais sans nous arrester icy, passons outre, & prenons ceste matiere un peu plus avant.
[...] Maintenant revenant par deça, & jettant la veuë depuis l’Abbaye de Baulme au comté de Bourgongne (où j’ay fait l’observation de ce Meteore) jusques au Septentrion, je me doute bien fort que les pays & villes ensuivantes ne sentent aussi bien que les Mahumetains, les malins effects de ce prodige, à scavoir la Duché de Bourgongne, le Bailliage d’Aumont de la Comté dudit Bourgongne, tirant contre les Suysses, & l’Alemagne, l’Angleterre, Irlande, Suevie, Silesie superieure, une partie de Vestrie, Pologne la majeur & mineur, Hongrie, Ruffie blanche, Franconie, Perse, Cypre, Portugal, Calabre, & Normandie. Et entre les villes Dijon, S. Jean de lasne, Chalon, Gray, Vezoul, Besançon, Ratisbonne, Cologne, le pays d’Utraict, Ancône, Naples, Bergame, Favence, Imole, Capoue, Ferrare, Vincence, Verone, Pavie, Bologne, Sienne, & c.
[...] Au reste retournant au lieu du Zodiac, auquel ce nostre meteore s’est monstré, à scavoir en l’Orient, & au signe des poissons, je diray selon l’authorité des anciens & modernes astronomes, que en premier lieu les subjects dudit signe, secondement ceux de la Vierge, qui luy sont opposez, tiercement ceux des Bessons, & apres ceux de l’Archer, qui sont en quart regard avec luy se trouveront attaints de la guerre, ou auront des bruits d’icelle, non gueres eslongné d’eux : nommément ceux de Venize, d’Alexandrie, de Lombardie, de Florence, de Modene, d’Anvers en Brabant, de Paris, Lyon, Tholose, de Narbonne, d’Avignon, certains lieux d’Espaigne, & plusieurs autres regions, provinces, citez & villes, tant de l’Europe, Afrique, que de l’Asie que je mettrois icy volontiers, mais elles rempliroyent trop de papier. Tandis je veux bien dire qu’il n’y aura gueres contree qui ne se ressente des malheurs belliques, & ne se trouve du jeu, & aye sa part au gasteau, toutes fois Dieu qui est createur & gouverneur des affreux meteores, & visions prodigieuses fera que le peuple Chrestien croira qu’il est superieur sur tout. & qu’il peut destourner le mal menaçant, mais quant à moy je mets astrologiquement par escrit, jouxte que le peu de mon scavoir porte. Il me semble qu’en cest endroit, & mesmement en ces saincts jours de la Caresme, apres confession faite, avec un coeur contrit & repentant un chacun se devroit mettre en estat de grace, & syncere devotion, pour prier Dieu, qu’il luy plaise par le moyen de l’expansn du precieux sang de son cher Fils nostre Seigneur Jesus Christ appaiser son ire, affin que de ta,t de guerres, que nous voyons devant nos yeux, il nous en defende, ou bien que ne soyent telles, & si facheuses, qu’elles sont demonstrees. Car je tiens preques pour certain, que les rebellions, desobeissances, les meurtres & intersections feront aussi grandes és terres de la Pucelle que furent jamais. [...]” Source : G. Maillard, Description du grand, horrible, et effroyable meteore, et vision prodigieuse de deux armées en l’air au dessus de Chastel Charlon en la France Comté de Bourgogne le jeudy 8 du moys de mars 1590.
XVIIe siècle
1607, 3 juin, Autun (Saône-et-Loire). “Le dimanche de Pentecoste, IIIe de juin 1607, environ les sept heures du matin, aparut au ciel un cercle ou globe qui environnait la terre, la ville d’Ostun et à troys coings d’icelle d’une splendeur semblable à un soleil, le premier et le plus luisant, aprochant la partie d’orient non gueres eslognée du soleil tirant sur le midy, le second au dessoubz de midy, et le tierce sur l’occident, et dura ce signe environ deux heures, et pendant l’arc-en-ciel se leva environ es parties du levant et donnant droit dans la splendeur la plus proche d’icelluy soleil, lequel je vis au Champ Saint-Ladre, le ciel estant fort clere et lucide.” Le champ Saint-Ladre correspond aujourd’hui à la place du Champ, à Autun. Source : Les mémoires de Dom Victor Tixier d’Autun, extraits publiés dans les Mémoires de la Société éduenne - nouvelle série, t. 45 (1927).
1617, 12 février, Rou-Marson (Maine-et-Loire). On raconte qu’au XVIIe siècle, des orages et des tempêtes de grêle violentes s’abattaient sur la plaine de Rou, près de Saumur. Jean-Louvet, auteur d’un “Récit véritable de tout ce qui est advenu digne de mémoire, tant en la ville d’Angers, qu’en pais d’Anjou et autres lieux”, raconte qu’une pluie de pierres blanches d’aspect cristallin et d’une extrême dureté, tomba du ciel le 12 février 1617. Météorites, pas sûr. Les cailloux mystérieux furent ramassés par les locaux “à plaines poches et dans les chalpeaulx.” M. Quélin, dans le Bulletin de la société d’études scientifiques d’Angers, séance du 2 avril 1896, indique la date du 13 février 1617. Il s’agit très probablement de quartz.
1618, 7 mars, Paris. L’incendie de la grande salle du Palais de Justice serait dû à un “météore large
d’un pied et haut d’une coudée”, qui tomba après minuit sur ce bâtiment. Une sentinelle au Louvre vit soudain “comme une grande étoile, qui avait une grande queue toute rouge et enflammée” tomber sur le Palais de
justice. Le roman Notre-Dame de Paris de Victor
Hugo mentionne d’ailleurs cet événement. Plus
vraisemblablement, il pourrait s’agir d’un acte criminel.
Dans Les galeries du Palais de Justice de Paris, Amédée de Bast écrit ceci : “Le mercredi, septième jour de mars 1618, le feu prit dans la grande salle du
Palais. Les uns disent par l’imprudence d’une servante,
les autres prétendent par l’ordre de Marie de Médicis,
qui voulait à tout prix anéantir la procédure de Ravaillac.”
***
On peut lire dans le Mercure François (t. 5, année 1618, p. 18 à 25) un récit très détaillé de l’incendie. L’auteur, Etienne Richer, débute par le récit des divers épisodes qui suivirent la découverte de l’incendie : “Voyons l’incendie de la grande Sale du Palais, advenu le 7 Mars. Sur les deux heures et demie apres minuict, la sentinelle du Louvre, du costé de la Seine, apperçeut comme un cercle de feu sur le haut de la couverture de la grande sale du Palais. Peu apres, des Chantres de la S. Chappelle qui ont leurs logements du costé qui regarde S. Berthelemy, et quelques voisins, à un cry qui se fit, au feu, au feu, apperceurent ce cercle qui s’agrandissoit
peu à peu, et estoit de la grosseur d’un tôneau, justement sur la pointe proche les Consultations, logis du Concierge. Le Guet qui garde d’ordinaire la grande porte de la court du Palais, s’estoit levé dès la minuict. On heurtoit aux portes de la grande sale, on crioit au feu par le dehors [...]” Mais quelques pages après, le Mercure François donne des causes moins célestes à l’incendie en citant une rumeur grandissante dans la population parisienne : “Rapportant ce qu’on en disoit dans le public, il parle d’une chaufferette allumée
qu’un marchand auroit laissée dans son banc, et, suivant une autre version, « d’un bout de flambeau » laissé sur un banc par la fille du concierge, et qui auroit communiqué le feu à une corde gagnant les combles.”
***
Dans un livret paru la même année et intitulé “Histoire de l’incendie et embrazement du Palais de Paris” (traduit du latin par M. Raoul Boutray), l’auteur ne cite à aucun moment de météore ou quelque phénomène céleste que ce soit comme cause possible de l’incendie.
***
On lira enfin un article sur cet événement dans le magazine l’Histoire n° 316, fr janvier 2007 : “Au secours, le Palais de justice brûle !” par Arlette Lebigre.
1620, 1er août, Saint-Usuge (Saône-et-Loire). “Le premier jour du mois daoust mille six cens et vinct apres la seulle messe on vist une planete tumber du siel en forme de feu du couste de sollez musson qui dura bien environ ung bon cart quart dheure dieu veille quil nous presage du bien en foi de ce je vicaire ai signe.”
Source : Registres paroissiaux, Archives départementales
de Saône-et-Loire, B - 1608 1624 4 E 484/2 - vue 58 / 96 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1621, 12 octobre, Lyon (Rhône). Un météore
extraordinaire parut au-dessus de Lyon. Ce phénomène
est observé dans tout le royaume. On lira avec intérêt et
amusement sa description fabuleuse dans le tome 5 des
Vieilles chroniques de Lyon d’A. Champdor.
1622, 10 août, Hastingues (Landes). “Le dixiesme aoust 1622 sur les 9 h du soir feust veu une estoille aussy brilhante q[ue] le soleil et aussy grande jettant gran[des] stincelles de feu on ne la pouvoit regarder acause quelle jetoit de feu seur les ieulx et dura lespasse de trois ou quatre minuttes ? ?” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales
des Landes, BMS 1594 - 1686 - E dépôt 120 / GG 1-5 - vue 104 / 289 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1624, 15 avril, Solignac-sur-Loire (Haute-Loire). “Le mesme jour environ m[inuit]? [lacune] Nadalle montet femme a estienne Jarousse du lieu de la borie tout aussy tost que heust faict lenfant moy pr[ese]nt le soir comme estienne Jarousse avec sa filhe me vindrent querir en ma ma[is]on nous avons veu thumber du ciel un flanbeau tout allumé et le landemain sesiesme j[ou]r dud[it] mois dapvril 1624 lad[ite] nadalle a este ensepvelie, le mesme* marriva lors q[ue] on me vint querir pour Cecille honnete femme a jean eymar qui mourut du mal denfant.” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de Haute-
Loire, S - 1620 - 1647 - E dépôt 241/21 - vue 7 / 75 -
acte n° 61 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1627, 8 décembre, Morlaix (Finistère). C‘est en 1908
qu’un inconnu, sans doute le chanoine Peyron ou le
chanoine Abgrall, fait paraître, dans le “Bulletin de
la Commission diocésaine d’Architecture et
d’Archéologie de Quimper”, p. 182, le texte suivant :
“Le huictiesme de décembre l’an 1627 une pierre
tomba dessus le clocher de sainct mathieu a Morlaix
a la veu de plusieurs personnes auquel estoit escript
ce qui s ensuilt :
Un peu avand 1630
Les bouga a la barbe jausne poyront la rante
Un beau gaston moult besoignera
et la Croix Rouge par luy de couleur changera
goude glao bras armou noaz a dra sur meur a bouga barbel a druillur
hac en oz Bro a changeo stil
Rac muy e guit cant mil a bresillo”
Source : Annales de Bretagne. Tome 77, numéro 4, 1970.
1634, 17 octobre, Vendenesse-lès-Charolles (Saône-et-Loire). La Gazette du 17 novembre 1634 mentionne une chute dans le Charolais : “La prodigieuse gresle
de pierres tombée fur les Espagnols au Comté de Charolois.
Les Annales sont bien pleines de prodiges qui servent
de préface ordinaire à la pluspart des Historiens : mais que sur le point auquel deux grandes puissances s’obsèrvent si soigneusement comme font aujourd’hui la Maison de France & celle d’Espagne : & en un lieu tel qu’est le Comté de Charolois dont celle-ci dispute la justice à la première : il ait tonné du Ciel comme un
Arrest décizif de leurs differents ; c’est chose qui ne m’a
pas semblé commune ni indigne de vostre lecture :
voire que cela ait esté premièrement remarqué dans
une ville qui appartient au premier Ministre du Roy ; aux soins duquel chacun sçait trop ce que la France doit, pour n’estre pas assez entendu de tous par cette perifrase : C’est ce que les moins superstitieux ne pourront volõtiers concevoir sans quelque augure que le Ciel se méfie ouvertement des affaires de la France.
Car il est arrivé que le 17. Octobre dernier, les
habitans de Paray, ville appartenante au Cardinal
Duc à cause de son Abbaye de Clugny, sitüée dans le Comté de Charolois entre les villes de Mâcon, Chalons, Moulins & Autun, à 12. lieuës de chacune, sur les 7. à 8. heures du matin : oüirent un grand bruit en l’air, semblable à la salve d’une batterie de 12. ou 15. canons. Ce qui leur fit regarder en haut avec d’autant plus d’admiration que l’air estoit des plus serains qui eust paru de toute l’année. Ils apperceurent lors’du costé du Levant un tourbillon de feu de la grosseur
d’un lict, suspendu entre les chasteaux de Charoles & Artus (deux des six Chastellenies que tient le Roy d’Espagne dans ce Comté de Charollois) force canonnades continüans de se faire entendre dans l’air de moment à autres, suivies d’une escoupeterie generale, & pareille à la décharge que feroit tout le Régiment des Gardes s’il iroit en mesme temps : auquel succeda un grand bruit confus, que les plus résolus prenoient pour la fin du monde : aussi a-il esté oüi 14. lieues à la ronde. Ce qui accreut l’estonnement, furent de grosses pierres du poids depuis une livre jusques à quatre, tombées du Ciel en mesme temps, entre ces 2. chasteaux d’Artus & de Charolles : noirastres au
dehors, & blanches au dedans : plusieurs desquelles sont gardées soigneusement par des personnes curieuses : où les Naturalistes ne trouvent pas moins
de quoi contempler, que les Politiques de quoi conjecturer. Mais tous à admirer cet effet extraordinaire en toutes ses circonstances.“
***
D’après Morinus, des témoins auraient assisté à une chute de pierres. Deux roches auraient été découvertes dans un village du Charolais. Il ne reste plus aucune trace de ces pierres et aucun écrit précis sur les circonstances du phénomène. La date du 27 octobre est également avancée. Dans les Chroniques
d’Auguste Gramard parues en 1954, on précise
ceci : “Au pays de Charollais vers les deux heures
après minuit apparut en l’air une torche en flammes
et après on entendit en l’air comme des coups de
canon et tomba à Vandenesse près Charolles des
pierres en forme de balle.” Dans J. B. Morini, Dissertatio de Atomis et Vacuo contra Gassendum,
p. 30, en 1650, on trouve : “Dans le comté de
Carolath, en présence d’un régiment de soldats,
le 27 octobre 1637, de nombreuses pierres tombent à
la suite d’un météore dans un ciel dégagé. Plusieurs sont tombées dans un marais ; d’autres, qui avaient creusé profondément un trou dans la terre, pesaient entre 5 et 8 livres et, selon la description, étaient
toutes aussi semblables aux aérolithes.”
***
Les Archives départementales de l’Allier (BMS -
1616 - 1675 - 142 E-DEPOT GG 7 - vue 89 / 257 - folio 84) proposent les registres paroissiaux de la commune du Donjon : “Nota Le 17 octobre 1634 au pays de Charrolois maconois vers Dombe Braisse La Conté et plusieurs autres lieux despuis les deux heures aprez minuit jusqua en[viron] les neuf heures du matin apparut en lair une torche en flammes et en apprez on entendit en lair comme des coups de canon et tomba a Vandenesse vers Charoles des pierres en forme de bales / a? /” (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription.)
1637, 9 août, Solignac-sur-Loire (Haute-Loire). “Nota bene Que le dimanche neuvîe[sme] jour du mois daoust .1637. il arriva qu’une comete* heure de dix heures de nuict donna une grande clarte. dans la ville de soll[ignac] quil resambloit un grand flambeau. et bien tost apres il en arriva autres deux qui firent le mesme. et toute la nuict il fit plusieurs effroiables esclairs. le landemain feste de st Laurant trois heures apres midi il arriva que le temps vint noir et tres effroiable avec que de nuees et trois tourbillions L’un vint du couste dagisoux** et lau[tre] de poutouse** et lautre de chambaud** ou tous trois se vindrent joindre au lieu de mussic** ou il resambloit une grande montagnie jusques au ciel tout en fumee ou les nuees se conbastoinct ensamble qui estoict une chose effroyable et tres espouvantable Roche curé” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de Haute-Loire, S - 1620 - 1647 - E dépôt 241/21 - vue 48 / 75 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
* Agizoux, Pouitouze, Chambaud et Mussic sont de petits
villages ou des lieux proches au sud-est de Solignac-sur-Loire.
** Dans la mythologie grecque et romaine, le foudre - qui est
nom masculin - désigne le faisceau de dards enflammés en
forme de zigzag représentant la foudre. Le foudre est l’attribut de Zeus (ou de Jupiter).
*** Le “chier” est le hameau situé sur les coteaux du
ruisseau venant de “Mussic”.
1637, 3 octobre, Le Donjon (Allier). “nota # B[ene] que le susd[it] 3. oct. 1637 environ le point du jour il est apparu un grand feu au ciel de lhauteur quest le soleil en hyver sur le midy, et ledit feu tiroit de soleil levant au couchant de la longueur dune picque ou en[viron] plut groc en teste que me semble la lune au plain et le reste en diminuat[ion]” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de l’Allier, BMS - 1616 - 1675 - 142 E-DEPOT GG 7 - vue 108 / 257 - folio 85 verso (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
***
“GASSENDI mentionne toujours dans son journal les arcs-en-ciel, les halos et parhélies, les aurores boréales ;
mais ces observations feront l’objet d’une étude spéciale où nous insérerons des remarques inédites de PEIRESC ; reproduisons seulement l’intéressante note sur un bolide, que GASSENDI appelle Fax ou Trabs, deux mots qui sont dans PLINE et VIRGILE.
3 octobre 1637. - « Ce matin, on a vu un météore de feu, volant de I’Est à l’Ouest à travers le méridien, à l’aube. Je ne l’ai pas vu, lisant je ne sais quoi à la chandelle allumée : je n’ai même pas vu ma chambre éclairée par sa lueur, comme plusieurs qui étaient dans des chambres sombres. On a dit que la traînée était restée visible longtemps ; chacun a décrit sa grandeur à son idée, de façon très variable. Sa hauteur aussi est indiquée avec de grandes différences : à l’endroit où il a traversé le méridien, elle semble avoir été de 15 à 20 degrés. On raconta ensuite qu’il avait été vu à l’Ouest dans tout le Languedoc, au Nord aussi, à Grenoble et Lyon, mais pas à Paris ».
Il nous plaît, de terminer sur cette note l’étude que nous avions projetée ; on y trouve les qualités de précision et de critique qui font de GASSENDI un savant moderne. Nous espérons avoir montré que, malgré les lacunes et le vague de ses observations -
mais la science à cette époque était encore bien balbutiante - le météorologiste, chez GASSENDI, n’est point négligeable et que son diaire méritait d’être tiré de l’oubli.
Pierre HUMBERT,
Professeur à l’Université de Montpellier” Source : La Météorologie, 1931.
1642, 9 septembre, partout en France. “Aussi n’y avait-il pas de quoy s’ébahir que les hommes se portaient si volontiers à allumer des feux en terre, puis que par le confiant rapport de plus de deux cens personnes la mesme matinée que Perpignan se rendit au Roi, à sçavoir le 9 de Ce mois, il s’est veû des feux alluméz en l’air en plusieurs endroits fort éloignez les uns des autres. Le prémier avis que l’on en eut fut par un Gentilhomme digne de foy, lequel revenu du bois de Monceaux, asseura que sur les sept à huit heures du matin luy & six autres avoient veu paroître près de Treilleport, une grosse boule de feu tombante du Ciel en terre, avec une queue de la longueur & forme de l’un des pavillons du Chasteau dudit Monceaux. Ce qui fut en suite vérifié par le témoignage de plusieurs autres. En mesme temps apparut aussi sur le bois de Vincennes & près de Montreuil un feu tombant à terre : & deux Pères Capucins venant de Loches à Tours, virent quantité d’autres feux, mais accompagnez de grands bruits pareils à des coups de canon, l’air estant serain & hors d’apparence de tonnerre avec l’admiration de tout le voisinage. Le matin du mesme jour 9 sept lieues autour de la ville de Pitiviers, depuis le lever du Soleil jusques midi, parurent aussi plusieurs feux, aucuns de la grosseur d’un tonneau & d’autres moindres : lesquels tumbans sur des matières combustibles & sur la paille mesme, ne les bruloient point, comme si le Ciel se
fust voulu lier avec la terre, pour réchauffer & acroistre son alaigresse.” Source : La Gazette du 20 Septembre 1642.
***
A Lathus-Saint-Rémy (Vienne), le curé de la paroisse Saint-Maurice relate que “Le mardy deusiesme jour de septembre mil six cent quarente deux environ les sept a huit heures du matin le ciel estant calme et clair estoit arrivé un coup co[mm]e d’un canon lequel auroit faict tel bruit quil auroit estonneté tout le peuple & auroit duré le bruict plus de deux quart d’heure & se seroit veu en beaucoup de lieux une lance flamboyante & plusieurs aultres signes.” Source : BMS 1640 -1649 E DEPOT 120 GG2 5 Mi 0980 vue 32 / 148 folio 138 verso. (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).*
* Le curé s’est probablement trompé d’une semaine dans sa rédaction du phénomène observé...
***
Dans la Vienne, à Amberre, le curé de la paroisse de Saint-Pierre indique que : “Le neufiesme septembre 1642 sur les sept a huict heures du matin il fut ouy par toutte la france chascun croyant que ce fust sur soy en lair un coup clair & serain & autant beau jour quil se peut estre un coup qui apres roulla quelque temps & espouventa tout le monde certains disant avoir veu diverses choses les autres en lair les autres estre sorty de la terre & sur le jour que perpinian se rendit a messieurs de Chomet & La mailleraye mareschaux de france*”. Source : Entraide généalogique dans la Vienne (http://www.ge86.fr), Registres paroissiaux, B 1608 - 1668 E depot 2 GG 1/4 vue 90 / 130 folio 92 = 13 verso (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
* Ici le curé fait référence au siège et à la prise de Perpignan par l’armée française au cours d’un des épisodes de la guerre Franco-Espagnole elle-même partie de la guerre de Trente Ans qui se terminera en 1659 par le traité des Pyrénées. La prise de Perpignan aux troupes castillanes sera le début de l’incorporation du nord de la Catalogne au royaume de France.
1644, avril, Metz (Moselle). “Un fait singulier se passa à Metz, le 24 avril 1644. On était peu versé à l’époque en météorologie, et le moindre phénomène céleste passait pour miracle. Or donc, le 24 avril 1644, un bolide lumineux se fît voir vers 9 heures du soir. Ce bolide ressemblait àune boule de paille en feu et éclairait tout le ciel. Le monde, raconte une chronique du temps, disait que c’était un présage de malheur.” Source : Moniteur de la Moselle du 24 avril 1884.
1647, 5 août, Le Donjon (Allier). “Le cinquiesme jour daoust 1647 en[viron] huict ou neuf heures du soir apparut une comette et signe espouventable en lair premierement il se fict un grand esclair comme precedent le tonnerre et incontinent lon vid en en lair fort hault tendant du midy au soleil couchant un gros feu ardant et tiroit en long et diminuant en pieces separees de la longueur de deux ou trois picques et estant reunies dun coste fort grosses en diminuant jusques a lautre bout se mirent en demy rond et sescartant petit a petit apres environ demy heure le tout disparut Plusieurs mont dit que lautre foix precedant environ la mesme heure ils auroient veu en lair du mesme coste un feu semblable que Dieu vueulle que ce soit bon presage.” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de l’Allier, BMS - 1616 - 1675 - 142 E-DEPOT GG 7 - vue 157 / 257 - folio 136 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1652, 9 septembre, Bordeaux (Gironde). “Un météore
en forme de globe parut la nuit dernière au dessus de la rue du Châpeau rouge, & traversa toute la ville jusqu’à cette Ormée : sur laquelle ayant demeuré assez long-temps, il y laissa tomber plusieurs blüettes ardantes, & disparut : ce qui n’a pas peu estonné
cette Assamblée, laquelle prend cette apparition pour un présage de sa rüine.” Source : Gazette, n° 113, 1652.
1662, 17 octobre, Lourdes (Hautes-Pyrénées). “Le dix et septie[me] de ce mois an susd[it] entre les trois et quattre heures du matin fut veu en l’air un g[rand] feu qui esclairoit co[mm]e le soleil il s’esleva d’entre le midy et le couchant et tirant entre l’orient et le septentrion, il se fit en deux et se dissipa et tost apres, on ent[en]dit un bruict sourd, co[mm]e si c’eut esté un coup de tonnerre, le ciel estant neantmoins fort serain, ou bien un tremble terre et ce feu ne feut pas seulem[en]t veu en cette ville mais encore dans le voisinage et mesme dans le Bearn.” Source : Geneadom
1664, 3 juillet, Issy-l’Evêque (Saône-et-Loire), Coulanges (Allier), la Tour du Pin (Isère). “Le 3e juillet 1664 sur les sept heures du soir le temps estant fort serain, on entendit un fracas et grondement au ciel de la lune qui causa de lestonnement a plusieurs”
Source : Registres paroissiaux, Archives départe-
mentales de Saône-et-Loire, 1657 - 1670 - E dépôt 1271 -
vue 89 / 172 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
***
“nota [en marge]
Le troisième jour de juillet de l’an 1664 est arrivé et a esté ouy un grand coup en l’air comme de canon ou de tonerre durant l’espace d’un miserere, le ciel estant clair et fort serain ; cela arriva incontinent apres soleil couché environ les huict heures du soir, et plusieurs en divers endroits on veu des feux en l’air et tomber en terre.
A. Borday vicaire de Collange” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de l’Allier, B - 1665 -
1683 - 78 E-DEPOT GG 3 - vue 65 / 72 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
***
“Le 3. je montay à cheval pour soulager mes porteurs à
la montagne d’Aiguebelette que je demeuray presque deux heures à monter, & je la descendis en chaise & fus diner au Pont de Beauvoisin esloigné de 4. lieues seulement, qui en valent 5. c’est une petite ville dont la moitié est de Savoye & l’autre de Dauphiné ; & la separation est le milieu du pont ; l’apresdiné je ne fis que quatre lieues & fus coucher à la Tour du Pin où
sur les huit heures me promenant devant l’Hostellerie de la Croix d’or, je vis plusieurs personnes qui prenoient le frais sur un pont qui est à la porte de la ville, & regardoient en l’air un Météore gros comme une pomme, & fort rouge avec une queue d’un demy pied fort claire qui tomba du midy au couchant, je m’avançay pour voir ce que c’estoit & je vis encore la trace du chemin qu’il avoit fait, qui estoit clair beaucoup plus que la voye de laict, & de largeur d’un pouce il estoit rompu en deux & aux extrémités
voisines de ces deux pièces avoit une espece de teste comme on dépeint les Cometes, mais de mesme clarté pasle que le reste de la trace. Le 4. j’arrivay à Lyon sur les 6. heures du soir.” Source : Journal des voyages de monsieur de Monconys, 1666.
1672, 10 juillet, Autefort (Dordogne). Une météorite
serait tombée à l’heure des vêpres, provoquant quelques
dégâts. En voici le bref récit : “Requeste de René
Bertrangeas, notaire, receveur du marquis, disant que
le jour d’hier (10e julhet 1672), la pierre du ciel
tomba sur la grange et greniers de la recepte, à Autefort,
et ce environ l’heure des vespres, laquelle pierre (un
aérolithe évidemment, et non la foudre en boule)
rompit des lates, cheurons et ardoize. Signé
Bertrangeas”. Source : Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord, 1874.
1676, 31 mars, en Corse. “En 1676, un globe de feu volant, partant de la Dalmatie, passa par-dessus une partie de l’Italie & alla éclater sur les côtes de Corse. Ce globe parut dans la nuit du 31 Mars, & effraya singulièrement les Habitans de Florence, qui le dépeignirent le lendemain fous des formes différentes, suivant qu’ils en avoient été plus ou moins affectés. Quelques-uns prétendirent même qu’il avoit la forme d’un dragon volant qui vomiffoit des flammes : mais ces bruits populaires furent bientôt appaisés par des observations plus sages & plus exactes.” Source : Sigaud de La Fond, Dictionnaire des merveilles de la nature, t. 2, 1781.
1684, 17 novembre, Saint-Aubin-du-Cormier (Ille-et-Vilaine). “M. l’Abbé de l’Anion a rapporté qu’il avoit vu un Phénomène extraordinaire le 17 Novembre vers les 10 heures du matin étant proche de S. Aubin en Bretagne ; c’étoit une flamme en forme de larme, grosse comme la main qui descendit du Ciel assés lentement pendant l’espace d’environ 7 à 8 minutes. On voyoit cette flamme assés clairement, elle paroissoit un peu bleue ; la queue jettoit des espéces d’étincelles, elle
étoit opposée au Soleil.” Source : Histoire de l’Académie des Sciences, 1733.
1687, 17 mai, vers Strasbourg (Bas-Rhin). “Philippes Guerhard, Bourgeois et Pescheur de la Ville de Strasbourg, a deposé par devant un Commissaire de la Ville, qu’ayant esté à la pesche la nuit du 17. de May dans l’Isle de Saint Robert, il apperceut à minuit & trois quarts, une lumiere qui éclaira la terre comme si c’eust esté en plein midy. En mesme temps il se presenta en l’air une boule de feu de la grosseur d’une teste, accompagnée d’une queuë de trois toises de longueur. Elle s’approcha si prés de la terre, que dans la crainte d’en estre touché, il se coucha tout de son long dans la Nacelle, & quand la boule tomba elle jetta un grand nombre d’étincelles, qui en s’esteignant firent des éclats semblables à une décharge de Mousquets, aprés quoy l’air retentit à trois diverses reprises d’un bruit pareil à celuy que fait le Canon. Tout cela dura environ un quart d’heure. Ensuite le Ciel fut semé d’étoiles, & parut fort clair par tout, ainsi qu’il avoit esté auparavant.” Source : Mercure galant du 1er juin 1687.
1698, 17 août, Dijon (Côte-d’Or). “Le même jour,
8 h. 57 m. du soir, à Dijon, un beau bolide, couleur
orangé, tirant un peu sur le rouge, et se dirigeant de l’ouest à l’est, a suivi une trajectoire très-sensiblement sinueuse. Il se mouvait par sauts ou bonds, comme certaines fusées. La traînée lumineuse, peu longue d’ailleurs, malgré la grosseur du bolide, était peu persistante. Je l’ai aperçu seulement au moment où il était à la hauteur du
trapèze du Lion ; il a traversé la constellation et s’est éteint sans détonation sensible à 5 ou 6° plus loin.” Source : Mémoires de l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, 1845.
1700, 7 janvier, en Normandie. Le dictionnaire des merveilles de la nature (t. 2) en 1781 relate : “Le 7 du mois de Janvier 1700, une heure avant le jour, il parut aux Habitans de la Hogue en basse-Normandie, un tourbillon de feu si éclatant, qu’il effaçoit la lumière de la lune, & que les Habitans de S. Germain-les-Vaux & d’Audeville, deux gros villages situés sur le bord de la mer, crurent d’abord qu’il étoit jour, & furent fort effrayés d’une clarté si prodigieuse. Ce feu avoit la figure d’un grand arbre, & couroit de l’ouest-nord- ouest à l’est-sud-est. Il étoit plus d’une heure de jour quand il tomba ; & ce fut avec un si grand bruit, que les maisons de ces deux villages en tremblèrent. Ceux de Cherbourg, éloigné de douze lieues, crurent qu’il étoit tombé sur Valogne, & ceux de Valogne sur Cherbourg. Ceux de la Hogue furent plus à portée d’observer ce phénomène, & il leur parut que cette flamme se perdit dans la mer, aux environs de la petite isle d’Origny, & ce spectacle fut a-peu-près le même que celui d’un gros vaisseau qui auroit été en feu.”
XVIIIe siècle
1704, 26 décembre, Montpellier (Hérault). “Le Pere Laval Jesuite qui est à Marseille, & Mrs. de Plantade & Clapies qui sont à Montpellier, envoyèrent à M. Cassini, avec diverses Observations Astronomiques, la relation d’un Phénomène lumineux qui avoit été veu le 26. Dec. 1704 à 5h. 30’ du soir à Marseille, & à Montpellier. On ne pouvoit douter par les circonstances des deux relations que ce ne fut le meme. A Marseille
où il fut mieux observé, le Pere Laval vit une Poutre
fort lumineuse, poussée de l’Est à l’Ouest assez lentement. Le vent croit à l’Est. Elle partit d’auprès de Venus, au moins à en juger par la vue, & alla jusqu’a la Mer où elle se plongea, tout au plus à deux lieues au large. On avoit veu auparavant à Marseille, ou aux environs, deux Poutres semblables, & ayant le meme mouvement. A Montpellier, on vit à l’heure marqée
un globe de feu tomber à quelque distance de la Ville. L’air étoit alors for serain, & fort calme, & une
couleur jaune tres-foible teignoit tout le Couchant à la hauteur de plus de 10 degrez.“ Source : Histoire de l’Académie royale des sciences, 1705.
1717, 4 janvier, Le Quesnoy (Nord). “M. Geoffroy
le cadet apprit à l’Academie que le 4. Janvier au
Quesnoy, le temps étant fort couvert, les nuages baissèrent au point qu’ils paroissoient toucher les maisons, qu’un Tourbillon ou Globe de feu parut dans le nuage au milieu de la Place, alla avec l’éclat d’un coup de Canon se briser contre la Tour de l’Eglise, & se répandit sur la Place comme une pluye de feu, après quoi la même chose arriva encore au même lieu. On peut juger de l’effroi des spectateurs.” Source : Histoire de l’Académie royale des sciences, 1719.
1718, Brest (Finistère). “En 1718, il parut trois globes
de cette nature auprès de Brest, de trois pieds & demi de diametre chacun. Ils se réunirent sur l’Eglise d’un village voisin, laquelle ils percerent à deux pieds
au-dessus du rez-de-chaussée. Deux hommes qui sonnoient furent tués, les murs furent abattus, les
toits emportés ; quelques-unes des pierres lancées à
plus de cent cinquante-six pieds de distance & d’autres
enfoncées en terre à deux pieds de profondeur.”
Source : La Gazette de France, 20 août 1773.
1719, 19 mars, en France et en Angleterre. “19. Mars 81/4. du soir, météore igné vu en Angleterre, en France, &c. Il se mouvoit comme une étoile tombante, mais plus lentement & en ligne droite ; parut d’abord dans les Pleyades & descendit au dessous du baudrier d’Orion, avoit d’abord la forme d’une traînée lumineuse, puis d’une poire, & enfin d’un globe moins gros que la pleine lune ; sa couleur étoit un blanc bleuâtre, & son éclat semblable à celui du soleil dans un jour serein, fit presque disparoître la lune qui avoit neuf jours & toutes les étoiles ; on vit dans les maisons aussi clair qu’en plein jour ; parcourut environ vingt degrés dans une demi-minute , laissa derrière lui une traînée
comme un nuage de la couleur du fer rouge étincelant, interrompu aux deux tiers de sa longueur, il dura plus d’une minute ; la place où avoit paru ce météore fut aussi étincelante & de couleur de fer rouge quand il eut disparu.”
1719, 30 mars, Paris, Dieppe (Seine-Maritime) et
à Pont-Audemer (Eure). “Beaucoup de gens qui se
promenaient le long de la plage ont vu une colonne de
feu qui émettait une très vive lumière, laquelle
s’approchant de la ville, a explosé avec un bruit
pareil à trois tirs d’artillerie et tomba défaite en fumée, sur les murailles, sans faire aucun mal.”
***
On peut également lire dans Récréations mathéma-tiques et physiques, tome 4, paru en 1725 : “En 1719. le Jeudi 30 Mars, au Pont-audemer, petite Ville de Normandie, parut sur les huit heures du soir, un Météore igné, assez semblable à celui qui fut vû le 31 Mars à Florence en 1672. C’étoit une maniere de Torche, ou de Poutre ardente, dont le corps de feu étoit d’un rouge assez sensible, & ce corps étoit suivi d’une queue fort longue, composée d’une lumiere la plus pure, & la plus vive que l’on puisse voir. Les rayons du Soleil, qui avoit été parfaitement beau tout ce jour-là, n’étoient pas plus brillans. Tout l’horison en fut éclairé, & les yeux de ceux qui virent ce Phénomene, en furent éblouis durant quelques minutes. Son mouvement, qui étoit d’une rapidité êtrange, alloit du Midi à l’Occident. Cette lumiere obscurcit celle de la Lune, quoiqu’elle fût fort luisante, étant dans le neuvième jour de son Croissant, le ciel étant d’ailleurs très-pur, & sans être brouillé par la moindre apparence de nuages ni de brouillards. Ce Météore, qui ne dura pas plus d’une minute, fut suivi
d’un bruit sourd, qui avoit assez de rapport à trois ou quatre légers coups de Tonnerre. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que l’Hyver, qui a été tout-à-fait doux, fut suivi ce jour-là d’une gelée & d’une bise très-piquantes. C’est cependant dans ce même jour que s’est embrasé dans la basse Région de l’air, cet amas d’exhalaisons sulphureuses & nitreuses, qui étant des matieres fort inflammables, à cause qu’elles contiennent beaucoup de matiere étherée, ne manquent jamais
de s’allumer dans l’air ; sur tout quand elles se heurtent & se choquent rapidement par l’agitation violente où les met le vent : ce choc dégage la matiere étherée,
qui allume ces matieres, comme on voit du choc du caillou & du fer, sortir des étincelles de feu, qui embrasent la poudre à canon.”
***
1725, 6 mai, Rouen (Seine-Maritime). “Extrait d’une Lettre écrite d’Evreux le 6. Mai, par M. A. à M. de
L. R. Il est bien tard de vous dire que quelques Philosophes sont surpris ici que le R. P. Castel
avance dans sa réponse à ma Lettre sur le tonnerre du Valdavid, qu’il ne connoît point de foudre sans feu avoient actif, & bien développé, & moi m’ai l’honneur de vous dire avec la même liberté que j’en connois : il est certain que le tonnerre tombe en
pierre, il est certain qu’il tombe en pluye. Or dans la
pierre & dans la pluye, il n’y a point de peu bien actif
& bien dévelopé, donc. Si le R. P doute de la foudre,
ou du tonnerre en pierre,& sans feu développé, nous lui
donnerons un Bourgeois de Roüen à present Citoyen
de notre Ville, propriétaire d’une Maison dans Roüen,
minée de fond en comble, avec les deux voisines,
par une abondance de pierre de toute forme, & de
toute espece, tombées du Ciel dans un temps de
tonnerre épouventable en 1651. fait certain, averé, testé, & s’il n’est pas rapporté quelque part, il est juste
d’en informer le Public. Que le R. P. donc ne dise pas
que depuis le temps qu’on observe le tonnerre on n’en
a point encore observé sans feu. Qu’appelle t’on je
vous prie, le carreau dans la foudre ? ce que le
P. Pomey appelle Cuneus en Latin, hoc est fulmineus
lapis. [...]” Source : Mercure de France, juin 1725.
1725, 19 juillet, Gien (Loiret). “LETTRE écrite de Gien-sur-Loire, Ville de l’Orléanois le 21. Juillet 1725. comme tout le monde est interessé à découvrir les differens Phenoménes qui arrivent dans la Nature, & que nos plus grands Philosophes n’ont travaillé que pour en donner des notions les plus vraisemblables. J’ai crû, Messieurs, vous faire plaisir de vous envoyer les particularitez d’un Phenoméne qui a paru dans le Ciel. Les sçavans pourront examiner & approfondir cette matière et nous attendons avec grande
impatience leurs conjecures.
Le Jeudi 19. de ce mois entre 8. et 9. heures du soir, comme tout le monde étoit à la promenade, on
apperçût une étoile qui paroissoit aux yeux de la grandeur d’un écu, laquelle après être allée comme un trait d’arbaleste de l’Orient à l’Occident, & y avoir resté deux ou trois minutes, revint avec la même rapidité vers l’endroit d’où elle étoit partie ; elle y resta encore l’espace de deux minutes ; après quoi elle fut se placer, en se raprochant de l’Occident, entre deux autres étoiles, dont elle effaçoit la clarté ; elle y demeura dans un mouvement à peu près circulaire plus de quatre minutes. Enfin on la vit se perdre en tournoyant dans le Ciel. Ce Phenoméne n’a pas laissé de troubler toute nôtre Ville. La populace en fait l’application qu’elle a coutume de faire en pareilles occasions ; elle prétend que cette étoile prophetise quelque grand événement ; pour nos scavans ils ont déja perdu plusieurs nuits à tâcher d’en découvrir les causes, ou à examiner s’il n’en paroîtra pas quelque autre. Vous leurs feriez plaisir, Messieurs, de faire part au public de cet événement ;
il se trouvera peut-être quelques Philosophes charitables, qui s’interessant à leur repos, voudront bien par pitié leur ôter le voile épais qu’ils ont devant
les yeux. J’ai l’honneur d’être, Messieurs, &c.
T. D. E.”
1726, Vaire (Doubs). On trouve dans les Archives de la ville de Besançon, Fol. 155, une lettre au sujet d’un météore aperçu du château de Vaire, près Besançon, en 1726.
1731, entre le 3 et le 5 juin, Lessay (Manche). Le père Dom Halley, prieur des Bénédictins de Lessay, près de Coutances, relate que les 3, 4 et 5 juin 1731, une “pluie de feu” s’est abattue à Lessay et aurait tué de nombreux animaux et incendié plusieurs édifices :
“Le ciel était en feu et il tombait comme des gouttes de métal embrasé et fondu.” Sources : Salgues, Traité
des erreurs et préjugés répandus dans la société, Mémoires de l’Académie royale des Sciences, 1731 et Pierre Marie Sébastien Bigot de Morogues, Mémoire historique et physique sur les chutes de pierres tombées sur la surface de la terre à diverses époques, 1812.
***
“Le 4 Juin 1731 à Lessay proche Coutances, après des coups de tonnerre extraordinaires tout le ciel parut en feu depuis l’horison jusqu’au Zénit, on voyoit comme dans un feu d’artifice le jeu d’une infinité de fusées volantes, il tomboit de toutes parts comme des gouttes de métal fondu & embrasé, & le spectacle eut été charmant, sans la violence des coups de tonnerre qui causoient un effroi général ; les édifices en étoient ébranlés quelques maisons furent brûlées, il y eut des bestiaux tués ; cependant la pluie ne fut pas des plus abondantes, & la sécheresse dont on se plaignoit continua toujours.” Source : Histoire de l’Académie, 1731.
***
En 1818, on trouve ce complément dans le Nouveau dictionnaire d’histoire naturelle : “La prétendue chute de
métal, 1731, à Lessay, n’étoit qu’une phosphorescence
électrique des gouttes de pluie ; car Dom Halley ne
dit pas : il tomboit des gouttes de métal embrasé et fondu, mais il tomboit comme des gouttes, etc.”
***
En l’absence d’informations plus précises, il est bien difficile de certifier qu’il s’agisse de météorites… Il
semble plus probable que ce soit un orage et qu’un
phénomène de réfraction sur les gouttes de pluie ait
pu faire penser à des goutelettes de métal en fusion.
1734, Montoire-sur-le-Loir (Loir-et-Cher). On
mentionne dans les registres de baptême de la
paroisse Saint-Laurent de Montoire, au chapitre
« Phénomènes météorologiques » : “temps serein,
bruit sec, roulements tournants”, probablement un météore détonnant.
1737, 18 février, en Seine-Maritime. “Le 18 février 1737, on vit s’élever tout à coup à Rouen et aux environs, un corps lumineux, de la forme d’une étoile et trois fois plus grand qu’une étoile de première grandeur. Il avait une queue comme les comètes, mais autrement configurée ; elle consistait en trois
espèces de serpentaux, qui étaient terminés par autant d’étoiles, moindres que celle qui formait le corps principal. Le feu de ce météore était pâle ; mais la clarté était si grande qu’on aurait pu lire. Le
météore employa plus d’une minute à parcourir une espèce de demi-cercle, du sud au nord. Lorsqu’il fut
prêt à disparaître, et qu’il touchait pour ainsi dire, l’horizon, la lumière devint plus vive, il éclata alors comme une bombe, ce qui fut suivi d’une explosion semblable à celle du plus fort canon, et tout disparut. (Hist. acad., Paris, 1757, page 24, relation de M. Barbier.)” Source : J. C. Peltier, Météorologie : Observations et recherches expérimentales sur les causes qui concourent à la formation des trombes, 1841.
1738, 18 août ou 18 octobre, Carpentras (Vaucluse).
Le 18 octobre 1738, à 16 h 30, M. Dalman, un ingénieur se rendant à Champfort, entend près de Carpentras une explosion qui fait trembler le sol sous ses pas. Deux minutes après, une pluie de pierres s’abat sur l’endroit mais aussi sur la ville de Carpentras. Le récit de Dalman correspond bien aux théories de son époque sur l’origine des roches tombées du ciel, c’est-à-dire à
un phénomène d’origine tectonique. Le doute persiste
quant à l’origine météorique de ce phénomène.
Pierre Marie Sébastien Bigot de Morogues, dans son Mémoire historique et physique sur les chutes de pierres tombées sur la surface de la Terre à diverses époques, relate en quelques lignes le phénomène :
“Castillon publia en 1771, un ouvrage intitulé
Des dernières Révolutions du Globe, dans lequel il rapporte, page 126, que le 18 octobre 1738, à quatre heures et demie de l’après-midi, Dalman, ingénieur, voyageant dans le comté d’Avignon, et allant à Champfort, entendit tout à coup une explosion souterraine, dont le bruit égaloit celui que
pourroient faire cent pièces de canon que l’on tireroit à la fois. La terre trembla sous les pas
de Dalman, et les glands de quelques chênes qui
étoient sur les bords du chemin, tombèrent avec rapidité.
Durant ce phénomène, le ciel étoit très serein. Deux minutes après, il tomba, dans le même endroit, une
pluie de terre et de gravier, comme il en tombe
lorsqu’une mine a joué ; cette secousse et cette
pluie durèrent trois minutes. A Carpentras, l’alarme
fut très vive, mais tout le dommage se réduisit à quelques cheminées abattues. Dans la campagne des
environs, la terre s’entr’ouvrit à plusieurs endroits, et les fentes étoient si profondes, que les perches des laboureurs ne pouvoient aller jusqu’au fond.
Tel fut le récit de Dalman, qui me paroît devoir évidemment se rapporter à une chûte de pierres
et non à un tremblement de terre, d’après les
considérations suivantes :
1° En 1738, époque à laquelle Dalman fut témoin du phénomène qu’il décrit, tous les gens instruits se piquoient de regarder la chute des pierres comme absurde ; il n’est donc pas étonnant que Dalman prévenu par cette manière de voir, ait cherché une
cause qui lui paroissoit naturelle, au phénomène dont
il étoit le témoin ;
2° Il est constant qu’en 1738, aucun volcan n’étoit en activité auprès de Carpentras : et quand un tremblement de terre auroit réellement eu lieu à cette époque près de Carpentras, il n’auroit pas pu produite une pluie de graviers et de petites pierres semblables à celles que rejette une mine, car il est bien vrai que souvent des cendres volcaniques
ont été portées par le vent à une très grande
distance, mais ici ce sont des graviers semblables à ceux qu’enleveroit une mine, qui sont tombés d’en
haut, sans que l’on ait su d’où ils venoient ;
3° Une explosion très violente peut avoir causé l’ébranlement qui effraya les habitants de Carpentras
et que ressentit Dalman, mais si la secousse eût
été forte, il en seroit résulté nécessairement des
accidents plus fâcheux que la chute de quelques cheminées ;
4° La chute de pierres et la prétendue secousse dont il est ici question, ayant eu lieu dans la partie
méridionale de la France, immédiatement après la saison des plus grandes chaleurs, il n’est pas nécessaire de recourir à un tremblement de terre pour expliquer la formation de quelques crevasses dans un sol gras et argileux, où la sécheresse
suffit pour les occasionner ;
5° Ce qui me paroît le plus certain dans ce
phénomène, est donc que le 18 octobre 1738, il
tomba dans les environs de Carpentras et de Champfort, une pluie de pierres peu volumineuses,
mais en très grand nombre, laquelle fut accompagnée d’une explosion très considérable, qui agita assez violemment l’atmosphère pour occasionner la chute
de quelques cheminées, et que le bruit frappa
tellement l’esprit de quelques personnes, que cherchant à expliquer sa cause, elles eurent recours à un tremblement de terre, qui acquéroit d’autant plus de probabilité, que la commotion s’étoit fait ressentir très vivement.”
1740, dans la nuit du 23 au 24 février, Toulon (Var). “La nuit du 23 au 24 Février 1740, on vit vers la rade de Toulon un globe de feu comme violet, qui, s’étant élevé peu-à-peu, plongea ensuite dans la mer, d’où il se releva comme une balle qui réfléchiroit ; après quoi étant parvenu à une certaine hauteur, il creva, & répandit divers globes de feu, dont les uns parurent tomber
dans la mer, & les autres sur les montagnes. Le
bruit qu’il fit en crevant, fut semblable par son éclat à celui du plus gros tonnerre ; mais comme il dura peu, il ressembla davantage à celui d’une bombe. Ce phénomène ne fut point vu, à la vérité, par des Observateurs bien exercés, & d’ailleurs la plupart
eurent grande peur.“ Source : Histoire de l’Académie royale des sciences, 1742.
***
On évoque aussi le fait que certains fragments
tombèrent dans la montagne près de Toulon.
1741, 21 avril, Alès (Gard). “M. l’Abbé de Ribaute, d’Alais, étant à la campagne près de la même Ville, vit à 9 heures trois quarts du soir le 21 Avril 1741 un globe de feu moins lumineux qu’une étoile de la première grandeur, mais plus rouge, & qui n’avoit pas la scintillation des étoiles fixes. Son diamètre parut d’abord égaler celui de la Planete de Mars, vue par une Lunette de 12 pieds ; il augmenta ensuite jusqu’à égaler à peu-près le diamètre de la Lune. Son éclat augmentait en même temps que sa grandeur. Il parut décrire d’Occident en Orient plus de 130 degrés d’un grand cercle de la Sphère, en 35 secondes ou environ laissant derrière soi la trace de son mouvement, marquée par une infinité d’étincelles très-éclatantes, & par des flocons lumineux, qui brilloient successivement & s’éteignoient bientôt. On n’entendit aucun bruit, quand on vit ce globe s’évanouir & disparoître tout-à-coup. Sa trace continua d’être visible environ sept minutes, mais sans être parsemée d’étincelles, elle étoit d’une blancheur jaunâtre & uniforme. Le Ciel étoit extrêmement sérein, & sans doute la clarté de la Lune près du premier quartier, diminua beaucoup la beauté & l’éclat de ce Phénomène. Cette observation fut communiquée par l’Abbé de Ribaute à M. de Sauvages.” Source : Histoire de la Société royale des sciences établie à Montpellier, t. 2, 1778.
vers 1750, Saint-Usage (Côte-d’Or). “La chute d’une
étoile tombante incendia une maison de Saint-Usage,
village près de Saint-Jean-de-Lône.” Source : M.
Michault, Mémoires de l’Académie de Dijon, t. 1,
1769.
1750, 21 et 22 février, Echilleuses (Loiret). “on a vu le vingt un et 22. fevrier en plein midy une etoile fort claire, elle a ete remarquée de tous le environs du pays Pivier, Puiseaux Beaune, Beaumont en ont parlé de meme tous le careme, cest a dire tout le mois de mars s’est passé come le mois de fevrier c’est a dire qu’il a toujours fait / beau / sans pluye sans gelée, sans neige, voila come s’est passé l hiver” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de Corrèze, BMS - 1743 - 1752 - 557 O-SUPPL - GG/7 - vues 93 à 96 / 112 - folios 7 et 8 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1750, 4 novembre, dans le Berry. “Le 4 novembre
1750, à trois heures vingt-cinq minutes de l’après-midi,
le soleil étant chaud et brillant, on aperçut dans le
Berri une grosse boule de feu, accompagnée d‘une
longue queue aussi enflammée, dont on n’apercevait
pas l’extrémité. Ce météore était placé entre le nord
et l’est. Il y resta quelques secondes, suspendu à
vingt-cinq pieds environ au-dessus de l’horizon. Bientôt
il en sortit une longue trace de fumée blanche et épaisse
qui s’éleva dans l’air ; un moment après on entendit deux explosions aussi fortes que deux coups de canon,
et le météore disparut. Ce phénomène ne causa aucun
dérangement dans l’atmosphère, et le ciel conserva une sérénité parfaite pendant toute la journée.” Source : Manuel de météorologie par J.-B. Fellens, 1833.
1750, 5 novembre, Cayenne (Guyane). “Le P. Beraud
rapporte aussi l’observation d’un phénomene singulier arrivé à Cayenne, dont il a eu une relation bien
détaillée que nous abrégerons.
Le cinquième Novembre 1750, à deux heures environ après minuit, le Ciel étant très-clair, serein & sans nuages, on vit dans toutes les parties de cette Colonie, du côté du couchant, une lumiere si éclatante & si étendue, lorsqu’elle fut montée au zénith, qu’on pouvoit à sa faveur lire aisément, l’on en sur effrayé. Après la durée d’un gros quart d’heure, il en sortoit des feux comme des gerbes de fusées; elle se divisa en trois parties, dont la plus basse étoit très-noire : alors on entendit un bruit semblable à celui d’un coup de
canon de dix huit livres de balles ; il se répéta jusqu’à cinq fois, & dans leur intervalle c’étoit un fracas tel
que celui du tonnerre qui gronde; enfin tout se
dissipa, & une odeur très-forte de bithume se répandit dans le pays.” Source : Mercure de France, septembre 1753.
1751, Libourne (Gironde). On peut lire dans Souffrain, Histoire de Libourne, t. IV, p. 422. : “Au mois de juin, il tomba à Libourne, par un temps serein, disent les mémoires du tems, une pluie de petites pierres noires.”
1752, en été, Nîmes (Gard). “Dans l’été 1752, M. le Chevallier de Lorenzi étant à Nîmes, vit aussi en plein jour & par un très-beau tems, un globe de feu qui creva avec une explosion semblable à celle d’une grenade.” Source : Journal des sçavans, octobre 1771.
1752, 12 juillet, Yves (Charente-Maritime). “Dans une
métairie dépendante de la paroisse d’Yves près
Rochefort, on en voit une qui est toute à la fois
naturelle & artificielle ; ce n’est pas un çeraunias
tels que les cabinets des curieux en peuvent
contenir ; c’est une vraie pierre de tonnerre, plus
proprement dite que celle qui en porte le nom,
puisqu’elle est l’effet & le résultat de la foudre, qui
tomba le 12 Juillet 1752, sur un amas de foin
d’environ trente charretées. Au bruit de sa chute
succédèrent bientôt des vapeurs noires & malignes, qui exhalées de toute part par la masse embrasée, infectèrent l’air de leur odeur. Pendant deux jours entiers que dura l’embrasement, l’on n’entrevit au travers d’une fumée des plus épaisses que de légères
étincelles ; tout fut la victime d’un feu sourd & caché,
qui, en consumant le foin, calcina les cailloux &
fondit la glaise terre à un demi pied de profondeur.
Le feu s’alluma bientôt dans la partie orientale de
la meule ou [meulon] de foin ; il s’insinua ensuite
dans toute la masse, & sans en déranger la
forme extérieure, il brûla en différentes directions,
comme s’il eût suivi autant de traînées de poudre,
placées en différent sens, ou qu’il eût été forcé
d’entrer dans les canaux d’une mine, d’où il sortoit de temps en temps, & faisoit des crévasses ou éruptions
à la surface qui n’imitoient pas mal des fougades.
De ce volume prodigieux, il resta deux millons
pesant ou environ, d’une matière qui, participant
tantôt de la nature du soufre & du bitume, tantôt
de celle de la pierre, forma une masse solide,
dont l’histoire ne nous fournit point d’exemples ;
semblable aux métaux dans leur ébullition, on lui a
vu couserver sa liquidité, tant que la chaleur a
subsisté dans toutes ses parties, & dégénérer ensuite lorsque la coagulation fut faite, en un monceau aussi énorme que bisarre, de scories, ou de
véritables marcassites. Trois natures différentes
composoient ce nouveau mixte ; la partie supérieure
forma un amas brillant de concrétions crystallines ;
la moyenne, un mélange varié de soufre & de
terre, différemment colorée ; l’inférieure, un corps
massif & bitumineux, assez approchant du charbon
de terre mais plus luisant ; toute la masse étoit divisée
en plusieurs couches, ou espèces de gâteaux indépendans & isolés, tous différens dans leurs nuances, d’un pouce & demi d’épaisseur, sur quinze à vingt pouces de large. Dans les cavités ou grands yeux, qui se formerent pendant la plus violente fermentation, on apperçût çà & la quelques brins de foin sans altération, & quelques-uns sous la forme de lames noires, mais sans aucune consistance ;
enfin toute la masse étoit percée d’une multitude
infinie de petits trous, plus rapprochés dans le fond
que vers le haut de cette pierre singuliere ; la
Chymie en a tiré un sel qui a la propriété des alkalis.”
Source : P. J. Buc’hoz, “Dictionnaire minéralogique et hydraulogique”, 1785.
1753, 4 novembre, Yvoy-le-Marron (Loir-et-Cher).
“Le 4 Novembre 1753, sur les trois heures vingt-cinq minutes après-midi, le soleil étant chaud & brillant, on apperçut à Yvoi en Berry, terre appartenante a M. le Marquis de Putanges, une grosse boule de feu, accompagnée d’une longue queue de même
matière, dont on ne voyoit point la fin. Le météore étoit placé entre le nord & le levant. Il y demeura suspendu
à environ vingt pieds de terre, pendant quelques secondes, après quoi il parut une grosse fumée blanche qui s’éleva en l’air, & un moment après, on entendit comme deux coups de canon. Ce feu ne
causa aucun dommage, & le tems resta fort clair le
reste de la journée.” Source : Nouvelle centurie de l’histoire de l’Académie des Sciences, tome 4, 1753.
1753, 4 décembre, Lapalisse (Allier). “Mr. Ribaud,
Curé de Saint-Chriftophe près la Palice en
Bourbonnois, envoyé à Mr. l’Abbé Nollet la relation
d’un autre phénomène du même genre. Le 4 Décembre
1753, sur les 3 heures après midi, le Soleil étant très-
beau, on vit paraître près de l’horizon un météore en
forme de fusée-volante, qui fembloit avoir 5 pouces de
diamètre sur un pied de longueur; elle paroissoit aller d’orient en occident d’une marche uniforme & directe :
après avoir couru pendant un certain temps, elle se réduisit en étincelles qui formèrent comme une très-belle plaque d’or. Des Bergers assurèrent depuis à Mr. Ribaud qu’ils l’avoient vûe tomber dans un étang à 300 pas de-là. Le chemin qu’elle avoit parcouru en l’air demeura marqué pendant 4 ou 5 minutes, par une trace de fumée noirâtre qui se dissipa ensuite. A cette apparition succéda lentement un bruit sourd, & cependant assez fort, plus femblable à celui qui accompagne ordinairement les tremblemens de terre, qu’à celui du tonnere : la fin de la journée fut très-belle.” Source : Nouvelle centurie de l’histoire de l’Académie des Sciences, tome 4, 1753.
1756, 3 mars, Grasse (Alpes-Maritimes) et à Avignon (Vaucluse). “M. l’Abbé de Pugnaire, Grand-Vicaire
du diocèse de Grasse, a mandé que le 3 mars 1756, environ à six heures & demie du soir, il parut vers le levant d’été un globe de feu hérissé de quelques
pointes ou rayons, il s’étendit d’abord comme un
cylindre qui paroissoit de dix à douze pouces de
largeur sur deux toises ou environ de longueur. En
cet état, il parcourut en trois minutes une grande partie de l’horizon en décrivant à la vûe une parabole, & finit en se divisant en plusieurs globules de feu à peu-près semblables aux étoiles d’une fusée volante. Cette séparation se fit avec un bruit qui approchoit des roulemens du tonnerre après son éclat. La route du phénomène étoit du levant au nord, & il donnoit une lumière aussi brillante que celle d’un beau jour.”
Source : Histoire de l’Académie royale des sciences, 1756, pp. 23-24.
***
Dans le Journal encyclopédique du 1er avril 1756 :
“Le 3. Mars à 6. heures du soir, le tems étant très-
calme, & la Lune en son couchant, d’ayant qu’une
foible lueur, on apperçut à Avignon dans la moyenne
Région de l’air vers le Sud, un Globe aussi lumineux
que la Lune en son plein. Ce Globe, trois secondes
après, s’est transformé en une espéce de Cométe, dont
la queuë s’étendoit vers l’Ouest, & s’est perduë en
forme de fusée volante, nuancée de diverses couleurs,
ainsi que l’Arc en Ciel ; la fusée s’est terminée en
trois pointes, de chacune desquelles il est sorti une
étoile pareille à celles qu’on imite dans les feux
d’artifice. On a vû à Cannes & à Nice au même moment,
un pareil Phénoméne ; ce Météore, à la vérité, avoit
un plus grand volume, & la fusée qui le terminoit a
donné quatre étoiles de couleur de souffre, & il a été
accompagné d’un violens coup de tonnerre.”
***
On peut lire dans la Gazette du 1er Juillet 1756
une description du même phénomène : “On mande d’Avignon, que le 3 à six heures du soir, le tems étant très-calme, & la Lune en son couchant ne donnait qu’une faible lueur, on apperçut vers le Sud-Est, dans la moyenne région de l’air, un Globe aussi lumineux que la Lune en son plein. Environ trois secondes après, ce Globe se transforma en une espèce de Comete, dont la queue s’étendoit vers l’Ouest. Ce Météore ne tarda pas
à se perdre en forme de fusée volante, nuancée de
diverses couleurs ainsi que l’Arc-en-Ciel. La fusée se termina en trois pointes, de chacune desquelles il
sortit une étoile pareille à celles qu’on imite dans les feux d’artifice. Selon les avis reçus de Cannes & de
Nice, on y a vû le même jour & à la même heure un
semblable phénomene. Dans ces deux dernieres Villes,
il a paru sous un beaucoup plus grand volume que
dans celle d’Avignon. A Nice, la fusée fut terminée
par quatre étoiles de couleur de soufre. Elle fut suivie
de deux violens coups de tonnerre.”
***
1756, Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Le dictionnaire des merveilles de la nature (t. 2) en 1781 indique : “En 1756, il y en eut un qui éclata au-dessus de la ville d’Aix en Provence, en faisant un bruit épouvantable. La commotion qu’il excita dans l’air fut si forte, & ébranla tellement les maisons, que plusieurs cheminées tombèrent de la secousse. Les Habitans alarmés, prirent aussi ce fracas pour l’effet d’un tremblement de terre : mais dès le lendemain, ils furent détrompés & rassurés par les Habitans de la campagne, qui avoient vu le globe descendre du ciel, & éclater sur la Ville. On voit souvent, à la vérité, des feux dans les tremblemens de terre, mais ils ont la forme de flammes légères. Ils voltigent & rampent sur le terrain, & ne ressemblent en rien au phénomène dont il s’agit ici.”
***
“En 1756, un globe de cette espèce éclata au dessus de la ville d’Aix en Provence ; la commotion fut si forte, que la plupart des maisons en ayant éte ébranlées, les cheminées tomberent de la secousse. Les habitans épouvantés attribuèrent cet effet à un tremblement de terre ; mais dès le lendemain ils furent détrompés & raffinés par des gens de la campagne qui avoient vu le globe descendre du ciel & éclater au-dessus de la ville.” Source : Mercure de France, janvier 1772.
1757, 18 février, Rouen, Mont-Saint-Aignan,
Maromme, Déville-lès-Rouen (Seine-Maritime).
“Le 18 Février de cette année, on vit s’élever tout-à-
coup à Rouen & aux environs, au Mont-aux-malades, à Saint-Aignan, à Maromme, à Deville, &c. un corps lumineux de la forme dune étoile, & trois fois plus gros que celles de la première grandeur. II avoit une queue comme les comètes, mais autrement configurée ; elle consistoit dans trois espèces de serpentaux, qui étoient terminés par autant d’étoiles moindres que celle qui formoit le corps principal. Le feu de ce météore étoit
pale ; mais sa clarté étoit si grande, qu’on auroit bien pu y lire, selon M. Barbier, de qui nous tenons cette
observation ; le météore employa plus d’une minute
à parcourir une espèce de demi-cercle du sud au
nord. Lorsqu’il fut prêt à disparoître, & qu’il touchoit, pour ainsi dire, l’horizon, la lumière devint plus vive ;
il éclata alors comme une bombe, ce qui fut suivi
d’une explosion semblable à celle du plus fort canon, & tout disparut.” Source : Histoire de l’Académie
royale des sciences, 1757.
1759, 13 juin, Captieux et Bazas (Gironde). On trouve dans l’Histoire de l’Académie Royale des Sciences, paru en 1759, le premier récit sur cet événement probablement climatique : “Le 13 juin de cette année, vers les neuf heures du soir le ciel étant clair & serein, avec un vent frais qui venoit du nord, le Curé du village de Captieux (à deux lieues de Bazas) aperçut en l’air une colonne de feu qui sembloit se diriger du levant au midi mais bientôt des bois lui en dérobèrent la vue. Cependant étant rentré chez lui, à peine fut-il couché qu’il entendit crier au feu ; son frère courut promptement à l’écurie, où l’incendie paroissoit ; les flammes la remplissoient déjà de toutes parts, ayant disparu aussi promptement, il vit quatre chevaux qui venoient d’être tués, sans aucune marque de brûlure, & que tout le fumier avoit été consumé par le feu enfin il sentit une odeur de soufre si forte, qu’elle pensa l’étouffer ;
on eut beaucoup de peine à le faire revenir. Cependant le plancher supérieur de cette écurie n’étoit point
enflammé on n’y trouva que deux trous de trois ou
quatre pouces de diamètre ; mais toute la charpente
du toit étoit embrasée & il fallut l’abattre pour sauver
la maison. Une heure après il parut une autre colonne
de feu qui alla se jeter dans la petite rivière de la
Gainère, & qui en tombant éclata avec plus de force
qu’un coup de tonnerre. Ce qu’il y a de vraiment
singulier, c’est que pendant tout ce fracas le ciel étoit clair & sans nuages, comme nous l’avons dit, & que la nuit étoit très-belle.”
***
Dans le même tome de l’Histoire de l’Académie Royale des Sciences, on peut également que le même jour que le phénomène de Captieux, un autre événement du même ordre eut lieu à Bazas (Gironde), commune distante d’une quinzaine de kilomètres : ”M. l’Evêque de Bazas, qui rapporte ce fait dans une lettre qui fut communiquée à l’Abbé Nollet, de qui nous le tenons, ajoute que le même jour il avoit vu au nord de Bazas,
à l’extrémité de l’horison, un feu semblable, qu’on
croyoit avoir embrasé une maison à S. Peyé de
Langon, qui fut brûlée cette même nuit, sans qu’on
pût découvrir par où le feu avoit pris.”
***
En 1854, P. Foissac, dans son ouvrage “De la météorologie dans ses rapports avec la science de
l’homme” relate le cas d’une météorite tombée sur
une grange à Captieux, qui est à rapprocher du
récit précédent : “Un mendiant qui avait cherché
refuge dans le bâtiment fut accusé d’y avoir mis le feu
et faillit être condamné. L’abbé Nollet, qui se trouvait
en ce moment à Bordeaux, frappé des dénégations
et de l’apparence de sincérité chez ce malheureux,
fit une enquête minutieuse, et découvrit enfin
l’aérolithe parmi les décombres de la grange. Eclairée
par le mémoire que rédigea ce physicien célèbre, la chambre criminelle de Bordeaux renvoya le mendiant.”
***
Un autre récit nous est donné : “On ne connaît guère que trois exemples d’incendies allumés par des
bolides. Le premier date du 13 juin 1759. Dans sa chute, le météore incendia une grange où un
mendiant était venu se réfugier. Le malheureux fut
arrêté comme auteur du fait et conduit à Bordeaux.
Malgré ses dénégations, malgré les explications
qu’il fournit (et surtout peut-être à cause de ces
explications mêmes), il allait être puni du dernier
supplice, quand l’abbé Nollet, dont la réputation de physicien était alors européenne, lui vint en aide. Nollet, frappé des réponses du mendiant, se rendit sur le théâtre de l’événement (Captieux, près
de Bazad) et retrouva l’aérolithe dans les décombres
de la grange. Le parlement de Bordeaux renvoya le mendiant.” Sources : Le Muséum des sciences et des arts, choix de traités instructifs sur les sciences physiques et leurs applications aux usages de la vie, tome 2, 1857. Petŭr Beron, “Panépistème, ou sciences physiques et naturelles et sciences métaphysiques
et morales”, 1861.
1761, 12 novembre, dans toute la moitié nord de la
France, à Genève (Suisse) et dans les Flandres, et
relation d’un incendie à Chamblanc (Côte d’Or). On relate qu’un météore, après avoir été observé entre Genève et a Belgique, incendia une maison à Chamblanc. Il y a tout lieu de penser que les deux phénomènes n’ont pas de lien logique.
***
La Gazette du 5 décembre 1761 relate ceci : “Des lettres de Dijon font mention d’un phénomene effrayant. Le 12, vers cinq heures du matin, il se format autour de la
Lune un nuage, qui paroissoit avoir environ cinquante pieds de circonférence, & d’où il sortit subitement un
feu si vif & d’un volume si considérable, que la plûpart des spectateurs, ne pouvant en soutenir l’éclat, se jetterent le visage contre terre. Cette espece d’embrasement du ciel dura quelques minutes. Il fut suivi d’un bruit semblable à celui de plusieurs canons de batterie, qui tireroient en même temps. La commotion de l’air fut si forte, qu’elle fit trembler les fenêtres & les portes de toutes les maisons. Il n’est
pas inutile d’observer que c’est aussi pendant la nuit du 12, qu’ont été apperçus à Dorne & à Genêve les météores, dont il a été parlé dans la derniere Gazette.”
***
“Des lettres de Dijon font mention d’un Phénomène effrayant.Le 12 du mois dernier, vers 5 heures du matin, il se forma autour de la Lune un nuage, qui paroissoit avoir environ 50 pieds de circonférences, & d’où il sortit subitement un feu si vif & d’un volume si considérable, que la plupart des spectateurs, ne pouvant en soutenir l’éclat, se jetterent le visage contre terre. Cette espèce d’embrasement du Ciel dura quelques minutes. Il fut suivi d’un bruit semblable à celui de plusieurs canons de batterie, qui tireraient en même temps. La commotion de l’air fut si forte, qu’elle fit trembler les fenêtres & les portes de toutes les maisons.
Le même jour, à deux heures & demie du matin, on avoit vû en l’air, à Genève, un globe considérable de feu, qui peu après se changea en une longue traînée de lumière, & qui se dissipa ensuite avec une explosion assez forte. Pendant l’apparition de ce Météore, on sentit une légère secousse de tremblement de terre, accompagnée de bruits lourds. La lumière qu’il jette, étoit si éclatante, que lorsqu’il disparut, les personnes qui 1’avoient observé, crurent être dans les plus profondes ténèbres, quoique le Ciel fût très serein, & que la Lune eût encore plusieurs heures à rester sur l’horison ; il n’y a eu que des gens de la Campagne et les Sentinelles de la Ville qui aient été témoins de ce Phénomène. Ainsi l’on ne peut déterminer avec certitude quelle élévation il a paru, & l’on sait seulement que sa direction étoit Sud à l’Ouest. Le même jour aussi & vers la même heure, deux Habitans du Bourg de Dôme, près de Moulins en Bourbonnois, aperçurent un pareil météore, qui tomba du Ciel, & qui, lorsqu’il approcha de terre, leur parut être du volume & de la forme d’une paille enflammée.
Le Météore enflammé, vû à Genève & à Dijon, a été aperçu la même nuit & vers la même heure, non-seulement à Paris par l’Abbé de la Caille, de l’Académie Royale des Sciences, & dans les environs de Vernon par quelques gens de la Campagne, mais encore à Ham dans la Picardie (un degré au Nord de Paris), en même-temps qu’il a été observé a Ville-Franche en Beaujolois par le Baron des Adrets, dont l’observation a été communiquée à l’Académie des Sciences par le Cardinal de Luynes. La distance des lieux, où l’on a remarqué ce Phénomène, prouve qu’il étoit fort au-dessus de la hauteur ordinaire des nuages.” Source : Mercure de France, janvier 1762.
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Dans la Gazette du 12 décembre 1761 : “Le météore enflammé, vû à Genêve & à Dijon le 12 du mois dernier, & dont nous avons fait mention, a été apperçu la même nuit, & vers la même heure, non-seulement à Paris par l’Abbé de la Caille, de l’Académie Royale des Sciences, & dans les environs de Vernon par quelques gens de la campagne, mais encore à Ham dans la Picardie, (un degré au Nord de Paris), en même temps qu’il a été observé à Villefranche en Beaujolois par le Baron des Adrets, dont l’observation a été communiquée à l’Académie des Sciences par le Cardinal de Luynes. La distance des lieux, où l’on a remarqué ce phénomene, prouve qu’il étoit fort au-dessus de la hauteur ordinaire des nuages.”
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Les Mémoires de l’Académie de Dijon, tome 1er, en 1769, relatent le phénomène et en particulier le travail fait par M. Michault : “Histoire d’un Météore igné, observé en cette Province la nuit du 11 au 12 Novembre 1761.
Ce fut à quatre heures trois quarts du matin environ, que ce météore fut apperçu. La plupart de ceux qui en furent les spectateurs, étoient des Habitans de la campagne ; gens dont l’imagination facile à s’égarer, & avides de merveilleux, avoit en quelque forte fasciné les yeux, & consëquemment peu capables de rendre un compte satisfaifant de ce qu’ils avaient vu. D’ailleurs la diversité des points d’où ce phénomène a été observé, a dû nécesairememt apporter de la variété dans les descriptions. M. Michault qui a donné l’histoire de ce phénomène a eu beaucoup de peine à les concilier. Pour y réussir il les a comparées les unes aux autres, & écartant les détails suspects, il est parvenu à en présenter une qui paroît mériter beaucoup de confiance.
La nuit étoit belle & le ciel fort serein on n’appercevoit qu’un très-petit nuage & si petit, que la plupart des spectateurs n’en ont pas fait mention. Tout-à-coup parut à une très-grande hauteur un globe de feu dont le diamètre sembloit égaler celui de la pleine lune au moment de son lever. Ce globe qui étoit d’un rouge bien foncé, courant de l’ouest au sud, parcourut avec beaucoup de rapidité un fort grand espace, laissant sur son passage une trace très-lumineuse & répandant la clarté la plus vive. A la fin de sa course il se fit une explosion qui lança de toutes parts des traits enflammés, fut accompagnée d’un bruit semblable à celui qu’auroient produit vingt coups de canons tirés en même temps, & suivie d’un roulement continu beaucoup plus bruyant que ne l’est celui du tonnerre le plus effrayant(1) : ce roulement dura plusieurs secondes & il y eut une commotion si grande, que plusieurs personnes que le bruit avoit éveillées crurent qu’il y avoit eu un tremblement de terre.
A l’explosion de ce globe enflammé succéda une obscurité si grande que les voyageurs furent obligés de s’arrêter pendant quelques fécondes. Il tomba de grosses gouttes de pluie & l’obscurité s’étant dissipée le ciel reparut aussi serein qu’avant l’inflammation du météore ; Pour expliquer ce phénomène M. Michault a recours à l’inflammation des vapeurs sulphureuses répandues dans l’athmosphere & à laquelle on attribue ordinairement ces petits météores ignés qu’on nomme étoiles tombantes. L’obscurité qui suivit son extinction, lui paroît une illusion du sens de la vue & l’effet du prodigieux refferrement de la pupille occasionné par la vivacité de la lumière que ce globe enflammé avoit répandue dans le temps de son ignition. La pluie qui tomba à la suite de l’explosion n’est à ce qu’il pense que l’effet de la raréfaction prodigieuse & de la commotion de l’air qui ont déterminé la chute précipitée des molécules aqueuses soutenues dans l’athmosphere. Il n’est pas si facile de rendre raison de l’explosion de ce globe, toutes les étoiles errantes s’éteignent sans en faire aucune. Celle de la foudre est probablement occasionnée par la rencontre des différents courants électriques qui partent des nuées ; mais ici à peine y avoit il un petit nuage. M. Michault n’ose hazarder à ce sujet quelque conjecture, & se contente de déterminer, autant qu’il est possible le point de l’athmosphere ou s’est enflammé ce météore & où il a fait son explosion. A en juger par l’étendue de pays où ce phénomène a été observé, il faut qu’il ait été très élevé dans les régions aériennes puisqu’il a été apperçu en même temps en des lieux très-éloignés tels que la Suisse & la Flandre ;
les circonstances de son apparition autorisent M. Michault à croire qu’il s’est enflammé dans la partie de l’athmosphere qui correspond au point de la Bourgogne où se trouvent Dijon, Auxonne, Seurre, &c. que même l’explosion s’est faite à peu de distance de cette derniere Ville. On voit en effet que le bruit terrible dont l’explosion a été accompagnée n’a été vivement entendu que dans les Villes désignées & leurs environs, qu’à proportion de l’éloignement, ce bruit a paru plus ou moins foible & même a cessé d’être sensible.
Quant au point ou l’explosion s’est faite ce qui engage M. Michault à le supposer peu éloigné de Seurre, c’est un incendie arrivé à Chamblan, village situé à demi-lieue de cette Ville. Le propriétaire de la maison qui fut brûlée raconte qu’il vit la lune se partager en deux, & qu’une des deux portions vint fondre sur sa maison, &
y mit le feu. Ce qu’il y a de certain, c’est que l’incendie
se manifesta immédiatement après l’explosion & mettant à part l’idée ridicule de la division de la lune, on trouve dans ce récit, de quoi soupçonner
que l’explosion s’est faite à peu de distance de Seurre. Cette portion de la lune dont parle ce paysan, n’étoit
peut-être autre chose qu’une flammèche détachée du globe enflammé, & lancée sur la maison. Un pareil
événement n’est pas sans exemple en cette Province.
La chute d’une étoile tombante incendia, il y a une
vingtaine d’années, une maison de Saint-Usage, village près Saint-Jean-de-Lône. Quelque vraissemblables
que soient cependant les conjectures de M. Michault
sur le point où le météore dont il fait l’histoire s’est enflammé, cet Académicien ne se dissimule pas les
objections qu’on peut lui faire en partant des observations de Valenciennes & des environs de Senlis. Dans ces différents endroits on a non seulement apperçu le globe enflammé, on y a vu encore une explosion, & l’on y a entendu le bruit de la détonnation. Ce bruit, il est vrai, a été infiniment moins considérable que celui qu’on a observé en ce pays-ci. Mais comme il n’a pas été sensible à Auxerre & à Nancy, Villes placées à notre égard entre le Valois & la Flandre, & beaucoup plus rapprochées de Dijon, il paroît qu’on seroit en droit d’en conclure que les météores de Senlis & de Valenciennes sont différents de celui que M. Michault a décrit. Mais en supposant
que cela soit, on ne verra pas sans étonnement que plusieurs météores de cette espèce se soient allumés dans le même temps. Quelque surprenant que cela paroisse, il est cependant certain qu’il n’y a rien d’impossible dans cette simultanétité de phénomènes, & le fait raconté par M. Michault n’en est pas moins intéressant pour l’Histoire physique.
(1) Musschenbroeck dans son essai de physique cite, pag. 831 & suivantes, § 1694 & suivants, des phénomènes très ressemblants à celui-ci sur-tout celui que Balbus vit à Boulogne en 1719 & que Montanarius observa dans la même Ville en 1676.”
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Le Dictionnaire des merveilles de la nature (t. 2), 1781 ajoute : “Le 12 Novembre 1761, M. le Baron des Adrets faisant route au nord, vit à une lieue de Villefranche
en Beaujolois, un globe de feu éclatant, dont le disque étoit double de celui de la lune, qui entroit ce jour-là dans son plein. Ce globe sembloit se précipiter rapidement vers la terre, & grossir à mesure qu’il en approchoit. Il laissoit après lui une grosse traînée de feu qui marquoit sa route. Après que ce globe eut parcouru à-peu-près la huitième partie de l’horison, en tirant vers le nord-ouest, il parut de la grosseur d’un très-gros tonneau, coupé horifontalement par sa moitié, tenant par le côté à cette traînée de lumière dont nous avons parlé, & qui subsistoit encore en son entier, Alors le demi-tonneau se renversa, & il en sortit une quantité prodigieuse d’étincelles & de flammèches, semblables en forme & en couleur aux plus grottes de celles qu’on voit dans les globes des feux d’artifices, & le tout se passa sans que M. le Baron des Adrets eût entendu le moindre bruit, pendant environ une minute que dura le phénomène. Il n’en entendit parler ni à Châlons, ni
dans aucune des postes intermédiaires entre Villefranche & Beaune ; mais, dans cette dernière ville, on lui en parla avec le plus grand effroi. La clarté y avoit paru égale à celle du jour en plein midi, & l’explosion avoit été accompagnée d’un bruit affreux, qui avoit fait trembler toutes les maisons. Il paroît, par la relation de M. des Adrets, que le plus grand effet a été près de Dijon, & un peu sur la gauche. Le bruit ne s’est point entendu au-delà de dix à douze lieues à la ronde. Il est tombé du feu dans plusieurs villages, mais rien n’a été enflammé. Dans plusieurs endroits, on prit ce feu pour un éclair ; mais du côté de Vermanton, où le ciel étoit serein, ils le nommèrent muid de feu. Il en étoit tombé beaucoup de ce côté. Ce même phénomène fut apperçu à Paris par M. de la Caille. M. de la Condamine
assura, dans le tems, l’avoir observé à Ham. Il falloit qu’il fût bien élevé pour être vu dans le même tems de deux endroits aussi éloignés que Villefranche & Ham.”
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“Nous croyons faire plaisir à nos lecteurs en leur donnant la relation, d‘un phénomène extraordinaire vu en Bourgogne, envoyée à l’académie des sciences. Le 12 de ce mois, à quatre heures un quart du matin, il a été vu à une lieu de Villefranche vers le Nord. Le temps étoit clair, & la lune pleine avoit encore deux heures à rester sur l’horison. Tout-à coup la lumière a augmenté au point que l’horison s’est trouvé aussi éclairé qu’en plein midi & la lumière étoit plus vive à mesure qu’elle approchoit de la lune. Cet astre disparut & on vit à sa place un globe éclatant dont le disque étoit double de celui de la lune ; ce globe se précipitoit vers la terre avec une vîtesse incroyable & grossissoit à mesure qu’il en approchoit ; il laissoie après lui une traînée de lumière ou de feu permanent qui paroissoit avoir dix pouces de diamètre. Apres que ce globe eut parcouru à-peu-près la huitième partie de l’horison vers le Nord-Est, sa grosseur étoit comme celle d’un tonneau coupé par la moitié, alors il se renversa par le côté qui renoit à l’arc de feu ; il en sortit une nape prodigieuse d’étincelles semblables en couleur & en forme à celles qu’on voit dans les gerbes d’artifice & tout disparut, & la lune qui avoit été cachée par l’interposition du globe ou enveloppée dans la grande lumière, reparut. Par les informations qui ont été prises dans les différents lieux où ce phénomène a été vu, il est constaté que le centre de l’effet a été aux environs de Dijon & sur la gauche, d’où il s’est étendu à dix lieues en tous sens. Dans un village à deux lieues de Vitteaux & quelques villages voisins, il est tombé du feu qui n’a rien enflammé, ce feu croit parfaitement blanc ; un bruit épouventable a été entendu depuis Beaune jusqu’a Vitteaux, ce qui fait vingt grandes lieues ; la clarté a été vue beaucoup plus loin, jusques près Auxerre, elle a pu meme être visible jusqu’à Lyon. Depuis Beaune jusqu’a Vitteaux, le temps n’étant pas serein, les habitants n’ont point vu le feu du phénomène, ils n’ont vu que la clarté suivie de l’affreux bruit du tonnerre, & l’ont appellé l’éclair. Depuis Vitteaux jusqu’à Vermanton, les Habitants l’ont appellé mine de feu, ils ont cru voir tomber la lune & arriver la fin du monde. A Viller, près de Joigny, le feu est entré dans une maison, mais sans rien brûler. Ce phénomène étonnant s’est élevé, a crevé & s’est dissipé très-promptement ; sa durée n’a été que d’environ une bonne minute, il croit, à ce qu’on peut juger, à la triple élévation d’une grosse fusée volante.” Source : l’Avantcoureur du 7 décembre 1761.
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“On mande de Genêve, que le 12, à deux heures & demie du matin, on vit en l’air un globe considérable de feu, qui peu après se changea en une longue traînée de lumiere, & qui se dissipa ensuite avec une explosion assez forte. Pendant l’apparition de ce météore, on sentit une légere secousse de tremblement de terre, accompagnée de bruits sourds. La lumiere, qu’il jetta, étoit si éclatante, que, lorsqu’il disparut, les personnes, qui l’avoient observé, crurent être dans les plus profondes ténébres, quoique le ciel fût très-serein, & que la Lune eût encore plusieurs heures à rester sur l’horizon. Il n’y a eu que des gens de la campagne, & les sentinelles de la Ville, qui ayent été témoins de ce phénomene. Ainsi, l’on ne peut déterminer avec certitude, à quelle élévation il a paru, & l’on sçait seulement que sa direction étoit du Sud à l’Ouest. Le même jour, & vers la même heure, deux habitants du Bourg de Dorne, près de Moulins en Bourbonnois, apperçurent un pareil météore, qui tomba du
ciel, & qui, lorsqu’il approcha de terre, leur parut être du volume & de la forme d’une gerbe de paille enflammée.” Source : la Gazette du 28 novembre 1761.
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On évoque également ce météore dans l’Histoire de l’Académie royale des sciences, t. 2, 1762 : “Observations Botanico - Météorologiques, faites
au château de Denainvilliers proche Pithiviers, en
Gâtinois, pendant l’année 1761. Le 12 par un beau temps, vent sud-ouest, le baromètre étant a 27P 4l on a
vu la nuit, après une grande clarté, un globe rouge,
autour duquel il y avoit un cercle comme un halo, d’où
il est parti une traînée de feu éclatante, sans bruit
ni explosion ; le même météore a été vu à Genève &
auprès de Moulins en Bourbonnois.”
1763, 29 avril, Paris ou à Nancy (Meurthe-et-Moselle). “De Paris, le 2 mai 1763. Le sieur Messier, habile Astronome, observant à l’Observatoire Royal de la Marine, à l’Hôtel de Clugny, le 29 avril, à une heure quarante-huit minutes du matin, a apperçu un globe de feu à la hauteur d’environ douze degrés sur l’horison & à l’Orient de Paris, traînant une longue queue lumineuse comme le sillon que trace en l’air une fusée volante : son diamètre apparent étoit environ le tiers de celui de la Lune, & la couleur étoit d’un rouge vif. La Lune, qui étoit alors sur l’horizon, effaçoit une grande partie de la lumière de ce météore qui dans une nuit obscure auroit répandu une lumière considérable dans l’atmosphere. Ce globe parut tomber presque perpendiculairement, en employant dans sa chute jusqu’à l’horison environ quatorze secondes de temps. Le Ciel étoit pour lors presque totalement couvert, le vent au Sud-Ouest, & le Baromètre étoit à la hauteur de vingt-sept pouces six lignes.” Source : La Gazette du 2 mai 1763.
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“On écrit de Nanci que le 29 Avril, vers une heure & demie du matin, on y a observé le même globe de feu que le sieur Messier a observé à Paris le même jour & à la même heure. Ce globe n’a été apperçu qu’un instant à l’ouest de Nanci, fort près de l’horison, & trainant une queue brillante qui auroit jetté une lumiere très-
considérable si elle n’avoit été effacée par celle de la Lune.” Source : La Gazette du 13 mai 1763.
1765, 20 octobre. Château-Chinon (Nièvre), Luzy (Nièvre), Moulins (Allier). “Suivant une lettre de Moulins, le 20 du mois dernier, à six heures & demie du soir, on apperçut dans l’air, auprès de la Ville de Luzy, un globe de feu d’environ six pieds de diametre, qui jettoit des flammes très-vives dont tout l’horizon étoit éclairé : il passa pardessus l’Eglise Paroissiale de Luzy prenant la direction du Midi au Nord : lorsqu’il eut ainsi traversé la Ville, il s’éteignit &
en même temps on entendit en l’air un bruit semblable à celui de cinq coups de canon tirés de suite : cette explosion fut immédiatement suivie d’un
bourdonnement tel qu’on en entend dans un
grand orage, & qui dura environ quatre minutes.
Le temps étoit alors très serein.” Source : La Gazette
du 18 novembre 1765.
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Le dictionnaire des merveilles de la nature (t. 2), en 1781, donne quelques éléments complémentaires : ”On écrivit de Nevers, en 1765, que le 20 Octobre de cette année, on vit à six heures & quarante minutes du soir, à S. Léger de Fougeret, entre Château-Chinon & Moulins, un globe de feu très-élevé & de la grosseur d’un tonneau, qui éclairoit au loin tous les environs, & répandoit en même-tems une chaleur assez sensible. Ce phénomène s’évanouit par un bruit assez semblable à une forte explosion de poudre, & qui d’abord effraya beaucoup. Quelques secondes après, on entendit un bruit sourd, semblable à celui d’une canonade qui eut été à trois lieues de distance. Le tout dura près d’une minute. Le bruit paroissoit venir du côté de la Bourgogne, & retentir de la terre. Le même feu fut observé à la même heure à Château-Chinon, du côté du midi ; à Cercy-la-Tour, du côté de l’est. La Gazette d’Amsterdam du 22 Octobre, marquoit que le 9 & le 12 du même mois, on avoit vu à Londres un semblable météore.”
1768, près de Coutances (Manche). Morand fils
évoque la chute de pierres en Normandie, sans plus
d’informations. De même, Bachelay mentionne cet
évènement en 1772 dans les Mémoires de l’Académie
de Paris. Les pierres en question ont été présentées à
l’Académie des Sciences de Paris ; Bigot de Morogues,
en 1812, doute que ces pierres soient tombées dans le
Cotentin car leur ressemblance avec les météorites
tombées à Lucé la même année lui avait paru
flagrante. Source : Revue des Cours Scientifiques,
1867 et dans J. Izarn, Des Pierres tombées du Ciel, ou Lithologie Atmosphérique, 1803.
1768, 9 mars, Villefranche-de-Rouergue (Aveyron). La Gazette de France du 25 mars 1768 publie cet article :
“On mande de Villefranche, en Rouergue, que le 9 de
ce mois, vers les neuf heures & demie du matin, l’air étant serein & le temps extrêmement froid , on entendit un bruit allez considérable dans l’atmosphere , & l’on vit en même temps un nuage très-élevé, qui avoit la
forme d’un serpent & dont l’extrémité étoit terminée par une espece de globe : ce nuage, poussé rapidement vers le midi , s’abaissa à très-peu de distance de terre, conservant toujours sa rapidité , & passa fort près de deux hommes à qui il fit éprouver l’impression d’un
vent tres-violent ; il s’enflamma à une certaine
distance de ces hommes, avec une explosion semblable
au bruit de six coups de canon consécutifs, dont les deux derniers furent moins forts que les quatre autres, & se dissipa ensuite dans un tourbillon de fumée très-épaisse.”
1768, 9 mars, Languedoc. “De Paris, le 11 Avril 1768.
On mande de la Province du Languedoc que, le 9 du
mois dernier, à cinq heures un quart du matin, après plusieurs jours d’un froid vif & l’air étant très-serein, il parut un météore de la couleur d’un feu bleuâtre, ayant la forme d’un cone qui paraissoit avoir dix pieds de longueur sur une base de dix à douze pouces de circonférence. On l’apperçut d’abord sur le sommet d’une montagne d’où il descendit rapidement en se divisant en forme d’étoiles d’une couleur plus brillante que celle qu’il avoit d’abord : ces étoiles se
changerent ensuite en étincelles qui se soutinrent
en l’air un demi-quart-d’heure, & enfin, dans l’instant
où tout se dissipa, l’on entendit une explosion
semblable à un coup de tonnerre qui dura peu, mais
qui laissa dans l’air de fortes vibrations semblables à
celle du son d’une cloche.” Source : La Gazette, 11 avril 1768. Est-ce un phénomène distinct de celui observé dans l’Aveyron ? La date est la même, l’heure est différente.
1768, 4 décembre, Vire (Calvados). “Le 4 à 6 heures 1/2 du matin le tems étant un peu couvert avec un petit brouillard, il passa dessus la ville un dragon de feu considérable qui paraissait aller du S. o. à l’est. On entendit lorsqu’il parut, un bruit semblable à un
violent coup de fusil ; tout ce jour là le tems fut assez beau.” © Bibliothèque de l’Académie Nationale de Médecine.
1769, 18 janvier, Baneins (Ain). “Le 18e janvier 1769 sur les cinq heures et demy du matin, le tems étant doux serein et sans nuage, il s’est élevé une espèce de gerbe de feu de la prerie de Baneins, laquelle a pris la direction d’orient en occident. Elle alloit en s’élevant et s’abaissant tellement qu’un de mes paroissiens s’est baissé pour la laisser passer et a ressenti sa chaleur à sa joue. Elle jettoit des étincelles qui tomboient jusqu’à terre et elle a duré environ trois minutes. Elle étoit si lumineuse qu’elle éclairoit comme le jour à une lieue la ronde. Environ 3 minutes après qu’elle eut disparu, on entendit deux coups de tonerre affreux qui se suivoient de fort près.” Source : Claude Durand, curé de Dompierre-sur-Chalaronne de 1760 à 1785, Archives départementales de l’Ain, 2 E 14601. (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1769, avant février, Orée-d’Anjou (Maine-et-Loire).
En 1769, l’abbé Bachelay montra à l’Académie des
Sciences une pierre qui serait tombée près du château
de la Turmelière, précédée d’un sifflement dans l’air.
M. E. King pour sa part relate la chute de plusieurs
pierres pour une masse totale d’environ 5 livres. J. Izarn,
dans sa Lithologie Atmosphérique, indique l’année 1768.
Il y a peut-être confusion avec la chute de Lucé en 1768 ?
1769, 9 novembre, Cherbourg (Manche). A 9 h 45, la population entend un bruit sourd, « comme du tonnerre », se terminant par « une commotion ou petit tremblement de terre »; personne n’est en mesure d’en déterminer l’origine. S’agit-il de la détonation d’un météore ? Ce phénomène est répertorié par Avoyne de Chantereyne, secrétaire perpétuel de la Société académique de Cherbourg dans son manuscrit Études historiques sur Cherbourg (1783).
1769, 28 novembre, nord-est de la France. “On mande de Bitche, dans la Lorraine Allemande, que, le 18 du mois dernier, vers les six heures du soir, on apperçut, dans toute cette partie de la Province, des météores qui répandirent les plus vives alarmes parmi le Peuple. Des globes de feu d’un volume considérable tomboient perpendiculairement avec expiation ; d’autres s’élançoient horizontalement & se dissipoient sans éclat : en quelques endroits, ces feux en forme de fusées, de traits ou de chevrons, alloient d’une extrémité de l’horizon à l’autre avec un bruit sourd, semblable à celui d’un vent impétueux ; leur grosseur paroissoit très-considérable ; l’éclat qu’ils jetoient étoit aussi vif que la lumiere du Soleil en plein midi, & cette Clarté éblouissante a duré près d’une minute en quelques endroits. Le temps étoit allez serein, mais froid car il y avoit eu, pendant quelques jours, de la pluie & beaucoup de vent. On a eu avis que le même phénomène a été observé en Alsace, à Sarguemines, Bouquenom & autres lieux circonvoisins.” Source : la Gazette du 15 décembre 1769.
1771, 17 juillet, dans la France entière. Un météore
est observé vers 22 h 30 au-dessus du Sussex, en
Grande-Bretagne. Puis il survole Paris et explose au-
dessus de Melun, à trente kilomètres au sud-est de
la capitale. Le phénomène fut si impressionnant que
l’Académie Royale des Sciences dépêcha sur place
Jean-Baptiste-le-Roy pour établir un rapport. Le
météore était d’un diamètre apparent supérieur à celui
la lune. Par de savants calculs, le chercheur put
définir sa vitesse qui était d’environ 11 kilomètres par
seconde. Des témoins près de Melun indiquèrent que
des morceaux du météore tombèrent au sol après
l’explosion. Voici une exposition des faits tels qu’ils
furent relatés à cette époque. “Il en parut un de cette
espèce à Paris, le 17 Juillet 1771, à 22 h 30 du soir,
le ciel étant très serein. Sa lumière fut fort vive,
et à peu près semblable à celle que fournissent
les grosses fusées à étoiles. Elle dura quelques
secondes, et prit, vers sa fin, une teinte de jaunâtre. Ce globe de feu paraissait aux yeux avoir un pied
de diamètre, et son mouvement progressif se fit du nord-ouest au sud-est. Il parut avoir une queue de quelques pieds de long : Ce météore fut suivi, environ deux minutes après son apparition, d’un bruit en tout semblable à celui du tonnerre ;
ce qui prouve qu’il éclata à environ 9 lieues de
distance. Une preuve que ce feu est réellement de la nature des éclairs, c’est qu’il, fait entendre le bruit du tonnerre. Il faut qu’il ait été à une grande hauteur dans l’atmosphère, car on l’a aperçu, non
seulement en plusieurs endroits des environs de Paris,
mais encore jusqu’à Lyon autres lieux adjacents.”
Source : J.-B. Le Roy, “Mémoire sur le Météore ou
Globe de feu, observé au mois de Juillet dernier,
dans une grande partie de la France.”, Histoire de
l’Academie Royale des Sciences avec les Mémoires
de Physique, pour l’Année 1771.
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La Gazette du 26 juillet 1771 publie cet article : “De Paris, le 26 Juillet 1771.
Le Mercredi 17 de ce mois, vers les dix heures & demie du soir, le temps étant tres-serein, à l’exception de quelques nuages qui bordoient l’horizon du côté du Couchant, on vit tout d’un coup, au Nord Ouest, dans la moyenne région de l’air, une lumière qui croissoit à mesure qu’elle avançoit. Elle parut d’abord sous la forme d’un globe, ensuite avec une queue semblable à celle d’une Comète. Ce globe ayant traversé, avec assez de rapidité, une partie du Ciel, du Nord Ouest au Sud- Est, en s’approchant de l’horison, répandit, comme en s’ouvrant, une lumière si vive & si brillante que la plupart de ceux qui la virent ne purent en soutenir l’éclat : cette lumière ressembloit à celle des bombes lumineuses d’artifice. Au dernier instant de
son apparition, ce globe prit la forme de poire, & sa lumière étoit d’un blanc pareil à celui d’un métal en fusion ; cependant il sembloit que dans quelques endroits cette lumière étoit plus rouge, & l’on y voyoit des especes de bouillonnemens avec une matière fumeuse : la queue étoit d’une couleur plus rougeâtre. La durée de ce phénomène n’a gueres été que de quelques secondes. La grosseur extraordinaire de ce globe & son extrême hauteur ont fait croire à la
plupart de ceux qui l’ont vu qu’il étoit tombé au
dessus d’eux. Il a été vu non seulement ici & aux environs, comme à Versailles, à Saint-Germain, &
c. mais encore à Senlis, à Compiegne, à Rouen, à Argentan, à Tours, dans la Champagne, dans la Bourgogne & dans plusieurs autres endroits, à plus de soixante-dix lieues de cette Capitale. Deux ou trois minutes après sa disparition, on entendit un bruit
sourd approchant de celui d’un coup de tonnerre qui éclate au loin. On assure que, dans plusieurs endroits, les vitres et les meubles ont tremblé. Ce phénomène n’est ni rare ni fort extraordinaire. On en a déjà
observé un grand nombre de cette espece à Paris & ailleurs ; & les Physiciens qui les connoissent, sous le nom de globes de feu, n’ont pas été médiocrement surpris qu’on ait attribué celui-ci à une expérience d’électricité ou plutôt à un cerf-volant destiné à faire des expériences sur l’électricité de l’air. Il faut n’avoir aucune connoissance de la Physique pour croire qu’une telle machine puisse, dans aucune circonstance imaginable, produire un effet pareil.”
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L’Avant-coureur du 29 juillet 1771 publie un rapport écrit par de la Lande : “Histoire du Metéore observé le 17 Juillet 1771 par M. de la Lande, de l’Académie Royale des Sciences. Mercredi 17 Juillet, à dix heures 36 minutes du soir il a paru un Météore extraordinaire à Paris & dans les environs ; c’était une lumière très-vive & très éclatante. Ce globe de feu parut se former à l’ouest nord-ouest de Paris, comme si le ciel s’était ent’rouvert sur un espace de 15 ou 20 degrés. Ce globe de feu paraissait plus gros que la lune, & plus brillant ; il prit la forme d’une poire ou d’une larme batavique, laissant derrière lui une queue très-longue & très-large, en forme de lance, crennelée, blanchâtre dans le milieu, jaune sur les bords & qui paraissait jeter des étincelles & des couleurs variées. Le mouvement de ce globe de feu se fit du nord-ouest au sud-est, à peu près comme une fusée, mais le mouvement était moins rapide. Le grand éclat n’a duré qu’une seconde, la lumière était bleuâtre, & la trace que le globe de lumière laissait après lui s’est abaissée en divers endroits de Paris, de manière qu’on a cru que ce feu était tombé ; les uns ont dit l’avoir vu tomber à la place Vendôme, les autres dans la rue des Bons-Enfans, au Jardin du Roi, dans la riviere à l’est de Paris ; d’autres à Passy, qui est à une demi lieue du côté du couchant ; comme si les parties sulfureuses ou grades de l’atmosphère, que ce Météore allumait successivement, fussent tombées en divers endroits à mesure qu’elles se confirmaient.
A Vanvres, qui est aussi vers le couchant de Paris, plusieurs personnes ont été environnées par une trainée de lumière, sans avoir eu le moindre mal. On assure seulement qu’une femme dans le Village en a eu les cheveux brûlés. A Bercy, il est dessendu un lumignon qui a noirci les dalles sur lesquelles il est tombé. Dans d’autres endroits on s’est cru de même environné par le feu. M. Bailly, qui était à Chaillot, vit ce globe s’épanouir & éclater du côté de l’orient ; il répandit une grande lumière blanche avec grand nombre d’étincelles semblables aux étoiles des feux d’artifice.
M. Heritier, qui a vu ce Météore à Passy, estime que ce feu pouvait avoir quatre ou cinq pieds de long, il était à son extrémité d’une couleur jaune qui devenait d’un rouge vif à mesure qu’elle approchait de l’extrémité, qui avait la forme d’une poire. Ce feu lui parut descendre jus-qu’à la hauteur de ses fenêtres, & comme s’il eut été à la distance de 5 à 6 pieds ; il s’ouvrit alors en forme de tulippe à trois feuilles avec les plus belles couleurs de l’Arc en Ciel ; la chambre parut remplie d’une lumière bleue.
A Versailles, on le vit descendre & remonter avec un grand éclat de lumière.
A Senlis, on ne vit qu’une petite lumiere qui prit naissance à l’ouest, & qui traversa vers l’est.
Environ deux minutes après le grand éclat de lumière on entendit à Paris un bruit semblable à celui du tonnerre ou de 3 à 4 coups de canon ; ce bruit sourd dura quelques secondes, ou même une minute suivant d’autres ; il paraît annoncer une détonnation faite à 8 ou 10 lieues de Paris. Plusieurs personnes ont comparé ce bruit au mouvement d’une voiture qui descendrait rapidement d’une colline. La chaleur avait été depuis trois jours jusqu’à 24 degrés. Le ciel était fort beau. Après ce Météore l’air parut devenir plus chaud, pendant la nuit le tems se couvrir, & le 18 l’air était d’une chaleur étouffée ; il tomba vers les 11 heures du matin de grosses goûtes d’eau ; cette pluie sentait mauvais, mais elle ne dura pas cinq minutes. Le 19 la pluie rafraîchit le tems, & le Thermomètre n’alla pas au-delà de 17 degrés.
Les paysans qui virent ce Météore dans la campagne se jeterent à terre par la frayeur qu’il leur causa, & craignirent d’être engloutis.
Une personne qui était à 15 lieues à l’occident de Paris a vu le même Météore & entendu le même bruit. On écrit qu’il a été apperçu à Mantes, à Rouen , à Senlis, à Beaumont, à Dôle en Franche-Comté, à Auxerre & à Lyon : on l’a vu à Auxerre à-peu-près avec les mêmes circonstances qu’à Paris.
Il y avait une légère bordure de nuages vers le couchant, mais il ne parait pas que ce Météore soit venu de si loin ; cependant le vent qui avait été à l’est pendant la journée était tourné à l’ouest vers le soir, ce qui a pu déterminer la direction de ce feu.”
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Le Mercure de France d’août 1171 propose cet article : “A Champigni sur Marne, ce 18 Juillet 1771.
Monsieur,
C’est bien avec raison que M. de Buffon dit que le Ciel est le pays des grands événement. Le 17 de ce mois, entre dix heures & demi & onze heures du soir que je me promenois, je fus témoin d’un météore singulier dans son effet s’il n’a rien de particulier dans sa cause. Il faisoit le plus beau tems du monde, le Ciel étoit clair sans nuages, l’air étoit calme mais peu rafraîchi ; il n’y avoit point de rosée & le baromètre, comme je l’ai examiné depuis, étoit resté à un demi-degré au-dessus du variable où il s’étoit fixé depuis plusieurs heures. Ma compagnie & moi nous nous entretenions de la blancheur de la voie lactée, lorsque tout-à-coup nous nous trouvâmes d’abord éclairés d’une lumière pâle & très étendue, & aussi-tôt enveloppés d’une très-rouge & ardente au point de nous faire appercevoir que nous étions au milieu de la flamme. Je levai les yeux pour considérer le phénomène ; je vis un corps de feu assez volumineux qui étoit à très peu de distance de la terre, & qui fut pendu presque perpendiculairement au-dessus de nos têtes, traversoit l’air avec lenteur. La surface inférieure de cette masse flotante représentoit un losange qui, d’un angle à l’autre, me paroissoit avoir environ un pied & demi de diamètre. Au dernier angle, c’est-à dire à celui qui étoit du côté du nord d’où étoit venu ce feu, une longue queue comme roulée sur elle- même dans sa longueur, y étoit adhérente ; elle étoit mêlée de clartés & de ténèbres & s’agitoit fortement. Le centre du losange étoit un foïer ou plutôt un soleil dont la vue soutenoit difficilement l’éclat & qui échauffoit sensiblement Ie visage. Il s’y faisoit un mouvement de rotation qui ressembloit à un bouillonnement violent. Les bouillons étoient d’un brillant surprenant & leurs sinuosités obscures. Enfin ce corps qui s’étoit élevé de la terre nous quitta heureusement pour prendre en ligne oblique une ascension rapide très-haute vers la voie lactée du côté du midi. Je le suivis des yeux jusqu’au moment où ne paroissant plus être qu’une très-petite étoile, il se dissipa avec un tel bruit qu’un grand coup de tonnerre se fit entendre sur le champ.
Mais nous restâmes électrifés ainsi que nos voisins qui, de même que nous, avoient prétendu prendre le frais. Chacun sentit sur les deux tempes une compression qui dura quelque tems. Une Demoiselle n’en fut même soulagée que par un saignement de nez qui lui survint le lendemain matin.
La queue ou la longue traînée de lumière de ce météore n’étoit, je pense, formée que par l’épuisement des matières combustibles dont étoit composé ce corps qui dans le commencement de son embrasement n’avoit du produire que cette pâle clarté que nous vîmes en premier lieu.
On aura sans doute observé ailleurs le même soir de semblables météores. Ils étoient, pour ainsi dire, annoncés par ce coucher du soleil qui étoit entouré de quantité de globes lumineux qui ne sont pas ordinaires.
J’ai l’honneur, &c.
Mosnier, abonné au Mercure.”
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Toujours dans le Mercure d’août 1771 : “Observations sur le même Météore, par M. l’Abbé Marie, de l’Académie royale des Sciences, professeur de philosophe au collège Mazarin.
A Paris, ce 18 Juillet.
Le phénomène du 17 n’est, à mon avis, autre chose qu’un météore enflammé, dont la détonation doit s’être faite au sud-sud-est de Paris, d’où il m’a paru s’avancer rapidement vers le nord.
Sa lumière étoit fort brillante, mais tranquille ; je la compare à celle de ces traînées de feu que les bonnes gens prennent pour des étoiles qui changent de place. La seule différence, c’est qu’il y a eu beaucoup plus de matière enflammée, & que l’inflammation s’est faite plus près de la terre.
Bien s’en faut cependant que ce météore soit tombé à Paris, comme tant de personnes disent l’avoir vu. La preuve qu’il étoit assez élevé dans l’atmosphère, se tire de ce que chacun l’a cru voir sur sa tête.
Tant qu’il y a eu de matière inflammable, le météore a brillé & avancé vers le Nord. Encore quelques jours, & on saura ce qui a été observé dans le cours de sa direction.
L’éclat de sa lumière ne dura pas une seconde, & ce ne fut que deux minutes après que j’entendis au sud-sud-est un bruit assez semblable à celui d’un médiocre coup de tonnerre. Ce bruit dura uniformément deux ou trois secondes. La lumière avoit paru à 10h. 36m. du soir.
Voilà, Monsieur, ce que j’ai vu & entendu. Il avoit fait fort chaud trois jours auparavant, il fit encore chaud le lendemain, puisque le thermomètre de l’observatoire du college Mazarin étoit à 21° à six heures du soir ; mais ce jour- là le Ciel fut tout couvert de nuages, & sur le soir il s’éleva un vent du nord-ouest assez froid qui a duré deux jours.
Le tems avoit été fort calme le 17, & le ciel étoit fort ferein au moment même où j’observai ce météore qui, en vérité, ne valoit pas la peine d’occuper tant de monde & d’imaginer tant de faussetés.”
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On trouve également cet article : “Vers 10 heures et demie du soir, le temps étant parfaitement serein, on aperçut tout à coup un feu semblable à une grosse étoile tombante, traversant une partie du ciel, du nord-ouest au sud-ouest et qui, augmentant à mesure qu’il approchait, parut bientôt sous la forme d’un globe et ensuite avec une queue qu’il traînait après lui. Ce globe étant ensuite devenu comme stationnaire, parut avoir, dans son milieu, des bouillonnements, accompagnés d’une matière fumeuse. Il éclata alors, en répandant un grand nombre de parties lumineuses semblables aux brillants des feux d’artifices. Deux minutes environ après, on entendit un bruit que les uns comparèrent à un tonnerre qui gronde, d’autres à une charrette chargée. Il fut aperçu à Evreux, à Rouen, à Reims, à Dijon, à Amiens, à Tours, à Limoges, à Lyon et à Sarlat en Périgord.”
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On lit dans l’Histoire de l’Académie royale des sciences en 1771 : “Le 17 Juillet 1771, vers 10 1/2 heures du
soir, on aperçut un météore igné dans tout l’espace
en latitude de Sarlat à Oxford, & en longitude
de Granville à Reims ; c’est-à-dire dans un espace
d’environ 5 degrés en longitude, & 6 degrés en
latitude. Une foule de Savans, d’Amateurs des Sciences, bien des gens même, qui épouvantés de la vue de ce météore, sentoient peut-être pour la première fois le besoin d’être éclairés, se sont empressés d’envoyer à l’Académie des descriptions de ce phénomène ; les uns pour l’en instruire, & les autres pour la consulter. Elle a chargé M. le Roi de lui rendre compte de ce que les diverses relations offroient de faits constatés, & propres à donner quelques connoissances sur le lieu du météore, sur la direction de son mouvement, sur sa grandeur,
sa véritable forme, & M. le Roi a joint à ces détails ce qu’il a trouvé de plus intéressant dans les ouvrages des Physiciens, sur les météores ignés qui ont précédé celui-ci. [...] On ignore encore comment ces météores se forment, & de quelle matière ils sont composés ;
on ne sait même si cette matière est dense ou rare ;
seulement, on est presque sûr que ces globes se dissipent dans l’atmosphère, & l’on n’a jamais observé ni qu’ils aient causé des incendies, ni même qu’il en soit parvenu jusqu’à la surface de la Terre quelques débris enflammés. Mais il faut lire tous ces détails dans le Mémoire de M. le Roi. II paroît dans le volume tel qu’il a été lu dans une Assemblée publique ; c’est-à-dire mis à la portée de tous les lecteurs, & dépouillé des calculs d’après lesquels
M. le Roi a fixé la hauteur de ce globe plus de
18 lieues, son volume à plus de 500 toises de diamètre, & sa vîtesse à plus de 7000 toises par secondes.”
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Le dictionnaire des merveilles de la nature (t. 2) en
1781 relate précisément le phénomène céleste : “Celui qui fut l’objet du Mémoire de M. Leroy, fut observé le 17 Juillet 1771, vers les dix heures & demie du soir, le tems étant parfaitement serein, à la réserve de quelques nuages qui bordoient l’horison du côté du couchant. On vit paroître tout-d’un-coup dans le nord-ouest un feu semblable à une grosse étoile tombante qui augmentant à mesure qu’il approchoit, parut bientôt sous la forme d’un globe, & ensuite avec une queue
qu’il traînoit après lui. Ce globe ayant traversé une
partie du ciel à-peu-près du nord nord-ouest au sud-est, avec une extrême rapidité, & dans une direction fort inclinée à la terre, son mouvement parut se rallentir, &
sa forme devenir semblable à celle d’une larme
batavique. Il répandit alors la plus vive lumière, étant
d’une blancheur éblouissante & pareille à celle du
métal en fusion. Sa tête paroissoit environnée de
flammèches de feu, dont les unes sembloient
appartenir au corps même du météore, & les autres en être détachées, & sa queue bordée de rouge, étoit parsemée des couleurs de l’arc-en-ciel. Le globe étant devenu comme stationnaire, parut prendre encore une forme moins allongée, comme celle d’une poire, & avoir dans son milieu des bouillonnemens accompagnés d’une matière fumeuse : alors ayant comme épuisé tout son mouvement, il éclata en répandant un grand nombre de parties lumineuses semblables aux brillans des feux d’artifices. Ces brillans produisirent une si vive lumière & si éblouissante, que la plupart des spectateurs ne purent en soutenir l’éclat, & s’imaginèrent, l’instant d’après, être au milieu des plus profondes ténèbres. Quelques-uns crurent que le météore s’étoit évanoui dans un instant, & sans faire d’explosion, mais elle leur échappa sans doute par la vive lumière dont ils furent éblouis car un grand nombre d’Observateurs, sur le témoignage desquels on peut compter, parlent tous de cette explosion & des brillans de lumière dans lesquels le globe éclata ; & leur récit paroît d’autant plus certain, que c’est ordinairement de cette manière que ces sortes de météores se terminent. La durée du phénomène ne parut à Paris que d’environ quatre secondes ; mais il paroît aussi comme certain qu’on n’y observa point le commencement de ce phénomène. Le globe, à son explosion, étoit élevé de quarante-cinq degrés ou à-peu-près, & sembloit avoir douze à quinze pouces de diamètre ; mais il parut plus gros à quelques Observateurs du côté de Corbeil & de Melun. Deux minutes ou environ après qu’il eut éclaté, on entendit à Paris un bruit que les uns ont comparé à un coup de tonnerre qui gronde au loin, d’autres à une charette fort chargée, qui roule sur le pavé ; d’autres enfin, à un bâtiment qui s’écroule. Du côté de Melun, ce bruit parut beaucoup plus fort & ce qui est remarquable, c’est qu’on en entendit un second après le premier,
mais sensiblement plus faible. A-peu-près dans le même tems qu’on entendit ce bruit à Paris, il y eut une espèce de commotion dans l’air qui fit trembler les
vitres & les meubles dans les parties de cette Ville
situées au sud-est, particulièrement dans les lieux
élevés, comme à l’Observatoire. On attribua ce mouvement à un tremblement de terre ; mais c’est une erreur. Il n’y en eut aucun. Ce mouvement ne fut que l’effet de la vive commotion de l’air, excitée par l’explosion du globe. [...] Pour revenir à celui dont il étoit question précédemment à celui de 1771, nombre
de personnes trompées par sa hauteur & par sa grandeur, crurent, quoiqu’elles en fussent fort éloignées, qu’il avoit éclaté près d’elles. Plusieurs même, en voyant les différentes parties de lumière en lesquelles il se divisa en éclatant, imaginèrent que ces parties étoient tombées jusqu’à terre. Tout le monde
fait que ce météore fut vu non-seulement dans des endroits fort éloignés de, Paris, mais encore très-distans les uns des autres. Nous ne citerons ici que les principaux. Il fut vu à Amiens, Senlis, Compiègne, Dieppe, le Havre, Granville, Rouen, Argentan, Evreux, Laval, Tours, Limoges, Sarlat, en Périgord, Moulins, Lyon, Semur, Dijon, Massy, Joinville, Reims, Auxerre, Corbeil, Melun, & c. Le bruit de son explosion fut entendu à Rouen, à Evreux, à Amiens, Senlis, Compiègne, Melun, Corbeil, & dans plusieurs autres Villes vers le sud-est de Paris.
La surprise & l’épouvante que causent ces sortes de météores, la rapidité de leur mouvement qui les fait paroître & disparoître presqu’en un instant, tout diminue le nombre des spectateurs capables de rendre un compte exact de leur apparition. On éprouve encore une autre difficulté, comme l’observe très-bien M. Leroy, pour en parler avec précision ; c’est la variété dans le récit des circonstances même les plus faciles à observer : variété, dit-il, qui naît du peu de justesse des idées des hommes, & de l’incertitude qui règne dans le témoignage de leurs sens. A la direction & à la hauteur de ce globe on ne peut douter qu’il ne se foit formé au-dessus des côtes d’Angleterre. Le point du ciel d’où on l’a vu venir au Havre, la grandeur dont il a paru dans cette Ville & à Dieppe; tout annonce que c’est de ce côté-là qu’il prit naissance, & cette idée fut confirmée quelque tems après par les observations de M. Hornsby, Professeur d’Astronomie à Oxford. De-là, courant vers le sud-sud-est, il passa au-dessus de la Normandie, vers les confins de la Picardie, où on dut le voir à une très-grande hauteur. Enfin, continuant sa route du nord-ouest-quart-nord, au sud-est-quart-sud, il traversa le ciel presqu’au zénith de Paris : mais en déclinant un peu vers l’orient, & fut éclater vers Melun, à plusieurs lieues dans le sud sud-est de la Capitale. Telle fut, autant qu’il est possible d’en juger par la multitude d’observations qui furent communiquées à l’Académie, la direction & l’étendue de sa route. Il paroît, par une suite de calculs assez sûrs, que lorsqu’on commença à l’appercevoir, il devoit être à-peu-près à dix-huit lieues de hauteur, & à neuf ou environ, quand il fit explosion, hauteur qui s’accorde assez avec celle que lui donne l’intervalle de deux minutes qui s’écoula entre cet instant & celui où on entendit le bruit de cette explosion.
Par cette hauteur extraordinaire, on explique sans peine comment on a pu voir ce phénomène au même instant, dans des lieux aussi éloignés les uns des autres. Il n’est pas aussi facile de déterminer la vitesse avec laquelle ce globe se mouvoit, parce qu’on n’est point trop d’accord sur la durée du tems de son apparition. L’opinion la plus générale cependant, fixa ce tems à quatre secondes ; & il est probable qu’il y eut de l’erreur dans cette décision, parce qu’il est probable que ceux qui l’observèrent ne le virent point au premier instant de son apparition. Aussi, M. Leroy, qui est fort de cet avis, veut-il qu’on lui passe dix secondes depuis ce premier instant jusqu’au moment de son explosion, & nous ne le chicanerons point sur une demande aussi sage. Or, comme dans cet intervalle ce globe parcourut une ligne de plus de soixante lieues de longueur depuis les côtes d’Angleterre, d’où il le fait venir, jusqu’à Melun, il s’ensuit que sa vîtesse étoit extrême, puisqu’elle étoit de plus de six lieues par seconde. Si cette vîtesse a de quoi nous surprendre, son énorme volume n’a pas moins de quoi nous étonner : car il paroît, par les observations les mieux faites, qu’il avoit plus de cinq cens toises de diamètre.
On ne peut se défendre, dit M. Leroy, d’une sorte de terreur, en pensant à un globe de feu d’un volume si prodigieux, qui vient à passer au-dessus de nos têtes. Mais comme on n’a point d’exemples que ces énormes masses de feu soient jamais descendues sur la surface de notre globe, cette seule considération doit nous tranquilliser ; & comme l’observe encore très-bien ici M. Leroy, si Mussembroek, l’un des meilleurs Observateurs de son siècle, fait mention de globes de feu qui ont démâté & fracassé des vaisseaux, c’est que ce célèbre Physicien a confondu alors les globes de feu dont il est ici question à des globes de foudre, qui en diffèrent à tous égards. Il y a cependant nombre d’observations qui nous paroissent suffisamment confirmer qu’une partie de ces masses énormes de feu peuvent bien arriver jusqu’à nous.
On observa en effet, en 1761, en Bourgogne, une espèce de pluie de feu au moment de l’explosion de ce globe dont nous avons parlé au commencement de cet
article ; mais on ne doit point ajouter foi pour cela à tous les bruits qui se répandirent au sujet de celui qu’on observa en 1771. Personne ne fut brûlé, ni à Paris, ni à Vanvres, ni par-tout ailleurs, comme on le publia alors.
On ne peut guère douter cependant, d’après une multitude d’observations, que quelques parties de ce globe ne soient arrivées fort près de la surface de la terre. Mais il ne paroit pas qu’elles y aient causé aucun accident. Parmi la multitude d’observations que nous pourrions rapporter, en voici deux qui méritent de trouver place ici. La première est de M. Clément de Malleran, Avocat en Parlement, & Professeur de droit François.
Il étoit avec plusieurs personnes dans un appartement au second, rue de l’Observance, presque vis-à-vis l’Eglise des Cordeliers, assis en face des fenêtres qui étoient ouvertes, à une distance de neuf à dix pieds. Un clin-d’oeil avant que le météore s’éteignît, il le vit faire une espèce d’explosion sans aucun bruit, qui poussa, dit-il, une lame de feu jusque dans la salle où il étoit. Cette lame, qui paroissoit remplir tout l’horison, ajouta-t-il, n’avança vers nous qu’avec une espèce de lenteur :
car nous vîmes sa marche très-distinctement, & sa célérité ne nous parut pas excéder le vol d’un oiseau de proie. Cette lame nous couvrit d’une lumière aussi éclatante que celle d’un beau soleil à midi, & s’éteignit à l’instant. Dans le même tems, ou à-peu-près, que
M. Clément faisoit cette observation, rue de l’Observance, des personnes qui étoient à table, rue de Clichy, & qui par leur position ne pouvoient avoir la vue directe du météore, virent très-distinctement sur le carreau de petites flammes qui avoient l’air de s’agiter en différent sens, & qui disparurent ensuite. Il y a, dans ce phénomène, encore une circonstance sigulière : c’est que plusieurs de ces flammes, ou des parties de feu de ce météore, se sont fait voir dans des lieux assez distans les uns des autres, & de celui où il a éclaté. Il y a près de deux mille toises de la rue de l’Observance à celle de Clichy. Quelque difficile que paroisse l’explication de ce phénomène, elle le paroît moins lorsqu’on considère que la tête du météore paroissoit entourée de petites flammèches qui sembloient voltiger autour de lui. Il est probable que ces petites flammèches ont pu s’en détacher avant l’explosion, & descendre jusqu’à terre. Cette opération se rapporte assez bien à cette pluie de feu qu’on observa en 1761 en Bourgogne, & dont nous parlerons plus bas.
Un autre phénomène qui mérite également notre attention, c’est la seconde détonnation qu’on entendit à Melun, & dont nous avons parlé plus haut. Elle n’a cependant rien de surprenant pour ceux qui savent que l’entière explosion de ces météores est presque toujours l’effet de deux exploitons successives ; l’une du globe qui éclate en différentes parties, l’autre de ces parties qui éclatent à leur tour. Par-là, ces globes paroissent ressembler à ces fusées volantes, qui, contenant d’autres fusées dans leur chapeau, font leur effet en deux tems.
Le bruit qu’on entend après qu’un globe a éclaté, & qui ressemble souvent à une décharge instantanée de plusieurs batteries de canon, est l’effet de l’explosion du globe entier. Le bruit plus clair, moins fort qu’on entend ensuite, est celui de l’explosion de ses parties. Or, comme celui-ci est beaucoup moins fort, il ne doit point être surprenant qu’il ne s’entende pas aussi loin que le premier, & c’est ce que l’observation a confirmé ici.
Quelques-uns ont regardé comme fort extraordinaire qu’au moment de l’apparition de ce météore, le ciel fût très-beau & très-serein ; mais c’est précisément ce qui devoit être pour qu’ils le vissent. Car ces fortes de globes se formant beaucoup au-dessus de la région des nuages, on conçoit que si le ciel étoit couvert & nébuleux, on ne pourroit les observer. Or, comme on a observé celui dont il est ici question à plus de deux cents lieues de distance, cela prouve en même-tems que le ciel étoit très-serein le 17 Juillet 1771, à dix heures & demie du soir dans un espace circulaire de plus de deux cents lieues. Ces sortes de météores ne font point aussi rares qu’on pourroit l’imaginer ; & on ne sera peut-être pas fâché de trouver ici une notice abrégée des principaux & de leurs variétés, qu’on a eu occasion d’observer depuis le dernier siècle, non qu’il fût impossible de rassembler plusieurs observations des siècles plus reculés.”
1771, 12 novembre, Pont-l’Evêque (Calvados). “On mande de Pont-l’Evêque, Ville de la Généralité de Rouen, que, le 12 du mois dernier, à quatre heures & demie du matin, plusieurs particuliers, allant de cette Ville au marché du Bourg de Beuzeville, ont vu un globe de feu, d’environ un pied de diametre, qui s’est
détaché du Ciel, & qui est tombé, sans explosion,
assez près d’eux.” Source : La Gazette du 16 décembre 1771.
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“Le 5 décembre 1771, le subdélégué de l’élection de Pont-l’Evéque écrivait ce qui suit à l’intendant de Rouen : Le mardy douze du mois dernier, à quatre heures et demie du matin, deux particuliers allants de la ville de Pont-l’Evéque au marché du bourg de Beuzeville, furent, au milieu de la coste du Hutrel, surpris et effrayés d’un globe de feu d’environ un pied de diamètre qui, leur ayant paru se détacher du ciel, tomba rapidement et sans explosion assez près d’eux.
La Gazette de France ayant signalé cet événement, le célèbre physicien Jean-Baptiste Le Roy, membre de l’Académie des sciences, écrivit à l’intendant afin d’avoir des détails circonstanciés sur ce globe de feu, et il terminait sa lettre en rappelant le météore qui, le 17 juillet précédent, avait épouvanté tout Paris, et Je ris même beaucoup, ajoutait Le Roy, avec Mme de Pommereu, que j’eus l’honneur de voir dans le même temps, de tous les contes qu’on faisoit dans Paris sur ce météore.
L’intendant ayant transmis la requête du savant au subdélégué de Pont-l’Évéque, celui-ci, le 9 janvier 1772, ajoutait à sa précédente note les renseignements suivants : Le globe de feu partit du Midi et descendit perpendiculairement sur la terre ; son mouvement fut rapide, son éclat fort grand, sa couleur d’un rouge vif, sa grandeur d’environ un pied de diamètre ; il avait une queue peu étendue : il partit d’une grande hauteur. Sa course se fit sans bruit et sans explosion ; il parut tomber contre terre sans se partager ; il se dissipa tout à coup sans qu’il en restât aucune marque. Il parut tomber directement à terre ; il ne laissa aucune odeur et ne brûla rien. Sa durée fut fort courte, et il disparut comme un éclair (1).
(1) Arch. dép. de la Seine-Inférieure : C. 907.” Source : Comptes-rendus du Congrès des sociétés savantes de Paris et des départements, 1904.
1771, 15 décembre, Angers (Maine-et-Loire). “Le 15 Décembre sur les six heures du soir, à Angers, il parut en l’air un météore qui jettoit un feu très-ardent. Il avoit sa direction au sud-ouest, & formoit deux barres de feu d’environ cinq à six pieds de longueur sur trois de largeur, & qui s’élevoient & s’inclinoient sur l’horison avec la rapidité d’un éclair. Ce phénomène ayant disparu, le vent & la pluie qui venoient du même côté, augmentèrent avec toute la violence & l’impétuosité d’un ouragan qui dura jusqu’à dix heures du soir.” Source : Affiches des trois-évêchés du 18 janvier 1772.
1773, 19 janvier, Bressuire (Deux-Sèvres). “Extrait d’une Lettre écrite des environs de Bressuire, le 19. Nous avons apperçu ici, samedi 16, vers les neuf heures du soir, un Phénomene extraordinaire. C’étoit comme une nappe de feu qui voltigeoit dans l’air. D’abord elle étoit quarrée, puis elle devint longue, & disparut après avoir éclairé long-temps l’athmosphere.” Source : Affiches du Poitou du 4 février 1773.
1773, 29 juillet, Crépy-en-Valois (Oise) et Paris. La Gazette de France du 20 août 1773 relate l’observation d’un météore qui a éclaté dans le ciel. “On écrit de Crespi, en Valois, que le 29 du mois dernier, à huit
heures & demie du soir, le temps étant serein & calme, la lune très-brillante, le vent au Nord-Ouest, on apperçut dans la haute région de l’air, du côté du Sud, un
météore sous la forme d’un globe, auquel étoit adhérente une queue placée verticalement ; que l’éclat qu’il répandit fut assez considérable pour effacer entièrement celui de la lune ; qu’il brilla quelques secondes, après lesquelles il parut se dissiper & se perdre sur la surface de la terre ; qu’environ sept minutes après, on entendit un bruit semblable à celui d’un coup de canon, & l’on sentit une commotion assez forte pour ébranler les vitres, les vaisselles & les corps mobiles dans les appartemens. Le même météore fut visible à Paris, à peu près à la même heure, ainsi que nous l’avons dit ; mais il ne fut suivi ni de bruit, ni de commotion. Si l’on ne s’est point trompé sur le temps qui s’est écoulé entre la détonation du météore & le bruit qu’on a entendu, on en pourroit conclure qu’il n’étoit qu’à trente lieues d’élévation ou d’éloignement. Les physiciens prétendent que le son, abstraction faite des obstacles ou de l’accélération occasionnée par les vents, parcourt en une seconde, 176 toises. Les 420 secondes que renferment les sept minutes d’intervalle, donnent 73,920 toises qui a deux mille cinq cens par lieue, forment à peu près, vingt-neuf lieues & demie. Ces masses de particules combustibles qui s’enflamment, soit par la vîtesse de leur course, soit en fermentant entr’elles, soit par l’effet de la chaleur répandue dans l’air, & qui s’arrondissent en brûlant, ainsi qu’il arrive à tous les fluides qui roulent dans un autre fluide, présentent toujours un spectacle étonnant & magnifique & ne sont point dangereuses. Si elles s’allumoient près de la terre, ou si elles conservoient assez d’aliment
pour y parvenir avant que d’être évaporées, elles pourroient causer des ravages dans les lieux où elles feroient leur explosion.”
1774, 26 juillet, Noyon (Oise). “Le 26 du mois dernier,
à dix heures du soir, le ciel étant très-serein & la lune
fort brillante, on vit à Noyon un météore éclatant
qui courut du nord au midi & dont la lumiere étoit
assez vive pour effacer celle de la lune, quoiqu’elle
fût d’un feu pâle & laiteux. Lorsqu’il eut disparu,
on entendit au loin un bruit semblable à celui du
tonnerre.” Source : Gazette du Commerce, 16 août 1774.
1777, 3 novembre à 19h30, Néris-les-Bains (Allier). “Le trois du mois de novembre me promenant dans mon jardin a sept heures et demie du soir, l’air etant fort doux, le ciel serein et le vent au nord j’appercus un meteore extraordinaire. Le tems s’eclaircit au loins que l’on crut qu’il allait eclorre un nouveau jour entre le nord et le couchant je vis paraitre un globe lumineux et d’un diametre tres considerable qui s’elevait dans la direction du couchant d’hiver, il s’en echappait successivement où à la fois de fortes etincelles et le cercle dont il etait entouré etait formé de rayons de plusieurs couleurs, parmi lesquelles on distinguait surtout l’orangé lorsque ce globe fut a une certaine hauteur il en sortit deux especes de volcans qui separés de la masse prirent la forme de deux grands arcs en ciel dont l’un ce perdit vers le nord et l’autre vers le levant. alors je vis la masse se fondre insensiblement au point qu’environ neuf heures tout avait disparu. Ce phenomêne n’avait eté accompagné d’aucune explosion.” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de l’Allier, BMS - 1777 - 1787 - GG 8 - vues 28 - et 29 / 235 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1777, 3 novembre à 21h30. Sarlat (Dordogne). Dans l’Histoire de l’Académie royale des sciences publié en 1777, on peut lire : “Le 3 du mois de Novembre 1777, à sept heures & demie du soir, l’air étant fort doux, le tems serein & le vent au nord, on apperçut à Sarlat & aux environs un météore extraordinaire. Le tems s’éclaircit au point qu’on crut qu’il alloit éclore un nouveau jour. Entre le nord & le couchant, on vit paroître un globe de feu très-lumineux, & d’un diamètre fort considérable. Il s’élevoit dans la direction du couchant d’hiver; il s’en échappoit successivement, & souvent à la fois, de fortes étincelles, semblables à des étoiles artificielles, & le cercle dont il étoit entouré, étoit formé de rayons de différentes couleurs, parmi lesquelles on distinguoit sur-tout l’orangé. Lorsque ce globe énorme fut environ à la hauteur de six toises, il en sortit deux espèces de volcans, qui, séparés de la masse, prirent la forme de deux grands arcs-en-ciel, dont l’un se perdit vers le nord, & l’autre vers le levant. Alors on s’apperçut que la masse se fondoit insensiblement, au point qu’à huit heures cinq minutes du matin tout avoit disparu, & il ne survint aucune explosion.”
1778, 22 janvier, Seine-Maritime. M. Chefdhotel relate l’observation d’un météore igné, dans le Précis
analytique des travaux de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Rouen (1819) : “Le 22 janvier
1778, M. Chefdhotel observa, à cinq heures du soir, une petite demi-heure après un coup de tonnerre assez
violent qui avait été précédé de quelques autres plus faibles, un cylindre de feu d’environ deux pieds de diamètre apparent qui venait du sud-est et qui était incliné d’a-peu-près 70° à l’horizon. En moins d’une demi-minute ce cylindre s’est allongé de près de quatre-vingts pieds et fut transporté avec la rapidité
de l’éclair dans une cour où son extrémité inférieure s’est élargie en forme de cône, après quoi il disparut sans bruit sensible et sans faire de dommage.”
1779, 8 mars, département de l’Ain. Observation
d’une boule de feu suivie d’une forte détonation.
1779, 25 novembre, Clermont Ferrand (Puy-de-Dôme). La chronique des OVNI, par Bougard Michel (1977) relate : “Je sortais, le 25 novembre, d’un souper agréable pour moi, lorsque j’aperçus dans les airs un globe de feu, dont le diamètre me parut égal au demi-diamètre de la lune. Je le suivis dans les différentes circonstances qui l’accompagnaient et qui me causèrent la plus agréable surprise. Je le vis prendre naissance du côté du Nord, c’est-à-dire du côté de Riom-Châtel, parcourir en deux ou trois secondes un espace assez considérable, et finir sa course en un point qui me parut répondre au sommet du Puy-de-Dôme, après avoir enflammé les nuages derrière lesquels il ne passait que pour reparaître avec plus d’éclat. Ce ne fut qu’après ma surprise que je cherchai à connaître la cause d’un effet si surprenant. J’eus recours à tout ce que la physique pouvait me suggérer de suppositions propres à expliquer ces jeux de la nature ; je les attribuai à la condensation des matières sulfureuses, à l’inflammation que peut produire sur ces matières un frottement violent ou une trop grande quantité de feux concentriques de l’électricité; aucune de ces hypothèses ne put me satisfaire, et après quelques recherches je vis, non sans quelque déplaisir, qu’il était réservé à de plus habiles physiciens que moi d’arracher à la nature les secrets
de ses jeux. (signé B...)”
1782, 8 septembre, La Rochelle (Charente-Maritime). “De la Rochelle le 13 Septembre. Dimanche dernier, un peu après le coucher du soleil, le Ciel étant fort sêrein, le vent au Nord-Est, & les étoiles commençant à paraître, on apperçut, ici, dans le Sud-Ouest, une espèce de colonne de feu, qui parcourut d’abord un petit espace, en descendant obliquement ; elle creva ensuite par son extrémité, & laissa échapper un grand nombre de petites étoiles, qui s’éteignirent sur le champ, comme celles d’une fusée. Alors, cette portion de la colonne prit l’apparence d’un petit globe mal arrondi, qui jettait une lueur un peu moins vive que celle de la lune ; & le reste diminua insensiblement, au point de ne plus former qu’un filet presqu’imperceptible, terminé par une queue, qui s’élevait avec un mouvement de fluctuation très-apparent, semblable aux replis d’un serpent. Ce Météore, qui n’a duré qu’environ 10 minutes, s’éloigna peu-à-peu, sans paraître ni hausser, ni baisser, après quoi il se dissipa entièrement.”
Source : Affiches, annonces de Toulouse et du Haut-Languedoc du 30 octobre 1782.
1783, sans précision géographique. Le tome 85 des
Annales de Chimie (p. 272) mentionne sans plus de détails
qu’une météorite serait tombée, créant un trou oblique dans le sol.
1783, 4 août, Boisgasson (Eure-et-Loir). Un médecin de Boisgasson signale un “météore igné” dans le ciel : “Le 4 à 11h.5. un météore igné très lumineux descendit du zénith
à l’horizon vers le sud sud ouest quart à l’ouest.”
1783, 18 août, Verneuil-sur-Seine (Yvelines). “Lettre sur un météore lumineux. Au château de Verneuil, près Triel, le 19 août 1783. Pour jouir de la beauté de la
soirée d’hier, nous nous promenions sur la terrasse du château, lorsque nous vîmes, du côté du nord, une clarté s’élever derrière le côteau au-dessus de Vaux, sur la rive droite de la Seine. Cette clarté ressembloit à un nuage blanc & rond d’environ un pied de diamètre, & fut suivie & effacée à l’instant par un globe lumineux qui paroissoit avoir six pouces de diamètre, qui s’éleva assez rapidement contre l’étoile polaire, parcourut plus que les trois quarts de notre hémisphère du nord au midi : & en diminuant la vélocité de sa course, à mesure qu’il avançoit, est disparu du côté de Vernouillet, à une trentaine de degrés au-dessus de l’horison. Il étoit très-brillant, & il s’en détachoit, de distance en distance, des étoiles encore plus brillantes, qui suivoient sa direction pendant quelques toises, & laissoient après elles des traces ou lignes enflammées de diverses couleurs. Le globe laissoit aussi derrière lui des sillons ignés diversement colorés ; celui qui est
resté lorsque sa lumière a cessé de briller, paroissoit de la longueur de sept à huit pieds, &
a été visible pendant plus d’une seconde. Tout
ce météore a duré au moins 20 secondes. Lorsqu’il a passé sur nos têtes, il ne paroissoit pas être élevé deux fois de la hauteur du château. Ce qui joint au ralentissement progressif de sa course, nous laissa jouir de ce magnifique spectacle, & l’observer à notre aise. Après son extinction, nous avons fait les remarques suivantes. Il étoit 9 heures 1/4. L’aiguille du baromètre étoit au beau. Le thermomètre de Réaumur, à 14 degrés au-dessus de zéro. Les girouettes indiquoient le vent d’Est. Il y a eu le matin du même jour un brouillard épais sur la Seine qui insensiblement s’est abaissé &, est disparu. Il y a eu une forte rosée le matin. La journée a été très-belle, la soirée calme, le firmament étoilé. Il y avoit quelques nuages qui paroissoient immobiles, nous n’avons ressenti aucune odeur ni explosion, aucun mouvement ni changement dans l’atmosphère pendant & après ce météore. Tous les spectateurs sont convenus de n’avoir jamais vu un feu ni naturel, ni artificiel, qui puisse approcher de la beauté de ce phénomène. La journée d’aujourd’hui est très-belle.
Par un agriculteur de Sungau, abonné aux Journal & Galette d’agriculture.” Source : Gazette du commerce du 6 septembre 1783.
***
Le Baron de Berustorff rédige un mémoire, qui est
publié dans les Observations sur la physique, sur l’histoire naturelle et sur les arts, par l’Abbé Rozier, en janvier 1784. Voici une partie de ce mémoire : “Mémoire sur le météore du 18 d’aoust 1783 ; Par M. le Baron de Berustorff, de la Société Allemande de Gottingue, &c. &c.
Le calcul que je présente ici aux Lecteurs, vient un peu tard, puisqu’il y a cinq mois que le météore qui en est l’objet a paru. J’ai cru cependant que mes tentatives pourroient ne pas être tout-à-fait inutiles ; car il faut avouer que nous connoissons encore bien peu la nature de cette espèce de météores, & l’on ne pourra guères parvenir à en avoir une connoissance parfaite, qu’après avoir observé, pendant un temps assez considérable, leur marche & les différents phénomènes qu’ils présentent. Ce qui ne contribue pas peu à rendre cette recherche difficile, c’est la grande rapidité de ces météores, qui ne nous laisse pas le temps de faire des observations assez exactes. Le météore du 18 d’Août sur-tout a été vu par si peu de personnes, & les faits qu’on en a rapportés, & qui doivent fournir les données du calcul, sont en si petit nombre, qu’il est très difficile, pour ne pas dire impossible, de parvenir à quelques résultats un peu sûrs à ce sujet, de sorte que la seule espèce d’exactitude qu ‘on peut desirer dans un calcul au borné, c’est de donner des résultats qui soient toujours au-dessous delà vérité ; c’est-à-dire, de donner toujours la vîtesse, la distance, la grandeur réelle, & les autres quantités qui peuvent entrer dans le calcul, moindres qu’elles n’ont été en effet. C’est-là l’objet que je tâcherai de remplir.
Voici les faits rapportés par M. de la Lande, dans le Journal de Paris du 24 d’Août 1783.
1°. Il est sorti de l’horizon de Paris, au nord, un peu a l’ouest, à neuf heures & demie, le soir 18 d’Août, & il est rentré dans l’horizon au midi, un peu à l’est.
2°. Sa forme étoit celle d’un globe de feu, dont la grandeur apparente ; au moment de la sortie de l’horizon, étoit celle de Jupiter.
3°. Après être arrivé au zénith de l’horizon de Paris, son diamètre apparent étoit celui du disque de la
lune ; après quoi il a éclaté, & il s’est formé une suite de dix petits globes, qui a rempli une étendue de plus de 15 degrés.
4°. La durée totale de l’apparition sur l’horizon de Paris, a été de 15 à 20 secondes.
5°. Le même météore a été vu à Nuits en Bourgogne, où il est rentré dans l’horizon au sud.
La Gazette de France ajoute qu’il a été vu à Londres à la même heure qu’à Paris ; que la durée de l’apparition sur l’horizon de Londres, a été de 20 secondes, & qu’il est sorti d’un nuage au nord de l’horizon de Londres.
Voilà tous les faits constatés qu’on sait de ce météore.
On voit d’abord, puisqu’il est sorti par-tout où on l’a vu, du nord un peu à l’ouest, & qu’il est rentré dans l’horizon au midi un peu à l’est, que a direction ne s’écarte pas sensiblement d’un plan qui passera par les deux pôles. Mais parce que par-tout où on l’a vu, il est sorti, est rentré dans l’horizon, on voit encore que la direction qu’il a suivie n’est pas rectiligne, mais qu’il a décrit une ligne courbe.
Or, puisqu’il s’est élevé au-dessus de la surface de la terre, & qu’il est redescendu sur la terre, il est évident que ce globe n’a pas été exempt de pesanteur ; car il n’est pas possible d’imaginer aucune autre force qui ait pu le pousser vers la terre. Mais parce que la vîtesse a été évidemment supérieure à celle du vent, il est clair qu’il doit avoir été poussé le long de la surface de la terre par une force différente & supérieure à celle du vent. Nous avons donc deux forces qui ont agi sur ce globe ; celle de la pesanteur, & une force d’impulsion ou de projection, dont la cause n’est pas bien connue. [...]”
“On mande d’Arras que le 18 du mois dernier, vers les neuf heures & demie du soir, on y vit une étoile filante qui produisit en tombant une clarté plus vive que celle de la pleine lune : le même phénomène y avoit été remarqué à peu près à la même heure quelques femaines auparavant. L’étoile filante du 18 laissa sur son passage qui étoit du nord au midi, une traînée de feu considérable ;
elle disparut après s’être divisée en plusieurs globes par une explosion qui fit entendre un bruit semblable à celui d’une fusée volante qui éclate en l’air. On a vu un phénomène à peu-près pareil à Lille le même jour.”
***
“Le 18 Août de cette année, à neuf heures Vingt-cinq minutes du soir, le Baromètre étant à 28 pouces 4 lignes, & le Thermomètre à 18 degrés selon M. de Reaumur ;
un très-léger vent soufflant à-peu-près du côté du Nord, j’aperçus, dans le vrai Nord du monde, à 20 degrés vers l’Ouest, la variation de l’aimant corrigée, à la hauteur de 40 degrés sur l’horizon, un Globe de feu de forme sphérique, dont la grosseur représentoit a peu-près celle de la Lune dans son plein, qui parcourut dans le ciel un arc de 100 degrés ; & ce fut là où un groupe d’arbres me le cacha ; peu de secondes avant, c’est-à-dire, éloigné d’environ 40 degrés du zénith, il me parut que le feu de ce météore manquait d’aliment, car sa lumière commençait à diminuer sensiblement ; il passa à 10 degrés vers l’Est du zénith, & mit environ 90 secondes à parcourir cette portion de l’arc du ciel. Sa marche étoit accompagnée d’un pétillement semblable à celui d’une tres-forte électricité, & laissait après lui une longue queue ou longue traînée de feu, que j’ai attribué, non pas aux cendres embrâsées du Globe, qui étant abandonnées après lui dans sa course paroîssoient enflammés tant qu’elles étoient embrâsées, & disparoissoient sitôt après leur refroidissement :
mais à la vitesse extrême avec laquelle ce Globe s’est
mû ; car comme la foîblesse de notre organe ne me
permettait pas de distinguer les endroits qu’il venoit
d’abandonner, & que l’impression de la lumière subsistoit encore dans mes yeux, je croyois voir tout cet
espace en feu : en effet, la vitesse avec laquelle il s’est
mû étoit si grande que je ne pouvais point distinguer
leurs différentes parties, mais que je ne saisissois
que leur masse locale : la forme de cette queue qui comprenoit en ligne droite différents Globes qui diminuaient de volume, à mesure qu’ils restoient en arrière, me confirme cette supposition. - La clarté de la lumiere de ce Globe annonçait une matière fort condensée & composée, car la couleur blanche de ce feu me fait supposer que cette matière est un
composé presque entièrement nitreux, & très-légérement sulphureux : cependant, en supposant que la matière sulphureuse y dominât, il faudrait, dans cette seconde hypothèse, supposer le souffre extrêmement volatilisé. La forme sphérique de ce météore n’est due qu’à sa propre marche ; car comme c’étoit un fluide embrasé qui nageoit alors dans l’air, qui, lui-même, est un autre fluide, il a pris une forme sphérique. L’action des vents n’a dû nullement influer sur l’extrême vitesse de sa marche, puisque, au moment de son apparition, l’air étoit fort calme : de plus, l’action des vents, si forts qu’ils soient, n’auroit pu le faire mouvoir avec tant de promptitude ; & je crois que, jusqu’à ce jour, la Physique n’a pû découvrir la force projectile qui anime ces forces de météores. Le jour qui précéda cette observation, le temps fut assez beau, peu nébuleux ; le vent assez constamment calme, & souflant du côté du Nord ; le Baromètre toujours à
18 pouces, 4 lignes, & le thermomètre à 20 degrés selon M. de Réaumur, & peu après le coucher du
Soleil il parut, dans la région du Nord, à 20 degrés
près de l’horizon, quelques petites nuées électriques, que la lumière de la Lune éclipsa.” Source : Mercure
de France du 27 septembre 1783.
1784, 29 avril, Sorgues (Vaucluse). “De Sorgues, à une lieue d’Avignon, le 29 Avril. Me trouvant,
Monsieur, occupé hier à travailler à une de mes terres, dans le terroir de ce lieu, j’apperçus sur les six heures & demie du soir un globe qui voyageoit dans l’air, &
qui tomba tout enflammé dans une vigne proche ma terre, sur deux oliviers, où il auroit mis le feu, si je n’y avois pas accouru. Le globe fut brûlé totalement ;
j’en ai retiré le chaudron, que je remettrai à qui vous m’indiquerez par votre lettre, que je vous prie d’affranchir, si vous m’écrivez par la poste. Mon adresse est à Pierre Giry, ouvrier en laine, à Sorgues, par Avignon.” Source : Mercure de France, 29 mai 1784.
1784, 18 août, Bourges (Cher). “De Turly, près de Bourges en Berry, le 18 Août 1784, au soir. A 7 heures 48 min. on a vu, du côté du couchant, un globe de feu
du plus brillant, gros comme la moitié de la lune ; il
étoit rond & filoit d’une grande vitesse en suivant le
mouvement du soleil, ayant une queue lumineuse
d’environ 10 degrés ; il s’en est détaché plusieurs parties aussi grandes que les plus belles planètes,
qui ont bientôt disparu. Le gros globe a brillé 4 à
5 secondes & a aussi disparu ; il paroissoit élevé sur l’horizon d’environ 40 degrés ; il étoit un peu plus bas que l’étoile Arcturus, & il paroissoit à la vue éloigné d’une bonne lieue ; & quoiqu’il ne fit pas encore nuit,
il faisoit ombre, & on l’a vu parcourir environ
40 degrés. Plusieurs personnes l’ont vu à Turly meme & ailleurs. Signé, GOURMET, Chanoine.” Source : Journal de Paris du 26 août 1784.
1785, 10 janvier, Valence (Drôme). “Le 10 Janvier
1785 à 11 h 20 du soir M. de Rozières aperçut entre le
nord & le sud-ouest de Valence, un météore igné qui
ressembloit fort à une grosse fusée très-lumineuse,
& qui éclaira parfaitement l’horizon pendant une
minute & demie environ ; il sembloit se diriger vers le
nord-est avec une vîtesse conndérable & il se termina
par plusieurs étincelles brillantes, qui, en se détachant,
parurent se porter vers la terre : cette explosion produit
un bruit que l’auteur compare à celui d’une petite
pièce de canon entendue à une demi-lieue de distance,
le thermomètre à 1 degré 1/2 au-dessus de la
congélation, le vent foible au sud.” Source : Histoire de l’Académie royale des sciences, 1786.
1785, 12 mai, Paris. “Messieurs, J’ai vu, le Jeudi 12 de ce mois, à 9 heures 20 min. du soir, un globe de feu allant d’occident en orient ; quelques personnes l’ont vu comme moi, mais sans avoir pu m’en donner de détails satisfaisans ; cependant ces sortes de météores sont assez remarquables pour mériter d’être décrits. Permettez moi de demander, par la voie de votre Journal, ce qu’on a pu remarquer à cette occasion. N’etoit-ce point un globe aéroslatique ?
Depuis le météore du 17 Juillet 1771 dont je rendis compte dans le Journal des Savans du mois de Septembre, on n’a vu que celui du 18 août 1783, dont je vous entretins quelques jours après ; mais celui dont il s’agit actuellement auroit eu beaucoup moins de vitesse & auroit été beaucoup plus près de nous, car on m’a dit qu’au Louvre il avoit paru fort élevé ; tandis que du Pont au Choux on le voyait très bas. J’ai l’honneur d’être, &c. Signé, De La Lande.” Source : Le Journal de Paris du 27 mai 1785.
1786, 12 août, Caen (Calvados). “Le 12 août, à 8 heures
du matin, par un temps calme, on entendit à Caen
un bruit semblable à un coup de canon éloigné, mais
plus prolongé. Quelques personnes rapportèrent qu’on
avait vu un météore tourbillonner dans la campagne
et se dissiper avec explosion. Le bruit fut entendu, à la même heure, à Belleron, Caumont, Thorigné.” Source :
Bulletin de la Société historique et archéologique de l’Orne, tome 21, 1902.
1788, 29 mars, Saint-Exupéry-les-Roches (Corrèze). ”nota [en marge]
Le 29 mars 1788 a neuf heures du soir il parut du
coté du couchant un globe boreal de la grandeur deux fois plus grande que la lune en son plein Ce globe etait parsemé dans toute sa capacite de lumieres plus vives que le fond et eclairait lair qui lenvironnait comme fait la lune quand elle est couverte de brouillards a neuf heures un quart ce globe sallongeat comme une nappe pliée en quatre et les luminons ne parurent plus à neuf heures et demi tout disparut... Le mercure de france avait annoncé le mois precedent qu’on avait vu dans lair du coté de paris des globes de feu. Les astronomes et les phisiciens ne manqueront pas d’en donner lexplication en attendant le peuple en tire de mauvais augures.” Source : Registres paroissiaux, Archives départementales de Corrèze, BMS - 1771 -
1792 - E DEP 201/GG8 - vue 334 / 401 - folio 332 (remerciements à Dominique ROS - geneadom.free.fr pour sa retranscription).
1789, 20 août, Bordeaux (Gironde). Une météorite
serait tombée à Bordeaux en 1789. Dans son ouvrage
“Les phénomènes de la nature“ publié en 1835, De
Marlès évoque “Vers la fin du mois d’août 1789, à la
suite d’une forte explosion qui fut entendue de tout Bordeaux, une pierre d’environ quinze pouces de diamètre tomba sur une ferme, traversa le toit et tua un berger et quelques bêtes à laine. Une portion de cette pierre a été conservée au musée de Bordeaux.“ Bordeaux est un synonyme de la chute
de Barbotan (1790), malgré la distance séparant les
deux villes. Un autre morceau de la pierre était
conservé dans le musée privé de M. Greville, qui l’a
reçu des mains de M. de St Amans, professeur
d’histoire naturelle à l’Ecole Centrale d’Agen. Bref, il
est difficile de s’y retrouver. Sources : M. Greville, Phil. Trans., 1803 et De Marlès, Les Phénomènes de la Nature, 1835.
1791, Béziers (Hérault). “J’ai pu avoir le journal de Bertholon pour 1791. Après avoir donné dans le
n° 23, la description d’un globe de feu ou Bolides
qu’il avait observé à Béziers, et qui présentait toutes
les circonstances ordinaires à ce météore, grande lumière, éclat, détonation violente à l’instant de la cessation de la lumière, etc.” Source : J. Izarn, Des
pierres tombées du ciel : ou, Lithologie atmosphérique,
1803.
1795, 4 mai, Lyon (Rhône). La chronique des OVNI,
par M. Bougard (1977) indique : “Plusieurs habitants
ont aperçu des boules de feu se déplaçant à une
vitesse prodigieuse dans le ciel de la ville.”
1795, 22 mai, Trévoux (Ain). “Les globes de feu et les météores qui éclatent dans l’atmosphere avec grand bruit sont des phénomenes qui étonnent toujours, quoiqu’ils ne soient pas très-rares. Le citoyen Lalande a décrit dans le journal des savans ceux qui parurent le 17 juillet 1771 et le 18 août 1783. Il a reçu une lettre de Trévoux dans laquelle le citoyen Langeron lui écrit que le 3 prairial, il en a observé un très-remarquable ;
ce physicien était occupé à examiner le coucher du
soleil vers les 7 heures trois quarts ; il partit du ciel,
qui était serein, une fusée qui prit sa direction
horizontalement de l’Ouest à l’Est, et après avoir
parcouru en forme de zig-zag une très-longue ligne,
l’espace d’environ deux secondes fit une explosion qui se termina par deux coups de tonnerre successifs,
semblables au bruit d’un coup de canon de huit
que l’on entend à la distance de 4 lieues, après ce bruit la ligne de feu qui avait formé la fusée se changea
en fumée épaisse qui se dissipa quelques minutes
après, laissant une odeur de soufre. Les étoiles tombantes sont un phénomene du même genre, et produit par la même cause, l’éloignement en fait toute la différence.” Source : Gazette Nationale, 12 juin 1795.
1798, avant le 14 mars, au sud de Metz (Moselle). “Metz, le 30 ventôse. Le 24 de ce mois, vers dix heures du matin, un tremblement de terre s’est fait sentir à Sarreguemines, à Blicastel, et dans d’autres communes du département de la Meurthe. La secousse a été très-violente. On n’a point ici de données positives sur sa durée et sur sa direction. Elle a été si forte à Bitche, quelle a soulevé une partie de la voûte du pont ; ce qui eu rendu le passage dangereux, et sa réparation extrêmement urgente. Un fait qui semble expliquer ce phénomène, c’est que la circonférence dans laquelle il a eu lieu, renferme plusieurs mines de houille, dont une semblable à la Soltaterra de Naples, brûle continuellement. Quelques jours auparavant, un météore enflammé s’est élevé de terre, entre Fey et Véron, à trois lieues sud de Metz. Sa disparition a été suivie d’une détonation qui a ébranlé l’atmosphere à une distance considérable.” Source : Gazette nationale du 28 mars 1798.
1799, janvier, Paris. “A sept heures trois quarts
précises du soir, le thermomètre marquant près de
huit degrés de froid au-dessous de la glace, l’astronome Jeaurat, doyen de l’observatoire, et le
citoyen Lecomte, garde-magasin à l‘Observatoire, ont
tout-à-coup été éblouis d’un éclair, répandant une
forte lumière dans tout le ciel ; alors leurs yeux étaient dirigés du côté du couchant, puis jetant rapidement leurs regards du côté du Nord, ils ont aperçu au Nord Est, et a la hauteur d’environ 20 degrés, comme une flamme rouge ; puis à cet instant le météore a disparu en entier. La durée totale a pu être de six Secondes ; enfin, les étoiles ont de nouveau brillé, et le tems était serein et sans nuages.” Source : Gazette nationale du 10 janvier 1799.
1799, 26 janvier, Nantes, la Flêche, la Ferté-Bernard, Rouen. “Les lettres de Nantes, de la Flêche, de la Ferté-Bernard, de Rouen, toutes datées du 7 pluviôse, nous annoncent que dans la nuit du 6 au 7 pluviôse, on a éprouvé dans ces différens endroits, sur les quatre heures du matin, de violentes secousses de tremblement de terre. Il a produit par-tout à-peu-près les mêmes effets, et a été précédé des mêmes symptômes. A tout prendre il a fait plus de mal que de peur. A Nantes on a observé que ce tremblement par pulsation ou soulèvement, a été précédé par un météore igné, qui a jeté un vif éclat. L’air était calme, le ciel couvert, l’horison rougeâtre ; une pluie abondante a suivi ; on en a toutefois été quitte pour quelques cheminées, et pour de vieux murs qui se sont écroulés ; mais comme on ne guérit pas de la peur, un grand nombre d’habitans se sont levés, et ont quitté leurs maisons ; d’autres, en entendant craquer leurs meubles, persuadés que les voleurs étaient chez eux, prenaient leurs armes et se préparaient aux combats ; il ne parait pas que
personne ait péri.“. Source : l’Ami des Lois du 30 janvier 1799.
1799, 11 novembre, Navarrenx (Pyrénées-Atlantiques). On peut lire dans Suite des mémoires
pour servir à l’histoire naturelle des Pyrénées, et
des pays adjacens, par M. Palassou (1819) : “Le 11 novembre 1799, je partis de la commune d’Ogenne,
située près de Navarrenx, et me rendis le même jour,
chez M. Picamilh ancien secrétaire d’ambassade
en Suisse, qui résidait à sa maison de campagne
de Larouin, non loin de Pau ; j’y passai la nuit ; le
temps avait été un peu sombre toute la journée
et la température assez douce ; mais les planètes et les étoiles brillaient avant l’aurore du plus bel éclat : je fus frappé du magnifique spectacle que présentait la voute céleste. Le lendemain 12 du même mois, M. Picamilh entra dans ma chambre, un moment avant que le jour ne commençait à poindre ; et comme c’était à peu près à la même heure où, la veille, j’avais
observé les astres dont la vue m’avait saisi
d’admiration, mon premier empressement fut de l’engager à contempler le ciel : mais comme il était couvert de nuages épais, il ne fut point possible de jouir du même plaisir que j’avais éprouvé la veille, nous fermames la croisée, et ce fut dans un moment où nous étoins loin de le supposer si rapproché de celui où la nature préparait en silence, sous un voile ténébreux, le merveilleux phénomène dont je vais rendre compte, et qui causa dans une grande partie
du Béarn autant de frayeur que de surprise. Bientôt après je pris congé de M. Picamilh, je me rendis à Pau où quelques personnes me parlèrent des feux qui, vers le lever de l’aurore, avaient paru dans l’atmosphère. Mais les renseignemens qui me furent donnés dans
cette ville, ne satisfirent qu’imparfaitement ma
curiosité : des notions plus étendues me furent
communiquées dans mon habitation d’Ogenne où
j’arrivai le lendemain 13 de novembre. Dès que je fus descendu de cheval, mes domestiques s’empressèrent de m’apprendre que la veille, 12 du même mois, et vers le lever du soleil, ils avaient apperçu du côté du Sud-Est, avec d’autres personnes, un météore ignée, d’une forme oblongue, dont le diamètre dans sa plus grande largeur, paraissait égal à celui de la pleine lune ; ce météore accompagné d’une longue queue, s’éleva majestueusement vers la région supérieure, et disparut subitement sans nulle explosion. A peine ce phénomène était dissipé, qu’on découvrit du côté du S. O., un autre météore ignée, qui se mouvait dans l’atmosphère et descendait vers la surface
de la terre : il disparut derrière un côteau qui domine ma maison du côté du N. N. O. A ce météore on en
vit succeder bientôt après un troisième au S. E. accompagné d’une longue queue et qui se dissipa tout à coup.”